Le spectacle du mal : Sanctuaire, de William Faulkner

Alabama 36

Sanctuaire, William Faulkner, Gallimard, 1972 (éd. originale, 1931) (traduction R.N.Raimbault, Henri Delgove, Michel Gresset)

« Bon Dieu, dites ce que vous voudrez, mais il y a une sorte de corruption dans le simple spectacle, même fortuit, du mal : on ne marchande pas, on ne trafique pas avec la pourriture… »

Sanctuaire, p.162

I.

André Malraux, dans sa célèbre préface au texte de William Faulkner, Sanctuaire, estime que ce roman « est l’intrusion de la tragédie grecque dans le roman policier. » Au risque de passer pour un méchant inculte, j’avoue ne pas totalement comprendre cet aphorisme malrucien – et je sais ne pas être le seul lecteur de Malraux dans ce cas. Car pour moi, cet immense roman ne vibre pas de thèmes tragiques grecs – le destin, les Dieux, l’hubris, la fatalité, la tragédie, les sacrifices – je n’y sens rien de Sophocle ou d’Eschyle, sinon, peut-être, la prégnance de troubles histoires familiales. Non, décidément, je n’aperçois là ni Oreste ni Médée, ni Phèdre ni Électre. Ce roman palpite, dans l’étouffante chaleur du deep south et de Memphis, de la présence du mal, présence « irrémédiable », pour reprendre une autre expression, plus heureuse, d’André Malraux. Tous les personnages font là l’expérience non du franchissement impie des limites de leur propre pouvoir, de leur propre existence, de leur propre singularité, mais  celle, atroce, de la puissance corruptrice du mal. Dans les œuvres de Faulkner, au fond d’elles, réside quelque chose de l’homme après la Chute, de l’homme après le péché. Les personnages de Sanctuaire chus dans le monde réel, moite et médiocre, doivent composer avec une présence sombre et corruptrice. Je n’y vois là pas de thèmes grecs, plutôt des thèmes chrétiens : le tableau exorbité des péchés du monde, de sa corruption profonde. Comment composer avec le mal ? Ou plutôt, comme le souligne l’avocat Horace Benbow, comment en éviter la corruption, alors qu’il palpite et vibre partout, à chaque instant, sans repos et sans trêve ? Que peut l’homme commun, déjà aux prises avec le mal ordinaire, avec ses petits vices et ses misérables tentations, s’il est confronté à un mal d’une nature plus puissante, plus concentrée ?

 II.

Le personnage central du livre est ce mal ineffable, irréfragable, incompréhensible qui émane tant de la personnalité de Popeye que de l’ambiance dégénérée d’une cache de bootleggers, de la communauté des habitants de Yoknapatawpha ou de celle des tribunaux de Jefferson. Sanctuaire, c’est le tableau d’une corruption, la description d’un avilissement. Le lecteur le sent : chaque situation recèle, en puissance, l’expression du mal pour le mal, la cupidité, certes, l’intempérance, aussi, mais surtout la cruauté la plus malsaine. Ainsi quand, au début du livre, Gowan ramasse quelques jeunes traînards dans sa voiture, alors qu’il est déjà passablement éméché, un climat d’incertitude aigre, d’hostilité sourde et vineuse, proche de l’explosion violente, enveloppe la scène. Il ne se passera rien entre eux, sinon une autre triste saoulerie, mais le lecteur pressent que l’ombre du mal plane et planera toujours sur les personnages du livre. Faulkner ne peint pas le mal comme un démon apocalyptique, supérieur et criminel, non, il le dépeint comme une tentation de l’acte nuisible, gratuit, sans cause, presque « innocent » dans son expression même, dans son absence de mobiles, de motifs. C’est le mal dans toute son absurde dégradation. Popeye apparaît dès les premières lignes du roman ; c’est le seul moment où il rencontrera l’avocat Benbow, l’autre protagoniste essentiel de Sanctuaire. Popeye regarde Benbow, voyeur déjà, menaçant bientôt. De Popeye émane une incertitude malsaine. Physiquement, Popeye apparaît comme une « espèce de gringalet », « à la méchante minceur de l’étain embouti », crotté, le regard fixe, privé de menton. Il n’est pas un génie du mal ; il en est la manifestation presque inhumaine, ou plutôt préhumaine, inachevée et, partant, inaccessible à toute raison. Faulkner semble s’être inspiré d’une réalité psychiatrique que les criminologues venaient, à l’époque, de découvrir : le parcours psychologique de Popeye, très explicitement retracé dans le dernier chapitre, justifie presque scientifiquement son action ultérieure, son portrait moral. Rien ne manque à Popeye : ses comportements d’enfant annoncent tout, expliquent beaucoup et le condamnent déjà, de loin en loin, à l’échafaud.

