Les évolutions récentes et futures de « La bibliothèque de la Pléiade »

Le champ italien dans la Pléiade, un Pleiade italien d'Einaudi et un volume d'I Meridani

Le champ italien dans la Pléiade, un Pleiade italien d’Einaudi et un volume d‘I Meridani

Mars 2015 : Cette note a connu un grand succès. Vous trouverez en commentaires beaucoup d’informations sur la collection. Une version synthétique et à jour de toutes ces informations se trouve ici : https://brumes.wordpress.com/la-bibliotheque-de-la-pleiade-publications-a-venir-reeditions-reimpressions/. J’invite les lecteurs intéressés par la collection à s’y rendre s’ils souhaitent avoir une idée de ses futures publications.

Tout amateur de la « Bibliothèque de la Pléiade » en est un directeur potentiel. Étant fondée sur une forme de hiérarchie des valeurs, qui distingue entre les œuvres dignes d’y figurer des autres, elle appelle nécessairement au choix, à la distinction et in fine à la controverse. Chacun d’entre nous (intéressé par le sujet, cela va sans dire), s’il en avait la possibilité, exclurait deux ou trois auteurs qu’il déteste pour y faire entrer deux ou trois absents qu’il pense injustement oubliés ! Cette évidence posée, il convient de remarquer que la politique de Gallimard a pu également, au cours de la longue histoire de la collection, laisser quelquefois circonspect. Dans les deux ou trois dernières années, les publications des volumes Jules Verne, Boris Vian, Drieu la Rochelle ou, très récemment, Stefan Zweig, ont suscité des réserves. Il me semble entrer dans ces publications plus d’opportunisme commercial que d’ambition éditoriale. Plus jeune, j’ai beaucoup aimé lire Zweig mais à côté de Canetti, de Broch, de Döblin ou de Mann, il me paraît désormais un peu fade, un peu désuet. De l’extérieur, j’ai l’impression, à étudier le catalogue, que la politique éditoriale de Gallimard a opéré au moins deux grands virages en 80 ans. En taillant l’histoire de la Pléiade à la serpe, j’observe trois périodes : 1933-1964 : les grands classiques, seuls ; 1965-1995 : vers l’exhaustivité des textes (notes, variantes, commentaires), puis, dans le courant des années 70-80, une ouverture vers des domaines inexplorés (philosophie, textes asiatiques, etc.) ; depuis 1995 : tentative d’élargissement du public, rétrécissement des projets, moindre ambition éditoriale. La lourdeur des volumes, qui peuvent mettre plusieurs décennies à aboutir, estompe quelque peu les grands tournants de l’histoire de la collection : tel ensemble de volumes, lancé en 1975, a pu n’aboutir que 25 ans plus tard. Il reflète, au moment de son achèvement, comme la lumière émise par des étoiles au fond des cieux, une politique éditoriale déjà dépassée. Ainsi Ibn Khaldûn (choix exigeant et bienvenu de l’éditeur), dont le deuxième volume est sorti l’an dernier, me paraît plutôt relever des choix éditoriaux des années 80 que de ceux opérés depuis dix ans (de même pour Pline l’Ancien).

Gallimard a beaucoup publié, historiquement, sur le grand tournant, pour la collection, que fut l’édition des œuvres de Jean-Jacques Rousseau dans les années 60 : corpus étoffé de notes, de présentations, de variantes, matérialisation des préoccupations, notamment génétiques, des chercheurs. Avant, les volumes n’étaient guère que de solides compilations de textes. Quiconque feuillette les volumes des années 30 à 50 (la première édition de La Comédie humaine par exemple, ou les volumes de Tolstoï, de Dickens) et les compare aux éditions des années 60, 70 (Rousseau, Dante, la seconde édition de La Comédie humaine) verra immédiatement les différences. Dans les années 60, le nombre d’étudiants augmente, le nombre de chercheurs aussi. Pour les satisfaire (et profiter de ce marché), la simple collation de grands textes en un volume pratique à manipuler et peu encombrant ne suffit plus. Le livre de poche, nouveau-né de l’édition d’alors, satisfait largement la demande en matière grands textes. En revanche, les étudiants, les enseignants, en quête d’éditions soignées, denses, étoffées, ne peuvent se satisfaire du texte seul, et les éditions critiques, intégrales, sont alors fort coûteuses. Gallimard décide donc de publier des volumes de textes établis avec précision et enrichis d’annexes et de documents.

Passé les années 60, Gallimard republie donc une partie des œuvres déjà éditées, dans de nouvelles versions, proches, éditorialement parlant, de la série Rousseau. À côté des rééditions des classiques (nouveau Balzac, nouveau Flaubert, nouveau Stendhal, nouveau Mallarmé), la collection s’enrichit continuellement d’auteurs contemporains ou plus anciens. Les projets sont alors ambitieux : les œuvres romanesques sont complètes (même pour des auteurs moins incontestés comme Green, France, Aymé, Daudet ou Kipling), en 3, 4 ou 5 tomes, les éditions regorgent de variantes et de notes… jusqu’à aboutir (avec Sartre notamment) à des volumes obèses, de plus de 2000 pages, qui perdent certaines des qualités (poids, lisibilité) de la collection. Je crois que Gallimard s’est rendu compte, au cours des années 90, que la surenchère de commentaires, de gloses, de variantes, aboutissait à l’édition de volumes dénaturés, plus proches des gros traités de scolastique médiévale – et leurs interminables commentaires –  que de la présentation équilibrée de textes jugés fondamentaux. Comme la Renaissance, qui débarrassa les classiques de la gangue des glossateurs médiévaux, la Pléiade se réorienta vers des volumes plus sobres, plus légers, plus courts. Bien évidemment, les projets ayant des durées de vie extrêmement variables, il sort encore, de temps à autre, quelque volume à l’ancienne. Les volumes plus récents, peut-être moins riches, sont généralement plus courts. Cendrars a ainsi bénéficié, en 2013, de deux volumes assez fins ; il est même permis de se demander pour quelle raison l’éditeur a préféré séparer en deux livres ce qui eût pu sans difficulté s’agréger en un seul. À l’examen des publications des dernières années, je trouve que Gallimard a peut-être été trop loin dans ce sens, éditant des volumes incomplets et un peu décevants.

N’est-ce pas l’indice de certaines difficultés de la collection elle-même ? En effet, longtemps la « Bibliothèque de la Pléiade » a bénéficié d’un statut très particulier, qui tenait de son positionnement unique sur le marché français du livre : suffisamment luxueuse pour être offerte, collectionnée, révérée ; suffisamment accessible pour demeurer un produit de grande consommation, susceptible de s’écouler à plusieurs dizaines (voire centaines pour les volumes les mieux vendus) de milliers d’exemplaires. Ersatz de bibliophilie, le fait de collectionner les volumes de la Pléiade, de les afficher fièrement chez soi fut aussi, pendant un temps, un moyen d’affirmer un statut socioculturel. Objet d’un désir complexe, le volume Pléiade a été tout à la fois une porte d’accès utile et pratique vers de grands textes et un instrument de distinction sociale. Comme je l’ai dit plus haut, je crois néanmoins pressentir des difficultés pour cette collection qui tiennent à la conjonction de tendances :

–         de banales évolutions du lectorat : baisse du nombre des grands lecteurs, moindre rôle du livre dans la distinction sociale, dédain des classes les plus aisées (financièrement) envers la lecture des classiques, déclin généralisé des tirages plus luxueux, rejet du format un peu ancien de la collection, moindre révérence (ou moindre fétichisme, je ne sais) envers le « beau livre », coût des volumes disproportionné avec les moyens des étudiants et professeurs, crise économique, etc.

–          en conséquence de quoi, Gallimard publie des volumes plus courts, ne prétendant plus à l’exhaustivité (les « Œuvres complètes ne sont plus guère pratiquées – sauf d’immenses (et solitaires) exceptions comme Flaubert et Shakespeare – au profit d’ « Œuvres choisies », moins ambitieuses) ; l’idée étant de continuer à agréger les différents publics de la collection.

–          les choix éditoriaux récemment opérés (même quand ils furent de qualité) ciblent le « grand public » : Boris Vian et Stefan Zweig, dont les romans se vendent toujours en France à un rythme très impressionnant, Milan Kundera aussi, et, demain, Georges Perec et Mario Vargas Llosa. Où sont les auteurs plus ambitieux ? Comment se fait-il que la Pléiade ose hors de la littérature proprement dite (Buffon, Pline) ce qu’elle n’ose pas en matière littéraire ?

Mon impression est que Gallimard continue de bien vendre sa collection, mais que la maison est moins tentée que, disons, dans les années 80, de prendre des risques éditoriaux. À la fin des années 1980, furent évoqués des volumes de classiques japonais, de textes sacrés indiens ou mésopotamiens, de sciences humaines, de philosophie, etc. Je n’ai pas vu grand chose se réaliser de tout cela, excepté Khaldûn, Buffon, Lévi-Strauss et le domaine antique (Les épicuriens, Les stoïciens, Aristophane, Pline l’Ancien). Les œuvres d’Aristote ou de Virgile sont attendues depuis des décennies, et la Pléiade accueille, coup sur coup, Drieu La Rochelle et Jules Verne (qui, tout estimables qu’ils soient, n’avaient peut-être pas leur place dans cette collection-là).

Les publications à venir me semblent cibler, sous forme de regroupements incomplets d’œuvres choisies, un large public : Cendrars aujourd’hui, Georges Perec demain. L’éditeur a tiré les conclusions de l’échec de plusieurs volumes, classiques français aujourd’hui épuisés (Malherbe, Boileau, Constant, Chénier,…) et ne va probablement pas combler, dans un avenir proche, les vides les plus éclatants du catalogue français (Villon, Huysmans, le Journal des Goncourt, Bloy, Léautaud, Guilloux, Jouve, Gary, Beckett (histoire de droits d’auteur pour ce dernier), etc.). Un pré carré d’auteurs récents et « bons vendeurs » (Duras hier, Perec et Calvino demain, Modiano ou Le Clézio peut-être, à l’avenir ?) trônera à côté de classiques intouchables (Balzac & co), aux dépens d’auteurs plus anciens ou moins célèbres. Quant aux domaines étrangers, il est peu probable que leurs lacunes soient rapidement comblées. J’avais rapidement évoqué, voilà quatre ans, les grands manquants. Deux (Woolf et Fitzgerald) ont depuis été publiés. Où sont, néanmoins, les Pléiades de Strindberg, Heine, Broch, Musil, Mann, Orwell, Hardy, Fuentes, Malaparte, Mishima, Leopardi, Moravia, etc ?

En Italie, Mondadori a créé, dans les années 60, une collection de livres de référence, sur papier bible et reliés cuir, qui s’appelle I Meridiani. Un peu plus épais que les Pléiades, ils sont néanmoins d’un format très proche. La brève tentative d’Einaudi d’implanter la Pléiade en Italie, dans les années 90, a d’ailleurs échoué face à cette très belle collection, de 350 volumes désormais. Par curiosité, j’ai cherché à voir quels auteurs sont publiés dans cette belle édition par I Meridiani et ne le sont pas par Gallimard. Par précaution, j’ai exclu de l’énumération les auteurs italiens (majoritaires, en toute logique) qui, pour la plupart, n’ont pas forcément la légitimité suffisante pour intégrer La Pléiade (en dépit de leur excellence, je pense à Svevo, à Luzi, à Bassani, à Pavese, à Quasimodo, à Verga, à Ungaretti, à Morante, etc.)