C’est la richesse de Sanctuaire : présenter le mal sans son arsenal romantique, sans sa brillance ténébreuse, dans son expression animale et psychologique la plus basse. Faulkner élude soigneusement l’intériorité de Popeye, intériorité impossible à retracer, intériorité probablement inexistante. Jamais le lecteur ne pourra avoir un aperçu de ce qui se produit dans la cervelle du criminel : ses actes parlent pour lui, lui qui n’est presque pas capable de s’exprimer. La pulsion n’a pas besoin d’analyse psychologique. Il ne s’agit pas de comprendre le mal, mais d’en décrire les effets. Faulkner ne le peint pas, il en peint l’expression, les conséquences. Pour m’exprimer sous la forme d’un cliché usé, Popeye est le « trou noir » du roman, son gouffre insondable, qui absorbe toute lumière et toute force pour les anéantir. De fait, le personnage de Popeye ne présente que peu d’intérêt ; le lecteur sentira son influence plus qu’il ne l’observera à l’œuvre – peut-être même décevra-t-il par sa médiocrité foncière autant qu’il effraiera par son imprévisibilité. C’est dans l’œil des autres que s’observera le reflet obscur de sa présence : l’œil de ses victimes, l’œil de son gibier. Comme je le disais plus haut, Faulkner ne laisse pas d’équivoque, à la première scène, Benbow, l’avocat, personnage récurrent de Faulkner, se trouve pris à partie par Popeye et, même si le roman prend des chemins de traverse, le lecteur comprend que le danger viendra d’abord de ce Popeye, quintessence de la bassesse et de l’incompréhensibilité du mal. Force primitive et déchue, il sera le déclencheur d’une autre lutte, celle de personnages non moins coupables mais plus humains, pour se tirer des griffes du mal. À Popeye semble opposer une puissance bienveillante fort incertaine, celle de l’avocat Horace Benbow.

Si Popeye est le mal dans toute sa plénitude noire, Horace Benbow représente l’incertitude du bien, empêtré moralement, inefficace, impuissant, corruptible. Le combat ne se déroule pas à armes égales. Pourtant, Benbow est plus solide qu’il n’y paraît, plus apte à combattre qu’il ne le croit lui-même ; hélas, c’est le monde autour de lui qui fait défaut. Ses proches sapent sa détermination de l’intérieur – le rôle de la bien nommée sœur de Benbow, Narcissa, sera celui-là, de le décourager, de ne pas croire en lui, de ne pas espérer en la possibilité du bien. Pour se protéger, plutôt que de croire et de se battre en faveur d’un bien hypothétique, elle récuse son propre frère et la valeur de son combat. Ne pas voir le spectacle de la corruption, ne pas y prendre part, lui suffit, quitte, pour obtenir sa tranquillité d’âme, à dénoncer et à favoriser sans le savoir le mal. Le maigre filet de la vérité se tarit ; la justice est desséchée. L’enchaînement du procès est inexorable ; peut-être est-elle là cette « tragédie grecque » vue par Malraux, dans l’inexorabilité de la défaite de Benbow. Malgré tous ses efforts, l’avocat échoue ; justicier improvisé, exilé de chez lui, en quête de Salut, de rédemption par les œuvres, il ne sauve personne, pas même lui. Il fuyait son foyer ? Il y retourne, vaincu.

III.