Je m’excuse d’avance pour l’aspect « inventaire à la Prévert » de ce qui suit (sans mention entre parenthèses, il s’agit d’un volume unique d’œuvres choisies) :

Jorge Amado (2 volumes), Ivo Andric, Anthologie de la poésie latine, L’Arioste, Isaac Babel, Saul Bellow (2 volumes), Heinrich Böll (2 volumes), Yves Bonnefoy (en bilingue), Truman Capote, Raymond Carver, Paul Celan, Raymond Chandler (2 volumes), Gabriele d’Annunzio (11 volumes !), Emily Dickinson, John Fante, Theodor Fontane (2 volumes), E.M.Forster, Gabriel Garcia Marquez (2 volumes), la poésie de Goethe (3 volumes, inexplicablement absente du catalogue de la Pléiade), Graham Greene (2 volumes), Dashiell Hammett, Thomas Hardy, Nathaniel Hawthorne, Martin Heidegger (Être et temps), Hermann Hesse (3 volumes), Hugo von Hofmannsthal, Bohumil Hrabal, Ted Hughes, Ryszard Kapuscinski, Yasunari Kawabata, Jack Kerouac, Heinrich von Kleist, D.H.Lawrence (2 volumes), Giacomo Leopardi (3 volumes), Antonio Machado, Curzio Malaparte, Thomas Mann (7 volumes !), Alessandro Manzoni (3 volumes), Henry Miller, Yukio Mishima (2 volumes), Alice Munro (déjà !), Robert Musil (2 volumes), George Orwell, Pier Paolo Pasolini (6 volumes), Pétrarque (2 volumes), Sylvia Plath, Marco Polo, Ezra Pound (2 volumes), José Saramago (2 volumes), Arthur Schnitzler, Arthur Schopenhauer, Isaac Bashevis Singer, Alexandre Soljenitsyne (2 volumes), August Strindberg (2 volumes), Le Tasse, François Villon, Virgile, William Butler Yeats.

Je trouve ce catalogue très intéressant, et, mis à part le domaine francophone, beaucoup plus homogène que celui de la Pléiade. Je n’exclurais spontanément pas grand monde de cette liste (peut-être Chandler ou Hammett, tant il est vrai que je goûte peu le roman policier…). Il suffirait de piocher dedans (et dans les quelques grands français manquants cités plus haut) pour établir un programme de publications très intéressant pour les vingt prochaines années. Bien évidemment, tous ces auteurs peuvent se lire ailleurs qu’en Pléiade ; l’aspect ludique reste néanmoins d’imaginer de nouveaux volumes, que j’aimerais avoir en main un jour (dans un autre article, vieux de quatre ans, j’avais proposé un volume Chroniqueurs de la Conquête des Indes, les oeuvres de Thomas Mann et d’Alfred Döblin, etc.)

Si parmi tous ces noms, je devais n’en retenir que quelques uns (excepté Virgile et Aristote, déjà prévus), je choisirais le Théâtre Complet de Strindberg, U.S.A. de John dos Passos (bien oubliée aujourd’hui, hélas), les Œuvres Complètes  de George Orwell (romans et essais, sa survie posthume est déjà largement assurée), les Romans de Huysmans, les Œuvres Romanesques d’Hermann Broch et une Anthologie bilingue de la poésie américaine.

192 réflexions sur “Les évolutions récentes et futures de « La bibliothèque de la Pléiade »

  1. Lecture assez fine de l’évolution de la collection et confrontation intéressante avec son alter ego italienne. Il manque toutefois une précision, qui a, me semble-t-il, son importance. Ce n’est pas Gallimard qui a créé cette bibliothèque mais un éditeur indépendant, Jacques Schiffrin, en 1931. C’est Gide, qui, lors de son voyage au Congo, avait compris l’intérêt de livres au format de poche solidement reliés, qui a convaincu Gaston Gallimard de sauver et de relancer cette collection. L’adn de la Pléiade n’est pas celui d’une collection de luxe, ou d’une bibliothèque pour universitaires, mais celui d’un recueil d’oeuvres classiques, que l’on peut emporter avec soi en toutes circonstances Ce n’est pas indifférent, et vous avez raison de pointer la boursouflure de certaines éditions dans les années 90. Les choses se sont arrangées. L’édition de Jane Austen est, par exemple, un bonheur.

  2. Cher Phil Dos,
    vous avez raison de rappeler que J.Schiffrin créa la Pléiade hors du giron de Gallimard. Je crois l’avoir précisé dans un de mes articles antérieurs sur la collection, et je l’ai omis ici… Gaston Gallimard, en reprenant la Pléiade, en a expulsé son créateur, mais il a assuré la survie de la collection. Elle proposait, avant l’invention du Livre de Poche, les classiques sous un format pratique et, surtout, inusable. Elle est néanmoins, depuis, devenue un objet de collection, à offrir à un proche lors des fêtes de fin d’année (une partie non négligeable des mes cent et quelques Pléiades m’a été offerte)
    Je suis frappé par la solidité et la tenue des volumes, qui, sauf pour les rares qui ont été imprimés pendant la guerre sur du mauvais papier et reliés avec du mauvais cuir, se tiennent encore admirablement des décennies après leur édition. J’ai même noté qu’ils devenaient plus souples, plus agréables à feuilleter, quelques années après leur impression.
    La collection semble avoir trouvé récemment une forme intéressante d’équilibre entre le texte et sa glose (j’ai personnellement trouvé les volumes consacrés à Cendrars un peu minces pour leur prix). Je n’ai pas encore eu l’occasion de feuilleter le nouveau volume consacré aux romans de Jane Austen…

    Je voudrais aussi préciser que la collection d’Einaudi, « Biblioteca della Pleiade », que je ne fais qu’évoquer dans ma chronique proposait (dernier volume paru en 2006 je crois) une copie presque parfaite, puisque coéditée avec Gallimard, de la Pléiade française. Deux différences néanmoins : le prix, bien supérieur (les volumes peuvent atteindre 100€ ; les Meridiani sont proposés au prix moyen de 50/60€, ça ne doit pas être extérieur à la victoire commerciale des seconds sur les premiers, surtout en Italie, où le marché du livre est plus ténu qu’en France), le catalogue (Beckett y est, la poésie de Brecht aussi, ainsi que des auteurs comme Ménandre, Tertullien, Shelley, Svevo, Quintilien, Pavese, Ovide, Manzoni, Herzen, Foscolo, Hésiode, Dürrenmatt, Fenoglio, Erasme, Cortazar et de Sanctis).
    Je ne serais pas contre un volume Pléiade consacré à Shelley, à Ovide (grand oublié de la collection avec Virgile ce me semble) ou à Cortazar…

  3. La ressemblance entre la collection d’Enaudi et la Pléiade était, de fait, troublante. J’en ai eu un exemplaire entre les mains il y a quelques années. Assez d’accord avec vous sur le fait que les volumes se bonifient en vieillissant, pour peu que l’on se défasse du rhodoïd pour les lire. Le cuir s’assouplit progressivement en se nourrissant de la graisse des mains et se patine avec le temps. En revanche je ne partage pas votre avis sur le fait que certains auteurs plus populaires soient choisis (Vian, Simenon, Verne…). C’est une manière habile d’élargir le public et de pérenniser la collection. N’oublions pas que l’édition est un commerce et non un service public. Pour ma part, je regrette l’absence de quelques grandes figures comme Darwin, et je partage vos regrets sur Orwell, dont l’oeuvre est finalement mal connue en France.

  4. Si vous observez la photographie qui « orne » cet article, vous verrez mon exemplaire de la Poesia d’Amore Latina en Pleiade. Exactement comme un Pléiade sinon que la couleur diffère. Cette médiocre photo – le matériel et le photographe hélas… – ne rend pas du tout la nuance de gris du volume, inédite en France.
    Darwin ressort intégralement, sous l’égide de Patrick Tort, chez Honoré Champion, mais vous avez raison, il aurait autant sa place à la Pléiade que Buffon (il s’agirait de choisir, car il a beaucoup écrit)!
    Je ne conteste pas complètement les choix de Vian ou de Verne (j’ai les Pléiade Jules Verne…), j’en comprends la logique, mais ils retardent (ou empêchent) surtout la publication en Pléiade d’auteurs qui me tiennent plus à coeur.

  5. OUi quel dommage de na pas avoir Gary en pleiade!
    sinon, moi j’ai du mal à lire en VF des auteurs étrangers, il n’y a rien à faire, alors les mettre en pleiade, je suis dubitative…c’est comme regarder un film en VF, il manque l’essentiel, la voix de l’auteur quand même.

    • Je ne suis pas d’accord. La « VO », c’est très bien pour le cinéma, où le texte est incarné par son interprète d’origine, c’est très bien pour les études de lettres, les thèses, les études de textes etc. Mais pour une lecture commune, honnêtement, je trouve qu’il y a un purisme un peu snob là-dedans (surtout pour lire de la littérature courante). Je me vois mal apprendre le russe et le japonais à des niveaux suffisamment approfondis pour pouvoir lire Tolstoï ou Soseki dans le texte. Je ne sais pas vous, mais moi, je n’ai pas le temps d’apprendre vingt langues. Tant pis, c’est un succédané, on sait qu’on ne lit qu’une adaptation dans notre langue, mais quel dommage de se priver de La Guerre et la Paix, de Crime et Châtiment, du Quichotte, de la Divine Comédie, des auteurs asiatiques et orientaux, ou des oeuvres d’un Strindberg ou d’un Ibsen parce qu’il faudrait absolument les lire dans le texte… Et puis bon, lire dans le texte c’est très bien, mais le faire au niveau de finesse et de subtilité où nous lisons le français, ça demande plus que les quelques rudiments qui permettent de se débrouiller en terre étrangère. L’investissement me paraît possible, à part pour les individus exceptionnellement doués, dans une langue, peut-être deux, mais pas cinq, dix ou quinze.
      (et puis passer dix ans à apprendre une langue uniquement pour lire son auteur phare dans le texte… je ne suis pas d’accord.)

      Pour la Pléiade, Gary devrait sortir un jour, comme Beauvoir, Nimier, Villon (en fin d’année), Perec ou Foucault.

  6. En cherchant des informations sur les volumes à paraître des Comédies de Shakespeare, je suis tombé sur un entretien avec Jean-Michel Déprats, responsable de cette édition, et présenté comme maître-d’oeuvre d’une édition Pléiade du théâtre de Tennesse Williams. Elle tiendra en un volume j’imagine, malgré sa popularité en France — pour un auteur dramatique, même phagocité par Hollywood —, si l’édition “ultime“ de Tennessee Williams aux Etats-Unis, celle de la Library of America, tient en 2 volumes, et est sans doute beaucoup plus complète que ne le sera celle en préparation en France. C’est une bonne choses que la présence de Williams. Quid d’Arthur Miller ?

    Avec la bonne place accordée à Melville, Faulkner, James, le domaine nord-américain s’étoffe doucement, en attendant Hawthorne et la peu enthousiasmante, de mon point de vue, édition Roth — je préférerai de loin McCarthy, pour parler de vivants déjà honorés de belles éditions outre-Atlantique (Everyman’s Library et programmé dans la Library of America pour Mccarthy, LoA pour Roth) —, l’anthologie bilingue, et, possiblement, dans un futur lointain, une édition de Poe qui viendrait «compléter, et non pas remplacer» l’édition actuelle, historique.
    Et un jour, Mark Twain ?

    Comme tous, j’ai d’autres velléités de sélection : Ovide, Thomas Mann, Chaucer, Charles d’Orléans, Gadenne, Lagerlöf, Laxness, la trilogie de Philip Pullman (honorée chez Everyman’s Library), théâtre et poésies de Marlowe — mais j’en resterai aux E-U.

    • Merci pour ces informations. Je ne savais pas que Tennessee Williams était au programme de la Pléiade. Je connais trop mal son théâtre (je le connais comme tout le monde, de loin) pour juger de sa « pléiaditude ». Robert Laffont l’a publié récemment en Bouquins, en un tome (je crois) ; je l’aurais bien vu en Quarto (cela dit, comme Quarto double de plus en plus le programme éditorial de la Pléiade, dans des déclinaisons à mon sens dispensables des volumes reliés cuir, rien n’interdit d’imaginer Williams en Quarto aussi).
      Le domaine américain va continuer à s’étendre à la Pléiade, ne serait-ce que pour des motifs commerciaux. Le domaine américain a du succès en France et continuera d’en avoir. Je partage votre intérêt pour l’Anthologie bilingue de la poésie américaine et pour les œuvres de Nathaniel Hawthorne (pour Roth, je veux bien, mais pourquoi pas Bellow ?). J’aimerais y voir quelques auteurs qui n’ont aucune chance d’y être, comme T.S.Eliot (en bilingue, évidemment), W.H.Auden (mais ça tous ceux qui me connaissent le savent, surtout qu’Auden est très insuffisamment traduit et connu en France), John Dos Passos (à qui Sartre n’a pas vraiment rendu service en France avec son fameux (et exagéré) « Je tiens Dos Passos pour le plus grand romancier de notre temps », je garde un souvenir admiratif d’U.S.A.) ou d’autres, comme Mark Twain, qui a laissé suffisamment de matière pour quelques volumes (mais Twain est bizarrement perçu en France). Henry James mériterait des volumes consacrés à ses romans, d’ailleurs.
      Vous évoquez entre autres Ovide, dont l’absence est certes incompréhensible, mais il faut tout de même se réjouir de la parution de Virgile (en 2015), ainsi que de celle (si attendue et dans un autre genre) d’Aristote, en novembre prochain (n°600 de la collection).
      Quant au théâtre de Marlowe, on doit le trouver dans les deux volumes du théâtre élisabéthain.
      Et pour Thomas Mann, on m’a confié au salon du livre que le projet était en cours, mais je crains, à l’exemple d’autres publications récentes, que la voilure de l’ensemble ne soit pas de l’envergure espérée. (et j’en profite pour répéter que le domaine allemand est assez lacunaire à la Pléiade).
      Enfin, vous évoquez Gadenne… j’ai l’impression de le voir réapparaître dans les librairies ces derniers mois, c’est peut-être bon signe ? (mais je n’y crois guère)

    • Bonjour, je vous informe que les œuvres de Mark Twain en 2 volumes sont en préparation avec de nouvelles traductions (suivant l’exemple de Fitzgerald).

  7. En ce qui concerne Williams, il revient en force en France et est de nouveau à la mode : mises en scène, nouvelles traductions, dossier dans le « Magazine Littéraire » (ce qui est parfois le signe d’une stratégie éditoriale qui vise à préparer les esprits à une édition complète ou d’oeuvres choisies, accompagner la parution d’une édition ou légitimer un auteur afin d’éviter l’incompréhension lors d’une édition de ses oeuvres). Je n’ai lu que deux pièces, chez 10/18, et n’ai jamais vu de mises en scène au théâtre, mais je pense que c’est un choix très intéressant – et l’occasion pour moi de lire d’autres pièces. « Soudain l’été dernier » vaut la lecture !
    Pour l’option Quarto, elle serait bien légitime, les possibilités iconographiques permettant de proposer des images de films ou de mises en scènes propres à ouvrir les possibilités de lecture. En ce cas,je ne saurais quelle édition choisir. Pour cette raison, le Quarto d’Aurevilly me tente assez.

    T.S. Eliott a été scandaleusement sous exploité dans l’édition bilingue. D’Auden, je ne connais que son poème dramatique « La Mer et le Miroir », lecture de  » La Tempête » de Shakespeare (belle édition au Bruit du temps), et cela fait quelques temps que je voudrais m’y pencher sérieusement (mon intérêt grandi chaque fois qu’en librairie je feuillette et pioche un poème dans les éditions Gallimard/poésie !).

    Mark Twain (courageux travail des éditions Tristram qui lui ont permis enfin d’élargir son lectorat et de prendre conscience de sa modernité et de son importance – 7 volumes dans la Library of America, avatar papier bible, grand format (!) de la Pléiade), et Saul Bellow (3 volumes LoA, et qui est très respecté en France – un titre à me conseiller ?), finiront par entrer en Pléiade.

    J’ai très hâte de consulter le volume Virgile, dont je n’ai jamais lu l’Énéide, et qui tomberait à point pour compléter quelques lectures de cette année (Iliade, Odyssée, Métamorphoses d’Ovide, les tragiques grecs).
    L’édition du théâtre élisabéthain est un acte courageux (les ventes moyennes j’imagine), et si je compte me procurer les volumes sous coffret prochainement, je verrai bien l’intégralité du théâtre de Marlowe et sa poésie, en bilingue, dans un élégant et mince Pléiade. Mais c’est un fantasme.

    Pour finir, concernant Gadenne, il est magique que « Baleine » soit toujours édité, bon an, mal an. Le Seuil/Point font un travail louable pour rendre disponibles ces écrivains importants, relégués au second plan, dans l’ombre, maisvtoujours présents par cette absence : Gadenne ou Huguenin, Sabato. On verra ce que donneront ces présences, en librairies, sur les esprits.

  8. Je voudrais ajouter une chose (ensuite, promis, je redeviens simple lecteur de votre excellent blog !).
    En cherchant des information sur l’édition en deux volumes des romans de l’immense Bernanos, édition qui semblait bien lancée d’après ce qu’on peut lire sur différents blogs, j’ai atteint cette page internet, ( http//:gsite.univ-provence.fr/gsite/document.PHP?pagendx=9253&projection=orlac) sur laquelle on peut lire :

     » [Notice sur les premiers essais romanesque et les trois grandes nouvelles – Madame d’Argent, Une Nuit, Dialogue d’ombres – destinée à la réédition <> des oeuvres romanesques sous la direction de Max Milner (projet différé par l’éditeur)]  »

    Dernière mise à jour en 2009.

    M. Milner est malheureusement décédé en 2008, d’où la suspension du projet. Je ne sais pas si la chose à été remise en route (quand on lit sur le site de la Pléiade que la suite des Orateurs de la République est bloquée pour une raison semblable depuis 1989…)

    • Merci pour vos interventions, ne vous privez pas, j’ai l’impression que par ses quelques petits articles sur la Pléiade mon blog devient une petite source d’échange et d’information pour les amateurs de cette collection !
      Pour Bernanos, j’ai cru voir ici ou là des éléments indiquant que le projet était gelé, mais je ne suis pas sûr de pouvoir les retrouver. Je ne sais pas si le projet aurait un véritable potentiel commercial ; il ne me semble pas que les éditions de Bernanos au Castor Astral (pour monnayer une dernière fois l’œuvre avant qu’elle ne tombe dans le domaine public) aient eu beaucoup de succès… Pas de pessimisme exagéré néanmoins, le projet aurait sa légitimité.

      Vous évoquez les Orateurs, il faut aussi reconnaître que le volume I ne s’est pas très bien vendu (ce n’est pas celui qui attire le plus spontanément l’amateur, plus intéressé peut-être par les années postérieures, par les discours de Saint-Just, de Robespierre ou de Danton), tout comme s’est mal vendu le premier volume des œuvres de Luther. Personne ne l’évoque jamais, mais le deuxième tome est attendu depuis des années et je ne crois pas qu’il sorte un jour. Autres projets en panne : la poésie de Hugo (auteur assez bizarrement édité dans la Pléiade, la poésie est bloquée en plein gué depuis trente ans je crois), les Œuvres de Vigny (le tome 3 est attendu depuis 1993, celui de la correspondance et des journaux), les œuvres de Green (problèmes avec l’ayant-droit et postérité problématique de l’écrivain), celles de Marx (désintérêt envers le Marxisme et mort du maître d’œuvre),…. J’ai un catalogue de 1989 qui indique les « projets en cours ». Beaucoup n’ont pas vu le jour. Je ne suis pas chez moi, donc je ne peux vous énumérer ces projets avortés (de mon souvenir pas mal d’auteurs asiatiques, mais également Brecht). Si ça vous intéresse, je peux le faire la semaine prochaine.
      Très rapidement, sur les auteurs que vous évoquiez dans votre précédent message :
      – de l’aveu d’Hugues Pradier, les volumes de théâtre et de poésie se vendent toujours moins bien que les volumes de roman et je crois que le théâtre élisabéthain s’est (hélas) bien mal vendu. Amazon le soldait à 70€ les deux volumes à l’été 2013, c’est comme ça que je les ai acquis, en profitant (honteusement) de leur insuccès commercial.
      – je n’apprécie guère l’œuvre de Bellow, mais vous pouvez essayer de lire Ravelstein (un portrait touchant d’Allan Bloom) ou Herzog (un intellectuel juif vieillissant envoie des lettres assassines au monde entier).
      – connaissez-vous le théâtre d’Eugene O’Neill ? Avant Williams et Miller, ce fut le grand dramaturge américain.
      – Auden passe assez mal en traduction, je trouve (ça tombe un peu à plat) ; certains de ses textes sont très difficiles à transposer en français (je pense par exemple à son poème (jamais traduit, je crois) sur la tombe d’Henry James, une pure merveille aux accents jamesiens et à l’ironie critique audenienne). Ses longs poèmes n’ont jamais été traduits, et encore moins ses essais (sauf un ou deux textes). Ce serait justement tout l’intérêt de la Pléiade pour un tel auteur, mais je rêve à voix haute, ça ne tiendra pas commercialement (Gallimard lui préfèrera d’Ormesson…). Les poètes anglais ont de toute façon leur Pléiade, en bilingue, il n’y aura pas plus.
      – Eliot aurait quelques chances supplémentaires, car l’œuvre n’est pas si longue, elle est mieux connue en France, plus respectée et le volume pourrait même être bilingue (ce qui me semble le minimum pour de la poésie traduite) – et contenir le théâtre. L’appareil critique serait très utile, je pense.
      – Sabato n’y est pas encore, mais Carpentier devrait y être depuis un moment (et n’arrive pas, s’il arrive un jour) et Vargas Llosa (en attendant Cortazar et Fuentes ?) y sera.
      – rien à voir mais Michel Foucault devrait entrer dans la Pléiade bientôt aussi.

      Enfin, j’ai vu que la Pléiade allait publier en septembre, en tirage limité, dans un boîtier sombre et sans numéro de collection un étrange volume « best of » de Sade (qui, le concernant, pourrait s’appeler un « worst of »), avec plusieurs romans tirés des trois volumes existants. Je ne sais pas quoi penser de cette initiative : les gens de chez Gallimard chercheraient à rentrer dans leurs frais généraux avec un petit volume illustré et sulfureux qu’ils ne s’y prendraient pas autrement.

  9. Je pense que votre passion pour la littérature et cet article très fin (et les autres) sur les évolutions de la Pléiade sont pour beaucoup dans le fait que nous, lecteurs, partagions les informations que l’on récolte ici où là. Et puis il y a un aspect ludique à tout ça ! Et moins de frustration que de joie, malgré tout.

    J’aimerais beaucoup pouvoir consulter la liste de 1989 des « projets en cours » que vous évoquez. Certainement que beaucoup ont été gelés, mais cela dépend de l’ampleur d’un projet ou des aléas (traduction, établissement du texte, de l’édition, choix des textes en cas d’anthologie, contenu scientifique fluctuant selon l’état des recherches, décès d’un membre de l’équipe), et, selon, 25 ans de labeur peuvent aussi ne pas sembler trop long.

    Pour Hugo, je pense que le relatif désintérêt d’une certaine classe sociale richement dotée d’un point de vue culturel pour les classiques « enseignés à l’école » y est peut-être pour beaucoup – un Pléiade Hugo peut ainsi sembler moins « sexy » qu’un volume Kundera, Verne, Fitzerald ou Cendrars (pour en rester aux parutions des dernières années, et sans remettre en cause ces parutions), ou moins exotique, intriguant, plaisant ou transfiguré par le respect pour l’auteur que peuvent avoir les volumes De Quincey, Balzac, Flaubert, Pline ou encore Zweig (là encore, aucune remise en cause – je me ferais bien offrir le De Quincey !). L’absence de Hugo dans les influences revendiquées par les écrivains contemporains, qui entraîne une absence de résonance dans les médias, peut aussi expliquer ce désintérêt (ainsi que celui, malheureux, pour d’Aubigné, entre autres).
    Enfin, ce sont là des considérations sociologiques, à l’aveugle, car je suis loin de connaître quoi que ce soit à cet aspect des métiers du livre !

    Je ne connais O’Neill que de nom ; j’ai vu passer son nom dans le dossier consacré à Williams, et dans le catalogue de la Library of America (3 volumes, plus que Williams et Miller, et en attendant Edward Albee – le dernier as du carré « dramaturges américains » ?).

    Concernant Foucault, il entrerait dans le cercle étroit des « Œuvres Complètes » (ces « solitaires exceptions » que vous évoquez). A ma grande honte, je ne le connais que peu (c’est-à-dire pas du tout), car je fais partie d’une génération née après sa mort, et n’ai pas grandi avec sa présence (même si, à l’Université…). L’occasion, peut-être, de m’y mettre avec attention.