Les critiques de Sanctuaire souligneront, à raison de mon point de vue, l’excessive accumulation mélodramatique à laquelle s’est livré Faulkner. Pour s’imposer éditorialement, après des livres difficiles comme Sartoris et Tandis que j’agonise, Faulkner n’a effectivement pas choisi la voie de la subtilité : corruption, alcoolisme, meurtre, viol, lynchage, etc. Tout y est. André Beleikasten parla, dans sa très belle biographie parue aux hélas défuntes Éditions Aden, d’un « œil exorbité » observant la monstruosité de péripéties « mélodramatiques ». C’est un fait, Sanctuaire condense à peu près toutes les thématiques les plus sordides de la littérature de son temps. Il ne commet pourtant pas, à mon sens, de véritable racolage littéraire. Les crimes les plus abjects, moraux (l’attitude de Gowan, abandonnant Temple Drake à son prévisible destin) comme physiques (le meurtre de Tommy) sont évacués de la narration, présentés de biais, avec un style qui évite d’en souligner explicitement l’atrocité. Sanctuaire n’est pas un roman pour les lecteurs inattentifs, même s’il se présente sous la forme d’un texte plus facile à suivre que Le Bruit et la fureur ou Tandis que j’agonise. Faulkner sollicite l’attention de son lecteur en profondeur par sa présentation presque « périphérique » des péripéties du roman. Ainsi la scène cruciale où Popeye commet « l’irrémédiable » m’apparaît comme un pur coup de génie : rien n’est dit et pourtant tout y est. La prose, opaque et poétique, parvient à éluder l’explicite et à tenir une ligne étroite, fine, effilée, de suggestion presque incrédule. Les lignes narratives se densifient, métaphoriques, lyriques, pour faire éclater l’insondable en creux, en négatif, en contrepoint, seulement souligné par trois remarques de Temple Drake, trois remarques anodines, vagues, et qui pourtant laissent percer le soupçon d’un mal atroce, de cet « irrémédiable » dont parlait à juste titre Malraux dans sa préface. L’imagination du lecteur, solidement éprouvée par l’attente insupportable d’un irrémédiable tant attendu, fera le reste. En quelques lignes, p.132, le « il va m’arriver quelque chose ? » devient un « il m’arrive quelque chose » puis un « je vous avais bien dit que cela m’arriverait ». Au lecteur de mettre des faits derrière ce quelque chose, nécessairement maléfique et transgressif ; au lecteur, donc, de se laisser contaminer par le mal en l’imaginant, en le reconstruisant à partir des maigres indices du texte. Il ne faut pas « marchander avec la pourriture », dit Benbow ; et c’est pourtant à cela que convie Faulkner, une fausse catharsis dans laquelle rien ne peut échapper au mal.

Nabokov, critique féroce et injuste de la littérature des autres, disait que l’essentiel d’un roman résidait dans ses détails. C’est aussi par les détails que Faulkner peut être jugé. Ainsi, plus tard dans le roman, alors que le lecteur peine à comprendre la nature réelle de ce qui a été commis, le bordel de Memphis, sa tenancière, Miss Reba et ses petits chiens me semblent un détail savoureux, particulièrement bien inventé. Voici une femme seule, tenant un bordel discret, élégant, dans les faubourgs de Memphis, accompagnée de ses petits chiens gâtés. Elle aide, généreuse, Temple Drake. Le lecteur peut un temps espérer qu’elle permette à la pauvre Drake de récupérer puis de s’enfuir. Tout chez Miss Reba aspire à la petite-bourgeoisie : le mobilier, longuement décrit, la quête de statut social, le souci de respectabilité. Et tout se défait, généralement, lorsque la solide et généreuse tenancière se met à boire. Les petits cabots frisottés, avec leurs nœuds de couleur autour du cou, princes agressifs de la maison, mordilleurs idiots,  deviennent alors, pour une soirée, les cibles de la colère inconcevable de Miss Reba. Ils se réfugient alors chez Temple, effrayés par ce qu’ils ne peuvent comprendre : la colère de leur maîtresse signe la corruptibilité d’un bien fragile et énigmatique, tout autant que la victoire de la tentation et du mal. Cette colère de leur maîtresse est aussi inexplicable à leurs yeux fragiles et animaux que peuvent l’être les pires manifestations de la nature humaine aux dépens de Temple Drake, de Lee Goodwin ou de Horace Benbow. Il n’y a rien à attendre de cette Miss Reba, habituellement bienfaisante et qui tuerait de rage ses petits chiens au moindre verre d’alcool, car il n’y a rien à attendre de personne. Il n’y a de salut nulle part, la société s’enfonce dans sa propre débauche, dans ses tourments mornes, grotesques ou lugubres. Les mieux intentionnés ne rachètent pas le mal : Miss Reba couvre les agissements de Popeye et se jette sur ses bêtes au moindre accès de colère ; la sœur de Benbow n’évite le contact du mal qu’en fermant les yeux, en se refusant à voir le désastre qui couve ; le sénateur Snopes est une crapule voyeuse et lâche ; etc.