    J’ai aussi lu quelque part sur le net qu’une réédition de Descartes, en deux volumes, ne saurait tarder : le manuscrit aurait été remis. Peut-être pour 2015 ou 2016 ?

    Enfin, autre information : concernant Maître Eckhart, un projet était bien en cours (Œuvres Complètes ici encore), sous la direction d’Alain de Liberia (déjà responsable de l’édition GF Flammarion) – mais, sur la page internet qui donnait cette information, les données bibliographiques les plus récentes dataient de 1999.

    Pour finir, le dossier « Sade » : je ne suis pas contre cette initiative, et aurais bien pu mordre, si je n’avais pas trouvé, d’occasion, récemment, certains des textes au Club Français du Livre, avec une préface de Pauvert. Vous avez raison de pointer une raison économique, mais j’imaginerais bien une édition « parallèle » à celle de Pléiade, entre cet exemple et celui de l’Index de la Correspondance de Flaubert en Pléiade (496 pages pour 15 euros) : des volumes minces et proches des livres japonais (livres minces, avec signet, papier très fin, format poche, très élégants et solides).

    Je vous prie de m’excuser pour ce commentaire très long, trop long – la littérature et les questions éditoriales sont trop riches : on tire un fil, et on se prend à voir défiler des tapisseries entières !

    • J’ai retrouvé le catalogue de 1989, qui accompagnait l’album « Les écrivains de la Révolution ». La forme de mon message sera peut-être un peu rébarbative, mais je pense l’exhaustivité intéressante dans notre cas (je vous passe les (nombreux) projets aboutis) :
      – Akutagawa, Œuvres, 1 volume (le projet a été abandonné, vous en trouverez des « chutes » ici ou là)
      – Anthologie des poètes du XVIIe siècle, 1 volume (je suppose que le projet a été fondu dans la réfection de l’Anthologie générale de la poésie française)
      – Aristote, Œuvres Complètes, 3 volumes (le premier sort en novembre, les deux autres devraient suivre, espérons-le, dans les 15 ou 20 années à venir…)
      – Balzac, Œuvres Diverses, 3 volumes (III en cours, les volumes I et II sont sortis)
      – Brecht, Théâtre complet et poésies, 3 volumes (je ne sais pas quel imbroglio a renversé ce projet en un volume unique d’Écrits sur le théâtre (pas inintéressant au demeurant), au détriment de son théâtre (paru en plus de dix tomes à L’Arche) et de sa poésie ; il était pourtant légitime que le Brecht dramaturge et poète trouvât sa place dans la Pléiade)
      – Cabinet des Fées, 2 volumes (mes recherches internet, qui datent un peu, m’avaient laissé supposer un abandon complet du projet)
      – Chénier, 1 volume, nouvelle édition (abandonné, l’ancienne édition est difficile à trouver à des tarifs acceptables – j’ai trouvé la mienne aux États-Unis)
      – Écrits de la Mésopotamie Ancienne, 2 volumes (est-ce, comme Pline ou Aristote, un projet à très longue gestation ou un projet abandonné ?)
      – Faulkner, Œuvres Romanesques, 6 volumes (les 4 premiers volumes sont sortis, mais rien n’indique que les tomes V et VI verront le jour à l’avenir ; la sortie des Snopes en Quarto me laisse supposer que l’édition Pléiade n’ira pas au-delà du tome IV)
      – Gorki, Œuvres, 3 volumes (le projet a été réduit (baisse d’intérêt pour la littérature russe et le communisme ?) à un volume unique, sorti voici quelques années (de mémoire 2005 ?)
      – Hugo, Œuvres poétiques IV et V (toujours en panne, depuis les années 70 – j’ai vérifié – officiellement pour désaccords entre les maîtres d’œuvre des volumes (et, depuis, probable disparition))
      – Kierkegaard, Œuvres littéraires et philosophiques complètes, 3 volumes (un serpent de mer, devrait sortir un jour. Quand ?)
      – Laforgue, Œuvres poétiques complètes, 1 volume (abandonné, désaccord avec le directeur de l’ouvrage, le projet a été repris, en 2 coûteux volumes, par L’Âge d’Homme)
      – Leibniz, Œuvres, 3 volumes (le projet est-il encore en cours ?)
      – Montherlant, Essais, Volume II (le volume actuel et unique a été réimprimé l’an dernier)
      – Moralistes français du XVIIIe siècle, 2 volumes (je ne sais si ce projet est encore en cours, il était pourtant prometteur)
      – Musset, nouvelle édition, 3 volumes (le Théâtre complet a paru en 1990, la Prose et la Poésie attendent encore)
      – Nabokov, Œuvres romanesques complètes, volume III (les volumes I et II sont sortis dans les dix dernières années, le 3e devrait suivre bientôt)
      – Nietzsche, Œuvres philosophiques complètes, 5 volumes (le volume I est sorti en 2000, à ce rythme-là, de plus de quinze ans par volume, j’aurai quatre-vingt ans à la sortie du cinquième tome !)
      – Orateurs de la Révolution Française, volume II (mis en pause à la mort de François Furet… en 1997 !)
      – Péguy, Œuvres poétiques et dramatiques complètes (nouvelle édition) => sort dans un mois
      – Potocki, Manuscrit trouvé à Saragosse, 1 volume (je suppose que la redécouvert fortuite d’une autre version du texte, au milieu des années 2000, a entraîné une large réévaluation du projet, qui aura à cette occasion pris encore bien du retard)
      – Chunglin Hsü, Roman de l’investiture des Dieux, 2 volumes (les autres romans fleuves chinois ont paru, ne reste guère que celui-là…)
      – Saïkaku, Œuvres, 2 volumes (possiblement en cours, possiblement stoppé)
      – Sôseki, Œuvres, 2 volumes (en principe confirmé, le premier tome serait achevé et rendu à l’éditeur)
      – Stevenson, Œuvres, 3 volumes (les deux premiers sont dans le commerce, le troisième est en préparation)
      – Supervielle, Œuvres, 2 volumes (la poésie est sortie en 1996, je ne sais si le deuxième tome est encore en préparation ou s’il est annulé)
      – Tagore, Œuvres, 2 volumes (le projet a été abandonné)
      – Théâtre Kabuki, 1 volume (peut-être en cours)
      – Traités sanskrits du politique et de l’érotique (Arthasoutra et Kamasoutra), 1 volume (idem)
      – Vigny, Œuvres complètes, Tome III (en attente depuis vingt ans)
      – Xénophon, Œuvres, 1 volume (pas d’informations)

      Une autre liste, plus récente, a circulé au printemps (vous noterez les similitudes et les nouveautés) – j’ai mis une étoile aux projets dont la réalisation m’a été assurée lors de salons du livre ou, publiquement, par M. Pradier, le directeur de la collection :
      – Aristote*
      – Textes philosophiques indiens fondamentaux
      – Virgile*
      – Xénophon
      – Écrits Juifs (textes des Kabbalistes de Castille)
      – Chaucer
      – Textes théâtraux du moyen âge
      – Mystiques médiévaux
      – Maître Eckhart
      – Saikaku
      – Joanot Martorell
      – Nathaniel Hawthorne
      – Kierkegaard*
      – Soseki*
      – Jean Potocki
      – Anthologie de la poésie américaine*
      – Anthologie de la poésie chinoise*
      – Carpentier
      – Barrès
      – Simone de Beauvoir*
      – Aimé Césaire, Léon Gontran Damas et Léopold Sedar Senghor*
      – Vargas Llosa*
      – Philip Roth*
      – Michel Foucault*
      – Perec*
      – Artaud
      – Thomas Mann
      – Roger Nimier*

      • J’ai lu avec beaucoup d’intérêt vos articles (très intéressants) et ici votre conversation et je me permets d’intervenir sur quelques points.

        Si je méconnais cruellement la littérature américaine, je trouve aussi dommage que la littérature japonaise soit si mal servie en Pléiade (un unique représentant, Tanizaki) où Mishima et Kawabata manquent tout comme Sôseki – mentionné plus haut et dont la non poursuite du projet est vraiment dommage – ou « Le Dit du Genji » au moins. Après j’avais lu que Gallimard avait racheté une partie du stock des Presses Orientalistes de France qui proposaient le Genji et d’autres auteurs (Chikamatsu, Inoué….) mais qu’une grande partie du fonds est parti aussi chez Verdier (notamment les épopées comme Les Héiké et autres.

        Concernant Chaucer, une éditions des « Contes de Canterbury » est sortie il y a environ cinq ans en folio, dans les premières pages l’éditeur scientifique indiquait que ce texte était destiné à figurer en Pléiade, espoir. Mais en fait, je n’y crois plus trop car les œuvres de Chaucer sont sorties il y a peu chez Bouquins avec le même éditeur scientifique, donc pour ce projet, je crois qu’un désaccord l’a fait définitivement capoté.

    • Bonjour, un complément à votre commentaire: l’édition des œuvres d’Agrippa d’Aubigné – si c’est bien lui que vous évoquez – existe et est, selon le site de la Pléiade, toujours disponible.

      • Hélas l’édition d’Agrippa d’Aubigné est bien « épuisée » selon le catalogue de la pléiade (cela veut dire qu’ils n’ont pas l’intention de faire un retirage). Les bouquinistes spéculateurs le savent bien, il n’y a qu’à voir les prix honteux auxquels ils proposent les volumes épuisés sur Amazon ou Abebook, même s’ils ne sont pas rares.

      • Nicolas Verget le 11 avril 2016 : je ne sais si le commentateur a rafraîchi ses informations depuis, d’Aubigné a été désigné comme provisoirement indisponible en 2007 puis classé comme épuisé dans le catalogue général de l’année suivante. ce qui semble rédhibitoire pour une édition de la collection.
        remarque général sur l’ensemble du blog (en français dans le texte). l’objet des très riches et révélatrices contributions des uns et des autres montre que l’accès à d’ambitieux projets éditoriaux est un sujet de discutions passionnées, et que plus jamais dans un monde où la culture est menacée, une collection telle que la pléiade a toutes ses raisons d’être. mais les discutions d’amateurs ne doivent pas l’enfermer dans un cercle de la pléiade où celle-ci serait en quelque sorte l’otage sublimée de happy few.
        lire une œuvre, au sens large du terme, dans une traduction est un honneur pour l’original et un compliment pour la langue qui l’accueille dans sa communauté. ce rêve de tant d’auteurs de passer les frontières tout autant que les douanes ne devrait rencontrer que des louanges de notre part. car, aujourd’hui le niveau de culture général permet d’apprécier des horizons très lointains et de les ressentir avec un sentiment de proximité où peut se lire une complicité amoureuse. ne nous comportons plus comme des colonisateurs, laissons nous coloniser par la beauté de l’imagination d’auteurs de quelque horizon d’où ils viennent. et puis les traductions enrichissent toujours une langue, et puis il s’en fait de merveilleuses, auxquelles les auteurs contribuent eux mêmes.
        je découvre cet espace d’échange : formidable!

  10.  » – Chunglin Hsü, Roman de l’investiture des Dieux, 2 volumes (les autres romans fleuves chinois ont paru, ne reste guère que celui-là…)  »

    ===> Pas tout à fait ! Le roman des Trois Royaumes, qui au contraire de l’Investiture fait partie des « Romans Extraordinaires », n’a pas été fait. J’ai reçu confirmation de leur part qu’ils ne comptaient pas le faire… C’est dommage, étant donné que, d’une part, les traductions qui nous sont parvenues des Trois Royaumes sont très discutables, et que d’autre part c’est probablement celui pour lequel l’appareil critique serait le plus indispensable pour en apprécier la valeur historique.
    J’aurais beaucoup aimé l’investiture des dieux également, pour laquelle nous n’avons même pas de traduction (la seule version existante étant en fait une adaptation très libre et réduite à l’extrême).

    C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je m’interroge pour « Anthologie de la poésie chinoise », que vous indiquez comme en cours. Un tel volume (certes forcément moins important) existe dans la collection Poésie/Gallimard (bien qu’il ne recense que la poésie classique), pourquoi publier cela et abandonner complètement les deux romans fleuves ? C’est un volume qui m’intéresse beaucoup, mais les choix éditoriaux de la collection me laissent de plus en plus perplexe, surtout en sachant que la poésie se vend mal.

    Finalement c’est une très intéressante liste que votre catalogue de 1989… J’aurais particulièrement apprécié les textes de la Mésopotamie ! J’espère que ce volume sortira un jour, mais il est presque certain qu’il est définitivement enterré.

    Ces trois pléiades rapporteraient certainement moins que d’Ormesson, mais d’autres collections pourraient très bien recevoir ces textes, ce qui est d’autant plus dommage.

    Je suis votre blog depuis quelques temps maintenant, je profite de ce message pour vous remercier de sa qualité ! 🙂
    (mon compte en banque lui, ne vous remercie pas, cela va de soi.)

    • Merci Puck pour vos compliments, je préfère recevoir vos remerciements que ceux de votre compte en banque !
      J’avais effectivement oublié les « Trois Royaumes » dont je crois qu’ils ont été atrocement traduits par une maison sans envergure (j’avais cherché ces livres voici quelques années). Je ne sais pas trop s’il y a beaucoup d’espoir à garder pour les projets les plus ambitieux (et les textes Mésopotamiens en relèvent). Nous verrons.
      Dans l’absolu, ces romans seraient à traduire même à l’extérieur de la Bibliothèque de la Pléiade puisque nous, Français, ne pouvons les lire dans de bonnes conditions aujourd’hui.
      Comme vous je constate que les choix éditoriaux de la collection sont de plus en plus discutables, pour des raisons éminemment financières (j’imagine). Bien sûr, il y a Pline, Khaldûn, le Théâtre élisabéthain, Quincey, l’édition bilingue de Shakespeare, le deuxième volume Claude Simon, etc. Mais en contrepartie, que de choix contestables… Cendrars tronçonné en deux fins et coûteux volumes, Brecht privé du théâtre et de la poésie (un comble !), Goethe jamais complété de sa poésie, la suite de Nietzsche qui n’arrive pas (pas plus que celles de Vigny ou de Hugo), Laclos, Lautréamont et Rimbaud republiés dans des troisièmes versions d’une utilité relative, Verne, Vian et Zweig intégrés plutôt que Huysmans, Musil (je pense à vous) ou T.Mann, Sade « bestofisé » dans peu de temps par un volume au packaging noir d’assez mauvais goût, Quarto transformé en annexe low cost de la Pléiade (et c’est dommage, car Quarto, moins prestigieux, avait un intéressant programme éditorial jusqu’à peu), etc.
      En matérialiste froid, je dirais qu’ils essaient de maintenir leur rentabilité financière dans un contexte général moins favorable qu’avant à la vente de ces volumes de semi-luxe.

      • A la suite de « Pline, Khaldûn, le Théâtre élisabéthain, Quincey, l’édition bilingue de Shakespeare, le deuxième volume Claude Simon », ainsi que du volume Thérèse d’Avila / Jean de la Croix, ne pas oublier aussi, en 2006, le volume « Théâtre de l’Inde Ancienne », de taille appréciable (presque 1700 pages), illustré et, pour le peu que j’ai lu, au français très poétique.
        Son prix prohibitif (80,50 euros) a sans doute vocation, comme celui des Leiris, à rentabiliser les faibles ventes. Était-ce un projet lancé dans les années 80 ? Je suis incliné à le croire.
        Une autre étoile de cette constellation à temps long !

  11. Vous ne parlez jamais de la publication annoncée des œuvres de D’Ormesson (idem pour Gary). S’agirait-il d’un canular ou considérez-vous cette récompense à ce point imméritée qu’elle finira par tomber un jour ?

    • Pour Gary, le projet est en discussion me semble-t-il. Je l’ai évoqué, en passant, dans un de mes commentaires. Cet auteur est au catalogue de Gallimard, il est toujours raisonnablement populaire et connu, il est étudié dans le système scolaire (j’en sais quelque chose), je ne vois pas de raisons objectives à ce qu’il ne soit pas publié en Pléiade (même si j’aurais, à titre personnel, d’autres priorités).
      Pour M. d’Ormesson, l’heureux lauréat ne se serait pas étendu comme il l’a fait dans les médias sans la garantie de publication de Gallimard. Il doit exister un contrat ; l’édition peut ne pas voir le jour (il suffit de voir le nombre de projets avortés par le passé) mais elle peut aussi aller à son terme. M d’Ormesson est un gros vendeur, son public est (je crois) assez âgé (et donc assez aisé et sûrement encore attaché à la prestigieuse collection), il n’y a pas de raison économique qu’un tel projet ne se fasse pas, étant donné qu’il a toutes les chances d’être rentable.
      Ce choix me paraît être la conséquence
      1/ du fléchissement économique de la collection, qui a besoin de locomotives, soit qu’elles soient reconnues hautement par l’institution universitaire (Duras, Simon), soit qu’elles soient suffisamment populaires pour être rentables (les rééditions Rimbaud et Lautréamont, Vian, Anouilh, Zweig, Fitzgerald – attention, ça ne veut pas dire que je les considère comme illégitimes).
      2/ du vieillissement de la composante « bourgeois cultivé » du public de la collection, public que Gallimard doit espérer satisfaire en lui proposant un auteur qui, manifestement, lui plaît encore.

      Seulement, comme la Pléiade est un Panthéon, qu’elle l’assume ou pas (M. Pradier tend plutôt à se distancier de ce rôle dans ses dernières prises de paroles publiques), la question « Jean d’Ormesson » repose le même problème qu’ont posé les éditions Prévert, Vian, Simenon ou Verne, celle de la légitimité. Mérite-t-il la Pléiade ?
      Mérite-t-il de rejoindre Platon, Racine, Rousseau, Goethe, Balzac, Baudelaire, Nietzsche, Dostoïevski, Conrad, Pessoa, Pasternak, Joyce, Nabokov, Céline ou Sartre ? Son œuvre présente-t-elle une inventivité artistique, une grandeur philosophique, une qualité générale suffisantes pour justifier une telle intronisation ? Sera-t-elle encore lue en 2035 (ne visons pas plus loin) avec attention ?
      À titre personnel, je ne le pense pas et je suis prêt à en prendre le pari. Son aura tient à son bagout, son succès à son charme, sa longévité à son entregent. Je m’étonnerais fort qu’on se souvienne de lui vingt ans après sa mort (comme bien d’autres pontes influents des lettres françaises, aujourd’hui réduits au statut de notes de bas de page dans la Cambridge History of French Literature). Je distingue très bien les raisons qui poussent Gallimard à vouloir le publier dans sa plus prestigieuse collection, et, pour tout dire, elles me semblent plus économiques que littéraires (mais je me trompe peut-être).

      • C’est sûr que l’héritage d’Ormesson en littérature contemporaine est plus que contestable, un peu comme celui de Michel Déon, les articles pour Le Figaro en plus.
        J’avais lu il y a quelques temps une interview où il s’émouvait du manque de reconnaissance de l’université française pour son œuvre et semblait se satisfaire de la publication en Bouquins.
        Je crois que son œuvre, en Pléiade ou non, risque de vieillir aussi vite et aussi mal que celle de Julien Green et de ne plus intéresser grand monde avec le temps. Green est décédé en 1999, si mes souvenirs sont bons, et il en reste bien peu de choses dans le paysage littéraire français.
        Personnellement, je pense que si Gallimard devait parier sur un auteur contemporain à intégrer à la collection, des choix comme Le Clézio, Modiano, Michon ou Quigard seraient plus judicieux.

        • Je suis (presque) prêt à parier que Gary sortira en 2015, peut-être en coffret, voire accompagné d’un album : dans la plus récente lettre de la Pléiade, l’illustrateur de l’agenda Pléiade est annoncé : Sfar. Et le boîtier de cet agenda est orné d’une image de l’édition illustrée de la  »Promesse de l’aube ». Gary ne serait pas autant en avant si rien n’était prévu à court terme.

          Bon.
          Foucault, Roth, Tournier ou Virgile (les quatre sont prévus pour 2015, aux dernières nouvelles) pourraient aussi avoir l’honneur de l’agenda. (A ma connaissance, aucun auteur de l’Antiquité n’a fait l’objet d’un agenda – à vérifier – alors pourquoi pas Virgile ? plutôt que, au hasard, Roth).

          En ce qui concerne d’Ormesson, j’ai l’impression qu’il a lâché l’info dans la presse (un bon millier de fois) d’une part parce qu’il était profondément heureux.(ce qui se conçoit sans peine), d’autre part pour que cela se sache et que le projet se fasse – qu’on ne le laisse pas abandonner comme Bazin.

          Je finirai en écrivant que j’ai très hâte que le premier volume d’Aristote rejoigne mes mains !

          • Tiens, je ne savais pas pour Michel Tournier, il a fait plusieurs romans intéressants et mérite sans doute la Pléiade.
            Pour Foucault, j’attends de voir quel sera le choix éditorial car déjà les essais sortis chez Tel représentent un volume considérable, si en plus Gallimard s’oriente vers une publication exhaustive: les dits et écrits (qui sont déjà en Quarto) plus les leçons au Collège de France et d’autres écrits… cela fera un bon nombre de volumes.

            Je me demande s’il y a pas déjà eu du théâtre antique à l’honneur de l’Album il y a bien longtemps.

  12. Pingback: Quelques remarques sur la Pléiade | Brumes, blog d'un lecteur

  13. En guise de précision : l’album de l’année n’a jamais été consacré à un auteur antique. Mais un tel choix n’est pas impossible, les Mille-et-Une Nuits ou le Graal ont bien eu leur album. Pourquoi pas Virgile ou Aristote ?
    Pour les agendas, disons que les plus acharnés amateurs de la collection y cherchent des citations d’auteurs dont les œuvres ne sont pas à la Pléiade pour y trouver des indices de leur prochaine élection au Panthéon relié cuir des lettres françaises. C’est ainsi que j’ai découvert, par une citation dans l’agenda 2012, que Perec y entrerait bientôt.
    PS : Je n’avais pas l’impression que le projet Gary fût si avancé qu’il se pût se concrétiser par un album pléiade dès 2015.

  14. Je suis allé tout à l’heure feuilleter le nouveau Pléiade « worst of » Sade, sorti cette semaine : si le format, le papier bible et le garamond sont biens ceux de la collection, il se présente sous une reliure de cuir rouge sang inédite dans la collection, avec un boîtier différent (sans portrait), deux signets noirs et une tranche de tête encrée de noir. Je suppose que ces couleurs ont été choisies exprès pour souligner les qualités de l’œuvre ? Il s’agit d’exploiter le mieux possible le côté transgressif de Sade ?
    Je ne sais pas si cette initiative, qui consiste à redoubler l’édition « complète » d’un « best of » redondant, sera réitérée, mais il me semble bien que c’est tout de même quelque chose d’inédit dans l’histoire de la Pléiade. La lettre de la Pléiade qui vient de paraître n’explique pas les raisons de ce choix assez particulier (et en rupture avec les usages de la collection). Le volume n’est pas numéroté et n’apparaît pas pour l’instant dans le catalogue papier. Quid de son statut ?

    (j’ai préféré acquérir le volume fraîchement réimprimé des Œuvres du Cardinal de Retz)

    • J’hésite à acquérir le best of de Sade, je n’ai pas d’attirance particulière pour cet auteur mais je trouve le concept intéressant et le volume assez beau quoiqu’il soit fort cher pour son épaisseur réduite.
      Du coup, je dois acheter un Camus pour le boulot et je vais acheter Villon à la place de Sade.

    • Merci pour ce retour. Effectivement, belle aventure commerciale pour Gallimard que ce volume de Sade, non-numéroté, limité (donc ne sera pas réimprimé, à l’image des albums), à deux mois des fêtes de Noël.

      On préfèrera patienter sagement pour le premier tome (tant attendu !) des Œuvres d’Aristote.