Un personnage, peut-être, par son sens du sacrifice et sa perspicacité, semble plus solide que les autres, moins corruptible : Ruby Lamar, l’ancienne prostituée et concubine du bootlegger Goodwin (tout bootlegger qu’il est, Goodwin paraît assez extérieur, lui aussi, à la question du mal ; c’est toutefois, malgré la centralité scénaristique de son destin, un personnage secondaire). Elle tente de protéger Temple, de l’avertir et de s’opposer aux desseins des bootleggers ; elle ne trahit pas son concubin. Revenue de tout, sans illusion sur les hommes qui l’entourent, à sa modeste mesure, elle paraît bien être le seul personnage qui ne soit pas accessible au mal. Hélas, c’est pour le tolérer, l’accepter comme irréfragable réalité, sur laquelle il n’y a pas de prise possible. Ruby Lamar résiste au mal comme une victime résiste intérieurement à ce qu’elle ne peut éviter : en biaisant, en mimant le consentement, en fuyant. Alors que Temple Drake s’enfonce inexorablement, par le mensonge et la fuite, pour se sauver physiquement, physiquement seulement car sa mort intérieure appert, métaphorique, dans les yeux de pierre des statues du Jardin du Luxembourg à la fin du roman, Ruby parvient encore, par sa fidélité et sa constance, à préserver une étincelle d’existence hors d’atteinte du mal, comme elle essaie de préserver son jeune enfant des rats dans la ruine des bootleggers. Est-ce autre chose, vraiment, que la fragile manifestation de l’instinct de vie d’une proie terrée et sans espoir ?

Comme je l’ai dit plus haut, le scénario de Faulkner n’est pas d’une remarquable subtilité ; ses thèmes sont d’une noirceur outrée et ses rebondissements semblent se complaire dans le sordide ; c’est aussi pour cette raison que je ne l’ai pas résumé, car je ne rendrais pas hommage ainsi à un livre que je considère, je le revendique, comme un chef-d’œuvre. C’est l’écriture, parfait équilibre de suggestion, de lyrisme évocatoire et de naturalisme plus ou moins sombre, qui fait tout l’intérêt du roman. En choisissant de ne pas s’appesantir sur les abjections de son roman, en ne leur donnant pas la place racoleuse qu’elles auraient pu avoir dans sa narration, Faulkner déporte notre attention sur les détails, sur l’ambiance morale, une ambiance de perversion moite qui salit et corrompt tout ce qu’elle touche.

Il éclaire ainsi moins le mal lui-même – le mal est un trou noir que l’on ne peut que délimiter, pas exprimer – que ses conséquences moins visibles, plus diffuses. La déchéance naît de ce que le mal charrie et irradie, dans la durée, autour de lui. Temple Drake se corrompt à mesure que le roman avance ; les répercussions des actes de Popeye sont de plus en plus fortes. Il s’agit bien, comme le souligne Benbow, d’une « corruption » que seuls éviteront les pures victimes (Tommy et Ruby) et les personnages absents, comme la femme et la belle-fille de Benbow ; encore que le lecteur soit fondé à s’interroger sur la nature profonde du sentiment de Benbow à l’égard de sa belle-fille – Bleikasten y voit la révélation un désir pervers, peut-être à raison, j’y ai plus lu une inquiétude aimante, un transfert de ce qu’a vécu Drake sur ce que pourrait subir Little Belle Mitchell. Faulkner peint un monde chu dans le péché, que rien ne semble devoir racheter ; lorsque se présente le mal le plus insondable, le plus ineffable, l’univers peut-il éviter de basculer tout entier ? Peut-être, oui, pour une raison, une seule, que Faulkner suggère avec pessimisme : le mal absolu finit par avoir raison de lui-même, sans que le bien ne paraisse y pouvoir quoi que ce soit.

12 réflexions sur “Le spectacle du mal : Sanctuaire, de William Faulkner

  1. Votre (très bonne) critique me donne envie de me replonger dans Faulkner, dont ma première (et unique) lecture a été quelque peu…arf, je ne sais même pas comment dire : boiteuse. J’ai pas réussi à accrocher, mais je n’aime pas les échecs. Merci de me le rappeler 🙂 !