  15. Lecteur de Sade moi-même (je possède les 27 très beaux volumes de sa correspondance édités par Honoré-Champion-Slatkine, en plus des 3 tomes en Pléiade et de volumes publiés par J. J. Pauvert et A. Lebrun), je trouve à la fois complètement inutile et même choquante cette nouvelle « édition du bicentenaire ». Inutile parce que les 3 tomes déjà existants sont remarquablement bien faits ; choquante parce qu’il s’agit ni plus ni moins d’une vulgaire « customisation », comme disent les ados : on réédite les textes déjà publiés dans les années 90, ainsi que leur appareil critique corrigé ici et là, on y adjoint une (mince) préface nouvelle de Michel Delon, on change la carrosserie, qui du bleu vire au rouge sang, et on prétend facturer l’ensemble 60 euros aux habités de la collection. C’est parfaitement scandaleux et je prévois d’avance un flop. Quelqu’un vient de parler ci-dessus de « mauvais goût ». Aucun doute. On y est.

    Habitué depuis deux ans à consulter sur Internet les CV des universitaires pour repérer les projets Pléiade en cours, j’ai pu ainsi apprendre l’an dernier qu’une édition des Œuvres de Mme de la Fayette était en préparation (elle a été finalement publiée il y a peu).
    En l’état actuel de mes informations, il ressort d’abord qu’un volume de « Premiers écrits chrétiens » est en cours de rédaction (volume qui n’aurait rien à voir avec les « Ecrits apocryphes », déjà parus il y a longtemps ; je pense plutôt à des textes d’Irénée de Lyon et de Tertullien, par exemple, entre autres).
    Les deux volumes de « Théâtre médiéval » devraient eux aussi être publiés d’ici peu : un chercheur disait sur son CV préparer l’édition-traduction de plusieurs « mystères » médiévaux (donc des pièces à thème religieux).
    L’anthologie de poésie américaine figure elle aussi sur le CV d’un chercheur de l’université Paris-Diderot.
    Potocki figure lui aussi sur un CV de chercheur très récent.
    Pour Ihara Saikaku, un spécialiste-traducteur de l’écrivain (M. Struve) proclamait dans un article de recherche universitaire publié en 2005 qu’une édition en 2 volumes dirigée par Jean-Noël Robert et Paul Akamatsu était en préparation ; mais rien n’indique que cette édition n’ait pas été abandonnée depuis, M. Robert semblant très pris par ses cours donnés au Collège de France.
    Toujours en ce qui concerne la littérature japonaise, les 2 tomes d’Oeuvres de Natsume Soseki apparaissent eux aussi dans le CV d’un universitaire (« à paraître dans la Pléiade », dixit), et un récent article de M. Struve (encore lui…!) intitulé si ma mémoire est bonne « Traduire Le dit du Genji », me laisse à penser qu’il traduit peut-être le roman de Murasaki Shikibu pour la Pléiade, les droits de la célèbre et splendide traduction de René Sieffert étant détenus par Verdier (et La Pléiade ayant toujours voulu intégrer Genji à son catalogue). Pour mémoire, et c’est là très intéressant, alors même qu’il traduisait pour la Pléiade le « Jin Ping Mei cihua », André Lévy avait lui aussi publié dans une revue universitaire un article intitulé à peu près : « Traduire le Jin ping Mei »… Mais bon : le temps que M. Struve arrive au bout de sa traduction (s’il y survit…), la publication dans la Pléiade ne se fera sans doute pas… avant 10 ans.
    Quant aux « Ecrits mésopotamiens » attendus par certains ci-dessus, je rappelle qu’une très volumineuse édition (66 euros) a été publiée en 1989 puis 1993 chez Gallimard dans la collection « Bibliothèque des histoires », suivie peu de temps après par « L’épopée de Gilgamesh » dans la collection « L’aube des peuples ». Connaissant Gallimard il n’y a plus aucune raison pour eux de publier en Pléiade ces textes déjà parus dans d’autres collections, et de toute façon désespérément peu rentables… Contrairement à D’Ormesson, qui a bien fait rigoler tout le monde en trompetant son entrée dans La Pléiade avant même que le choix de ses œuvres pour un volume n’ait été fait (!) – ce qui semble inédit dans toute l’histoire de la collection. Comment peut-on ?

    D’accord avec l’auteur d’un message posté avant le mien qui parle de Quarto comme étant la filière Low cost de La Pléiade. Beaucoup ont cette impression. Un ami à moi qui ne craint pas d’être acerbe a parlé un jour de « voie de garage » – mais il est souvent cruel. Bonne fin de semaine à tous.

    • Je me rends compte que j’avais oublié de vous répondre (probablement parce que j’étais d’accord avec votre message). Merci pour vos précisions et vos recherches dans les CV (je n’ai jamais eu le courage de les mener). C’est très intéressant. Je pense à peu près comme vous pour le volume Sade (que la transgression soit aussi institutionnalisée et récupérée qu’elle l’est aujourd’hui me laisse songeur). Je me réserve pour le trio Villon/Gothiques/Aristote et hésite pour Leiris, que je connais très mal. Je souhaiterais avant cela finir quelques séries dont je ne possède pas tous les volumes (Conrad, James, Simon, Taoïstes, France, Claudel, Corneille), ce qui constitue déjà un programme considérable.
      Pour Potocki, je vais sûrement me répéter je pense que l’édition (un serpent de mer) est ralentie considérablement par la découverte, il y a dix ans, d’une autre version de son fameux livre. Les hypothèses des volumes « Premiers écrits chrétiens » (Tertullien a d’ailleurs été publié en son temps à la défunte Pléiade italienne d’Einaudi) et « Théâtre médiéval » me paraissent tout à fait crédibles. L’Anthologie de la poésie américaine n’a pas de raison d’être annulée, je l’attends aussi avec intérêt. Enfin je crois bien, comme vous, que la traduction des Écrits mésopotamiens est passée directement dans la bibliothèque des histoires.
      D’ici janvier nous devrions avoir des informations sur le programme 2015 où devraient figurer Virgile (qu’on m’avait annoncé pour cet automne au salon du livre) et peut-être Perec et Foucault.

  16. Quelqu’un pourrait-il dire à Gallimard d’actualiser les infos, sur son site internet, relatives aux questions que les lecteurs posent le plus souvent. Il est un peu ridicule (et témoigne d’un manque de professionnalisme étonnant de la part de l’éditeur) de donner des réponses totalement datées (parfois de plusieurs années, comme celles annonçant la parution imminente des œuvres de Boris Vian – vieille de plus de 4 ans – où de Jules Verne !)

  17. Brumes, merci beaucoup pour votre réponse.
    Juste une petite précision concernant les « Œuvres romanesques » de Natsume Soseki (c’est le titre exact) à paraître dans la Pléiade. L’universitaire en charge de ce projet est M. Alain Rocher ; il semble qu’il soit toujours professeur à L’Ecole pratique des hautes études de Paris. Le premier tome des « Œuvres » de Soseki (1850 pages, dit le CV de M. Rocher) a été remis aux éditions Gallimard et accepté pour publication par la direction éditoriale de la Pléiade. De mon point de vue, il n’y a désormais guère de doute que ce premier tome sera publié en 2016, année du centenaire de la mort de Soseki… Quant au second tome, il semble en cours de préparation. Aussi bien pour les amateurs de la collection que pour les aficionados de littérature japonaise (dont je suis), cette édition des Oeuvres de Soseki va faire date. Bonne semaine à tous.

    • Un heureux mystère de l’informatique m’envoie cette conversation par mail. C’est parfait.Vous me permettez de suivre l’affaire de près, d’être mieux informé que mon libraire. Ca ne m’empêchera pas de prendre le second Jane Austen la prochaine fois. On a tendance à se plaindre (d’Ormesson, c’est vrai, est une faute de goût), mais il ne reste plus beaucoup de pays avec des éditions aussi soignées. C’est le Nobel de Borgès.

      • Geo, je vous remercie pour l’information concernant Soseki, j’édite mon message récapitulatif plus haut dans la conversation. C’est une très bonne nouvelle, en effet, pour ce champ japonais si négligé à la Pléiade. Pour les éventuels curieux, on trouve quelques œuvres de Soseki dans la collection de Gallimard, « Connaissance de l’Orient ».

        Philippe, vous devez avoir coché la case « avertissez-moi par email des nouveaux commentaires ». Je suis très heureux, moi aussi, d’en savoir plus sur le programme de la Pléiade grâce aux contributions des uns et des autres.
        Comme vous évoquez Borges, je dois vous avouer que j’ai fini récemment par céder et par acquérir le Cahier de l’Herne à propos duquel j’hésitais tant (sur votre blog notamment).

        J’ai feuilleté le volume Villon tout à l’heure. Comme le dit Charles Dantzig dans le Monde des Livres du jour, il tient du Pléiade et de l’Album, tant la part « documentaire » tient de place (600 des 900 pages). Ce n’est évidemment pas une surprise quand on sait la minceur de l’œuvre du poète.

  18. Merci pour toutes vos intéressantes informations. Je voudrais juste mentionner (si ces messieurs de Gallimard me lisent) qu’il est incompréhensible et scandaleux qu’aucun auteur de langue polonaise ne soit traduit en Pléiade. Ne fut-ce que Gombrowicz, Schulz, Mickiewicz ou Mrozek (sans rêver du génial mais si mal connu Witkacy).

    Quelqu’un a cité Laxness plus haut. Ce serait en effet un projet merveilleux, mais bien peu probable, hélas. Quoi que le récent volume consacré à son oeuvre dans la revue L’atelier du roman de Flammarion prouve peut-être que son temps arrive enfin pour le lecteur francophone…

    Sinon, pour les Français, Vialatte et Delteil devront y entrer, c’est un ordre!!

    • Cher Joaquim Hock,
      merci pour votre contribution ! Je ne sais pas si les gens de Gallimard me lisent, mais cette note se trouve très haut, désormais, dans les requêtes concernant La Pléiade. Vous devriez leur écrire.
      Effectivement, la Pologne manque à l’appel (j’avais bien aimé ce que j’avais lu de Mickiewicz, mais le potentiel commercial d’un tel volume doit être équivalent à celui d’un volume Foscolo, c’est dire…). La Grèce moderne manque aussi, tout comme le Brésil, l’Afrique ou la Suède. Et ne parlons même pas, parmi les classiques, de la poésie latine (Tibulle, Properce, Ovide, Virgile)… Hélas, il manque aussi bien des grands noms allemands, japonais, italiens, espagnols, et même français – ils sont évoqués plus haut.
      Un libraire m’a confié que Gallimard visait désormais les 10 000 volumes en dix ans (en gros) pour rentabiliser une édition (je trouve les prix des derniers volumes assez décourageants, notamment le Leiris qui vient de paraître, à 75€ (tarif après lancement) pour 1400 pages !). Je ne crois pas malheureusement que les Polonais aient la moindre chance d’être rentables (sauf peut-être Gombrowicz). La tendance des prochaines années sera assez proche des tendances commerciales actuelles, c’est-à-dire la domination des anglo-saxons, du reste rentrés en masse dans le catalogue depuis quinze ans : Stevenson, Scott, les Brontë, James, Melville, Austen, de Quincey, Nabokov, le Théâtre Élisabéthain, Woolf, Fitzgerald, les Gothiques Anglais. Twain, Hawthorne et (Philip) Roth s’ajouteront bientôt à cette liste. Eux se vendent. Pour les non-anglophones, on attend (de façon à peu près certaine) Soseki, Virgile et Vargas Llosa.
      À mon avis d’amateur de la collection, ils continueront à faire entrer des anglo-saxons, en ciblant plutôt le 19e et le 20e (2/3 volumes par an) ; ils continueront à publier des français du XXe (bientôt Foucault, Gary, Perec, Tournier et, hélas, peut-être, d’Ormesson) ; ils panacheront le tout avec des volumes plus inattendus (1 par an, comme le Thérèse d’Avila/Saint Jean de la Croix et le Pline l’Ancien), des volumes consacrés aux oeuvres d’étrangers non anglophones (1/2 par an) et par les séries en cours (Shakespeare, Balzac, Brontë, Nabokov).

      • Pour la Suède, il est vrai que Strindberg n’a, à ma connaissance, jamais été cité pour la Pléiade. Curieux. Si l’on veut chipoter, Il y a bien deux Polonais: Conrad (qui écrivait en anglais) et Apollinaire…

        • Ibsen n’est arrivé qu’en 2005 ou 2006 à la Pléiade, Strindberg est peut-être envisagé à long terme ?
          Cela dite théâtre de Strindberg est traduit en six volumes à L’Arche (j’ai les volumes, ça couvrirait deux tomes de Pléiade, pas plus), la correspondance chez Zulma et les romans sont en poche chez Gallimard ou GF. Je ne vois dans cette absence (aussi injustifiable que celle de Brecht au moins pour le théâtre) qu’une histoire de droits de traduction (et de traducteurs disponibles, connaissant Strindberg, capable de tout retraduire…). Comme par hasard, les théâtres de Brecht et de Strindberg sont tous deux à L’Arche… (comme celui d’O’Neill). Peut-être faut-il y voir un début d’explication ? (je n’en sais rien)

          • Les oeuvres romanesques de Strindberg ne sont pas toutes disponibles en français. Par exemple, l’un de ses romans les plus importants, Gens de Hemso n’est disponible chez aucun éditeur. Et les nouvelles sont éparpillées de-ci de-là, et les recueils parfois lacunaires. Il y aurait donc un vrai travail à faire de ce côté-là.

  19. Il est inexact de dire que la politique de la Pleiade cible désormais les auteurs commerciaux, dans une logique de rentabilité que l’on peut comprendre, vu l’état déclinant du marché de l’édition papier…

    Si c’était le cas, et pour ce qui concerne mes 2 péninsules favorites (l’ibérique et l’italienne), auraient été choisis des auteurs plus vendables que Thérèse d’Avila, St-Jean de la Croix et Pline l’ancien, tous trois récemment publiés.

    Quand on observe le programme 2014 des 10 publications de l’année, en dehors des nouvelles éditions (Peguy et Stendhal) et de la nécessité de faire plaisir aux anciens présidents de la république (Duras pour Mitterrand et Mme de Lafayette pour Sarkozy, qui – à l’insu de son plein gré comme dirait son ami cycliste Virenque – en a fait un écrivain à nouveau populaire ; il faut donc prévoir – à défaut de Valérie Trierweiler, aujourd’hui en disgrâce mais dont les articles dans Paris Match auraient bien mérité un volume – la Pléiadisation prochaine d’un écrivain corrézien, susceptible de plaire aussi bien à Chirac qu’à Hollande, bien que les 2 plus célèbres d’entre eux, Richard Millet et Denis Tillinac, aient peu de chances de rassembler les (é)lectorats de droite et et de gauche), on doit tout de même reconnaître et saluer les risques pris par Gallimard.

    Je doute fort en effet que la poésie de Jaccottet et de Villon, ou encore la philosophie d’Aristote et de Leiris, passionnent les foules, l’époque penchant plus du côté du matérialisme que dans ces autres directions…

    J’ai vu que le premier titre annoncé de l’année 2015 serait une anthologie de la poésie chinoise ; un pari là encore peu évident commercialement. Gallimard gagnerait davantage en canonisant ses nobels (Le Clezio ou Modiano) ou même en éditant certains des auteurs présumés difficiles et cités dans vos derniers messages.

    Pour le reste, le choix de privilégier la littérature anglo-saxonne résulte du choix européen (stupide au demeurant) de trahir ses racines latines, bien que la France (l’un des derniers pays au monde à s’intéresser à sa langue et à sa littérature) résiste un peu mieux à cette inexorable dérive que ses voisins (je vais souvent en Espagne et en Italie, le Français a disparu de ces 2 pays tandis que le Globish y triomphe, même a quelques kilomètres de la frontière – où l’on doit parler Anglais pour se faire comprendre -).

    Ce phénomène est d’autant plus regrettable qu’il y a plein d’ecrivains américains à la réputation surfaite… La Pleiade devrait donc se forcer à proposer un panorama beaucoup plus large d’auteurs européens ; et quelques polonais ou scandinaves me sembleraient préférables à Roth, que l’on trouve déjà dans Quarto et qui en plus est battu chaque année à plate couture au moment de l’attribution du Nobel !

    • Concernant les Italiens, normalement Calvino devrait faire son entrée. D’après un article du monde, si les hérietiers ont largué le Seuil pour Gallimard, ce n’est pas seulement parce que les traductions d’origine n’étaient pas satisfaisantes, mais aussi parce qu’une publication en Pléiade était à la clef. Je m’en réjouis si c’est exact.

    • Merci Caminos pour votre message délicieusement grinçant.
      Il reste encore, Dieu merci, de la place pour quelques projets plus ambitieux, donc je suis d’accord avec vous, il est « inexact » de dire qu’ils ne veulent publier que des auteurs dits « commerciaux ». Ils panachent, depuis des années, des projets plus grand public (Zweig, Vian, Verne), avec de beaux volumes s’adressant à un public restreint (les deux que vous citez, mais aussi le Théâtre Élisabéthain, les volumes philosophiques, etc.). Il est d’ailleurs intéressant d’observer à rebours des constats simplistes que dix des 27 volumes de la série « antique » ont parus après 1996 et qu’une moitié des volumes médiévaux a été publiée avant 1998 et l’autre depuis (la césure est en 1991 pour les volumes de la Renaissance). En revanche, le XVIIe est un peu oublié depuis quinze ans (4 tomes parus depuis 2001 sur les 53 de la série rouge), tout comme le XVIIIe (10 volumes des 90 de la série publiés depuis 2001).
      De même, la part des volumes du XXe (classiques récents) n’a cessé de s’accroître, jusqu’à dépasser celle du XIXe (classiques canoniques) en 2007 (l’écart s’accroît depuis puisque ont paru 47 tomes Havane contre 17 en vert émeraude depuis lors). Vous me direz qu’il n’est pas illogique que le XXe prenne le pas, au fil du temps sur un XIXe désormais très bien quadrillé (encore que… et Huysmans alors ?)
      On le voit, la politique de la collection est au fond assez difficile à caractériser en quelques mots.

      Néanmoins
      1/ on observe tout de même une nette réduction d’envergure des projets multi-volumes : on a peine à imaginer que la Pléiade publierait de nos jours les 8 tomes de Green, la Correspondance en 13 tomes de Voltaire (qui se raréfie d’ailleurs dans les magasins et les stocks), les 4 tomes de Kipling, les 5 de Conrad, ou encore les 4 de France, comme Gallimard le fit dans les années 80.
      2/ les volumes eux-même s’amincissent (certains s’en féliciteront pour des raisons de maniabilité). Je lis actuellement le volume I des Œuvres Romanesques de Giraudoux, une telle édition, en trois copieux tomes, riches de brouillons, de plans et de variantes, pour un auteur français ne figurant pas au premier rang, serait inenvisageable de nos jours (elle demeure possible pour un Flaubert ou un Stendhal évidemment).
      3/ l’évolution à la hausse des coûts des volumes (Cendrars et Leiris II notamment, pourtant auteurs français, donc sans coûts de traduction, sont bien chers) tend à montrer qu’on essaie, chez Gallimard, de rattraper de plus faibles tirages par de plus forts prix…
      4/ enfin, je serais extrêmement curieux de connaître une sorte de palmarès général des ventes et des tirages des volumes de la collection, il pourrait bien nous réserver des surprises (je ne crois pas par exemple que l’opération Pline soit un échec, et j’ai bien peur que De Quincey, en revanche, n’ait pas eu un grand succès).

      • En parlant d’échec commercial, mon libraire favori (Ombres Blanches, à Toulouse) me disait dernièrement que le Virginia Woolf paru dans Quarto ne marchait pas du tout (à l’inverse du Modiano, qui part comme des petits pains en ce moment, ce qui se comprend aisément, et ce d’autant plus que son tarif défie toute concurrence !). On peut comprendre cet échec de VW, la Pleiade étant déjà passée par là quelques mois auparavant…

        PS : qui se dévouera pour faire remarquer à Gallimard qu’éditer les mêmes auteurs dans deux collections différentes est un peu balot ? Ceci dit, Quarto fait un gros effort en littérature américaine (Chandler, Capote et Below ces temps derniers ; d’autres auparavant) et il faut espérer que cela freinera l’américanisation de la Pleiade (au profit d’autres continents ? Quid par exemple des chances de publication, un jour, d’un Africain plus récent qu’Ibn Khaldoun ?).

    • Cher Joaquim Hock,
      merci pour cette information. J’ai entendu, en effet, par différents canaux, parler de ce projet « Tournier », qui pourrait ne plus tarder (Album Tournier en vue ?). Comme son œuvre n’est pas trop étendue (huit ou neuf romans, quelques recueils, et puis des essais dont je suppose qu’ils ne seront pas repris en Pléiade), j’imagine qu’il faut s’attendre à deux volumes. Les Météores et le Roi des Aulnes sont des textes assez longs, mais le reste des romans de Tournier tourne autour de 150/300 pages en folio, ce qui fait nettement moins en Pléiade (en général, il faut compter une pagination Pléiade à 60% de la pagination Folio)).
      Je penche néanmoins plus pour Gary et Perec cette année…

  20. ENFIN !!
    Virgile en mars ! (si l’on en croit le site de la Pléiade.
    Après l’anthologie (non-bilingue, à la différence des autres anthologies poètiques) de la poésie chinoise en février, et avant Mark Twain en avril, un autre beau projet pour ce début 2015.

      • ça me semble complètement improbable de ce que nous savons du calendrier du projet ! Quand M. D’Ormesson s’est ouvert de ce contrat, voici quelques mois, les textes n’étaient même pas encore sélectionnés !
        Pour Virgile, c’est dans l’ordre des choses, on l’attendait déjà en fin d’année 2014.

        • Effectivement, cela semble prématuré compte tenu des délais habituels, mais Mollat est une source relativement sûre.
          (Gallimard devrait aussi tenir compte de l’âge de d’Ormesson ; une publication d’ici 2-3 ans est donc difficilement envisageable)

          • Différentes sources indiquent que la Pléiade d’Ormesson serait plutôt pour 2016 – qui sera aussi l’année Sôseki, donc, d’après Geo…
            …l’année Descartes aussi, avec les deux volumes prévus ?…

            …et l’année Shakespeare ? Il semblerait, selon différentes sources, que l’édition des  »Œuvres Complètes » du barde génial serait menée à son terme pour le 400e anniversaire de sa mort. Anniversaire fêté avec un beau coffret illustré pour réunir les  »Comédies » (sans oublier les poésies), sous le modèle du « 1001 nuits » en coffret de 3 volumes, ou de 2 volumes, pour ne pas chagriner ceux qui ont acheté le premier volume paru plus tôt (je rêve) ?
            Et avec un album ?
            C’est le moment où jamais de garde une belle trace iconographique en Pléiade de la période du théâtre élisabéthain jusqu’à ses incarnation les plus  »contemporaines » (merci Jan Kott) !

          • Je penche plutôt pour 2015 pour d’Ormesson, ne serait-ce que par la présence (fantôme) du livre dans les rayonnages virtuels d’Amazon. Foucault devait aussi être publié en 2015 (2e semestre ?). Gallimard va faire le grand écart entre l’idole des campus et celle du Figaro…
            Je vois, Jimmy, que vous pariez sur un album Elisabéthain / Shakespeare l’an prochain. L’idée me paraît parfaitement adaptée, en effet.

  21. http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20141227.OBS8891/tout-ce-temps-passe-pour-une-note-que-personne-ne-lira-les-secrets-de-la-pleiade.html

    Un article de taille fort respectable sur la Pléiade. Le début, sur l’histoire de la collection, a déjà été lu cent fois, mais le reste, avec ses explications sur les protocoles éditoriaux, son analyse de l’organisation de Gallimard, ou ses anecdotes tirées auprès de Michel Delon, d’Henri Godard, d’Hugues Pradier ou d’Antoine Compagnon se laisse lire avec intérêt.

    Il se confirme, entre les lignes, quelque chose que je pressens en observant ici ou là les stocks de Pléiades dans les magasins : il m’étonnerait beaucoup que la Correspondance de Voltaire, qui se raréfie inéluctablement ces dernières années, soit réimprimée. Si l’un de vous est intéressé, il est grand temps pour lui de compléter la série.