  2. Cet article me donne envie de fourrer mon nez dans les oeuvres de Faulkner … Et c’est vrai que j’en avais déjà envie depuis un moment (cf les 20min dans le Hall du livre de ma ville à réfléchir si je l’achetais ou non)

  3. merci. ce n’est pas (d’ailleurs vous rectifiez tout de suite) le spectacle mais la présence du mal qui importe. Popeye est là, point. ce qu’il fait est abominable. Mais l’horreur, c’est que sa simple présence éveille en chacun de ses partenaires-victimes-spectateurs fraternité du dégout de soi, la soif fatidique de l’avilissement. Ce n’est pas le Satan miltonien qui pousse l’homme au mal de désobeissance au reglement divin, ni Macbeth que la soif dee puissance pousse au crime, c’est le chuchotement perpétuel de l’âme mal insérée : tu ne vaux pas le monde où te voici jetée. Puissance contagieuse du dénigrement. On comprend que Camus ait tenu à en faire un requiem pour une nonne (nonne inclut pute, comme chez Hamlet) On comprend aussi que Gary se soit appuyé sur Faulkner pour approcher le mystère de la haine de soi dont il a vécu de si près les dégâts chez Seberg – l’innocence déportée. L’espoir est un chateau tremblant, dit Hafiz. La forte présence du mal suffit à le précipiter dans l’autodénigrement, l’autopersécution, l’amor fati : pas de ce qui vous arrive, mais de ce dont on va faire son destin.
    a quoi s’oppose, chez faulkner l’autosuffisance du bien, comme indifférence à la présence du mal : la Léna de J’accoucherai en Aout (c’est l’autre sens de Light in August) est absolument imperméable à tout ce qui n’est pas son miracle.
    présence contre présence. Mayoux a admirablement parlé du surgissement de la triple présence des malfrats qui vont condamner Lena et Heyst à leur victoire. Comme par hasard, c’est un mariage mixte qu’ils abominent et croient détruire. Effets désastreux de la présence blanche. C’est pourtant le livre le plus heureux de Conrad. Non pas Une Victoire mais Victoire.
    Eh oui. Victoire. Ni plus moins.
    Vienne le temps des contagions de la bonté.

    ps: je vois que sous le numero 33 de votre liste, vous m’avez inter-loqué. Comment fait on pour retrouver les anciennes chroniques? pouvez vous me la faire parvenir ? re- merci.

    • Cher M.Rozenberg, je vous remercie pour votre très juste commentaire. Je vous rejoins sur cette soif d’avilissement, ce dégoût de soi qui enveloppe presque tous les personnages du livre (comme je l’ai dit dans l’article, Ruby seule me semble parvenir à résister à ce mal ; il faudrait pousser l’analyse bien plus loin que je ne le fais pour attester mon impression). Votre commentaire m’évoque assez certaines remarques de Bernanos sur la relation qu’entretiennent le mal et le dégoût de soi (dans Monsieur Ouine je crois).
      J’ai en effet lu votre ouvrage sur Joseph Conrad en février dernier. Je n’ai repris ce blog que courant octobre après plusieurs années de pause, je suis désolé de vous avertir que vous ne trouverez pas de recension de ce livre ici. Étant un grand admirateur de Conrad, j’avais apprécié votre démarche, votre traitement,littéraire, philosophique et, permettez-moi de l’avoir éprouvé ainsi, poétique, de cinq livres phares de l’écrivain anglo-polonais (notamment Nostromo, que je place très très haut dans ma hiérarchie littéraire). Je regrette souvent que nos critiques, nos spécialistes de littérature ne soient pas plus attentifs à ce qu’ont produit les grands maîtres étrangers. Je suis toujours ébahi de songer que Conrad écrit CÅ“ur des ténèbres, Lord Jim, Nostromo, Sous le regard de l’occident et l’Agent Secret en une dizaine d’années à peine…
      Mes souvenirs de votre livre ne sont hélas plus assez précis (ni mes notes suffisamment en ordre) pour que je développe plus avant sans trahir votre pensée.

  4. « l’intrusion de la tragédie grecque dans le roman policier »
    Sanctuaire compte tout de même un Tirésias aveugle (et clairvoyant !) en la personne
    du vieux baveux qui ne cesse d’avertir Temple qu’il va « lui arriver quelque chose ».
    Derniers mots du chapitre XIII : « Je vous l’avais bien dit ! Je n’ai cessé de vous le dire ! »
    A se demander si la jeune fille (ce que je crois) n’éprouve pas une sorte de trouble attirance pour ce genre de danger.. [Impossible de continuer, les fenêtres d’identification me cachent mon texte… Tant pis…

  5. Bravo c’est très beau et très fin je viens de finir de le lire en anglais et j’avoue que ma lecture également fut quelque peu boiteuse…mais votre critique et le sentiment que je garde de cette lecture me font dire que c’est le genre d’oeuvre qui se digère…qui trace son chemin en nous quand on y repense. Alors je vous remercie infiniment pour vos éclairages (je compte aussi ceux qui ont commenté)

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