    Rien à voir, mais j’ai eu récemment une très mauvaise surprise avec mon volume Œuvres Romanesques I de Giraudoux, dans lequel un cahier de 32 pages était répété, aux dépens d’un cahier désespérément absent (en plein milieu de « Bella »). J’ai immédiatement écrit à Gallimard, qui m’a très vite répondu pour me proposer d’échanger le volume incomplet contre un volume neuf (et complet). Si jamais une telle mésaventure vous arrive, n’hésitez pas à écrire à l’éditeur.

  22. Je fais suite à votre message ici cher Brumes.
    Je m’étonne de la rapidité de l’annonce de Twain en Pleiade car Philippe Jaworski n’a pas encore terminé l’édition des œuvres de son cher Mark…. Que des nouvelles traductions.
    Pour D’Ormesson le volume fera doublon à celui de ses œuvres collection Bouquins, il y aura ses romans chez Gallimard, choix d’articles et entretiens.
    Pour Apollinaire la fin des droits (enfin ! après 90 ans !) permet de supprimer les regroupements arbitraires posthumes de ses poèmes (il y’a, Poèmes à Lou etc)
    Tournier est très avancé. Il a autorisé qu’on se plonge dans ses manuscrits c’est passionnant. Le volume sera très riche j’espère. Avec un Album en prime.
    Bien à vous.

  23. Bonjour,
    concernant l’album 2015, les paris étaient ouverts (et le sont toujours), et Perec et Gary tenaient la corde, suivis de près par Tournier et Roth.
    Si l’on considère qu’une double parution en mai est accompagnée d’un album (pour exemple : Molière en 2010, Claudel en 2011, Verne en 2012, Cendrars en 2013, Duras en 2014), une (légère, il ne faut pas se précipiter non plus) mise à jour des « Questions des lecteurs » sur le site de la Pléiade peut donner une idée de l’auteur à l’honneur en 2015, ainsi que finir de nous renseigner sur la totalité des parutions pour le 1er semestre 2015…
    Et c’est une agréable surprise !
    A moins que…

  24. Cela donnerait donc (pour ceux qui n’aiment pas les devinettes, ou qui viennent là par des requêtes google « programme Pléiade 2015 » (il y en a, cet article est d’ailleurs le 2e plus consulté du blog…) :
    février : Anthologie de la poésie chinoise
    mars : Virgile (bilingue)
    avril : Twain / d’Ormesson
    mai : Casanova II / Casanova III et l’Album Casanova.
    Ce n’est pas absurde…

  25. Gallimard vient d’annoncer la publication, mi-avril, d’un coffret Pléiade « Mémoires d’Outre-Tombe », en deux volumes. Est-ce la même édition (assez ancienne puisque parue en 1947 et 1950) ou une nouvelle (pas illégitime étant donné l’âge de l’édition actuelle) ? Pour l’instant, rien n’est dit à ce propos sur le site de la Pléiade.

    • Bonjour Brumes, ces deux volumes sont la réimpression des Mémoires du Comte-Ambassadeur publiés pour le centenaire de sa première édition. Mieux vaut, selon moi, lire ses magnifiques pages sur la grive ou sur ses pleurs à Sparte dans l’excellente édition Pochothèque.
      Pour l’édition de Nietzsche, les éditeurs ont -c’est le moins qu’on puisse dire- de graves problèmes. Elle sera sans doute relancée bientôt…
      J’ai appris qu’un groupe de traducteurs prépare de nouvelles traductions des grands romans de Selma Lagerlöf. Pour la Pléiade ?
      Bien à vous.

      • Bonjour,
        durant l’été 2013, j’avais envoyé un courrier à Gallimard les interrogeant sur d’éventuelles éditions de Lagerlöf, Laxness, Vesaas, et d’une possible nouvelle édition Poe qui intégrerait l’intégralité des nouvelles, les poèmes, les « marginalia », des essais – et que sais-je encore !
        Pour Lagerlöf, il m’avait été répondu précisément : « Nous n’avons pas de projet en cours pour l’œuvre de Selma Lagerlöf mais nous n’excluons pas cette possibilité pour les années à venir ».
        Il s’agit là d’une des réponses-type de la collection, mais, comme toutes ces réponses, agréablement et intelligemment (il me semble) nuancée, puisqu’elle semble prendre en compte le degré d’enthousiasme et d’amour du lecteur pour l’auteur en question, l’aura de l’auteur par le passé, au jour de la demande et dans les années à venir, et le succès envisagé en cas d’édition – ainsi que les possibles manœuvres de collections concurrentes, qui peuvent œuvrer à faire naître un désir d’auteur.
        Un tel projet serait rien moins que légitime, pour un grand auteur, Prix Nobel de Littérature et grande conteuse – Actes Sud, qui lui a fait les honneurs de la collection Thesaurus, l’a bien montré.
        A voir donc si ce groupe de traducteurs se réunit sur un tapis en papier bible et dans des fauteuils en peau de moutons néo-zélandais. Et si Régis Boyer, pour l’instant l’unique traducteur du domaine scandinave en Pléiade (Andersen I et II, Ibsen, Sagas Islandaises), en serait.

        • Bonjour deniziotjimmy, je garde votre idée de réunion pour les traducteurs ! En ajoutant un verre de vin (ou de thé suivant l’auteur traduit) ça peut rendre ses réunions plus attractives!!
          Nous verrons bien laquelle des femmes écrivaines passera en premier la ligne d’arrivée de la Pléiade: la nouvelle traduction du Genji n’est pas achevée et les romans de Lagerlöf semblent encore qu’un vague projet (sauf si le tomte de Nils jette un sort à Gallimard aussi!). Seules les œuvres de Simone De Beauvoir et de Sand sont en très bonne voie. A suivre donc.

          • Merci pour ces informations, chers Tigrane et Jimmy.
            Lagerlöf, pourquoi pas ? La Pléiade doit chercher à féminiser son catalogue. Je n’ai rien contre (j’ai un vague souvenir d’avoir lu des nouvelles d’elle qui m’avaient bien plu).
            Je comprends mieux, néanmoins, pour quelles raisons je vois mes librairies habituelles exposer à nouveau Les Mémoires d’Outre-Tombe publiés par « La Pochothèque » (et peut-être réimprimés à l’occasion). Il suffit que la Pléiade fasse un mouvement pour que tout le monde ait subitement la même idée, comme ce fut le cas lors de l’embouteillage Zweig en 2013. Il a suffi qu’Aristote parusse dans la Pléiade pour que le Seuil (?) publie son pavé de 2000 pages…
            Dans le même registre, on notera que Robert Laffont (re?)publie ce mois-ci un volume de romans de Mark Twain, à peine deux ou trois mois avant la parution (probable) d’un volume Pléiade consacré à l’Américain. Ce n’est pas la première fois que Laffont se positionne directement pour « concurrencer » la Pléiade (à la mesure de « Bouquins ») : Les Romans Gothiques fin 2013, Casanova au printemps 2013, Zweig à l’hiver 2013, le calque est très visible, et ça sans compter Stevenson, les 1001 Nuits, Don Quichotte, Tacite, Tocqueville, Poe, Gautier, Barbey ou Baudelaire, tous (re)parus ces quatre dernières années et déjà présents au catalogue de la Pléiade.
            Je comprends bien les raisons de cette politique de l’embouteillage, mais en tant que lecteur, je regrette assez de voir Quarto, la Pléiade, Laffont proposer sensiblement les mêmes recueils, en même temps, quand personne n’est capable de proposer d’édition complète (ou très élargie) d’un Huysmans, d’un White, d’un Fargue, d’un Audiberti, d’un Auden, d’un Strindberg, d’un Döblin, d’un J.Roth, ou d’un Eliot (liste absolument non exhaustive).

            Deux autres collections moins connues, 1001 pages et Thésaurus, opèrent des choix un peu différents, au moins (même s’ils ne publient pas grand chose ; d’ailleurs la Pochothèque ne publie plus grand chose de nouveau depuis quelques années, me semble-t-il)

  26. Je crois que c’est Flammarion qui a publié ce pavé très difficile à lire et à manier. C’est a peine une base documentaire, les volumes séparés GF eux restent excellents.
    Je vous trouve très très sévère contre Bouquins: j’ai été ébloui par tout Segalen, Renan, Port Royal, Sénèque, Mauriac (journal lettres) Grossman, Primo Lévi, Blondin, Barrès et Léon Bloy etc… Ceux la n’étant pas ou plus en Pléiade!
    Sans oublier ce cas absolument inouï de l’édition pléiade de la correspondance de Balzac qui a supprimée toutes les lettres passionnantes et essentielles pourtant à Mme Hanska publiées fort heureusement en Bouquins ! Et j’ajouterai (ça paraît incroyable mais c’est vrai) que l’édition des romans et de l’œuvre poétique n’est complète que dans la collection Bouquins !

    Souvent des volumes Bouquins sont parus très très longtemps avant la Pléiade (Casanova, romans terrifiants, Diderot, Shakespeare bilingue etc…). Leur théâtre de Tchekhov retraduit est bien meilleur que la « version » Pléiade d’Elsa Triolet (ses romans mériteraient eux une édition Pléiade).
    Je me demande combien d’exemplaires Bouquins vendra des œuvres complètes de Lucien de Samosate ! C’est courageux je trouve de le rééditer.
    Je me souviens d’un coup que le volume (1984) des Romans terrifiants proposaient eux l’extraordinaire Melmoth de Maturin supprimé de la Pléiade par «manque de place» au profit de Shelley plus… vendable !!
    (Je précise en clin d’œil n’avoir pas d’intérêt économique chez Bouquins!)

    • Oui, Flammarion a publié Aristote comme ils avaient publié Platon. Les lire dans ces éditions est fortifiant physiquement ; ça muscle les bras. L’avantage est de disposer de tous les textes, l’inconvénient est qu’il faut acheter des haltères ou un lutrin…
      Concernant Bouquins, j’ai dû mal m’exprimer, car je ne remettais pas en cause la collection (même si je la regarde d’un œil critique), je m’interrogeais surtout sur leur récent opportunisme à propos des rééditions de Casanova et de Zweig. Je trouve agaçant dans l’absolu (en tant que lecteur désintéressé) de trouver certains auteurs en 3 ou 4 éditions, parues la même année ou peu s’en faut, ça ne va pas plus loin. Je ne critiquais pas cette collection, bien plus étoffée que ses concurrentes (je ne sais combien de volumes ont paru, mais il me semble que dans les grandes années, ce montant devait approcher les 30 annuels).
      Cependant, vous m’invitez par votre message à livrer mon sentiment sur cette collection. Admettez qu’elle paie l’ampleur de son catalogue d’une certaine hétérogénéité. Certains de ses livres sont très bien, c’est certain, j’en ai d’ailleurs une bonne quarantaine (soit cinq fois moins que de Pléiades, mais deux fois plus que de Quarto). Cependant, je me rends compte que je pioche plus souvent dans le catalogue que dans les parutions nouvelles. La plupart des titres que vous citez sont anciens. Pour tout dire, je suis nettement moins intéressé par Bouquins depuis qu’elle se consacre (un peu trop à mon goût) à
      1/ la production de dictionnaires encyclopédiques plus ou moins « amoureux » (exhaustivement, depuis début 2013 : Les Mots du sexe, Les Méchancetés, Les Étrangers qui ont fait la France, Rimbaud, La Tauromachie, La Bêtise, Les Sexualités, Le Rock (2 volumes), Les Dictons, Le Vatican, Les Livrets d’Opéra, Verdi, La Légion Étrangère, La Franc-Maçonnerie)
      2/ d’intégrales de romans populaires (San Antonio, Fantômas, les romans d’espionnage soit une dizaine en trois ans – j’ai d’ailleurs un souvenir navré de ma lecture de vieux « thrillers » de Graham Greene, réédités par eux et qu’il eût mieux valu laisser où ils étaient)
      3/ et de guides touristico-littéraires sur les grandes villes et grands pays du monde (Berlin, Lisbonne, le Brésil, l’Espagne, etc.).
      Franchement, les initiatives heureuses, comme la publication des œuvres de Lucien de Samostate (une édition qui se faisait attendre, puisque je ne crois pas qu’il y en ait une seule de disponible sur le marché) sont beaucoup trop rares ces dernières années, et je trouve même qu’elles se raréfient de plus en plus. D’ailleurs, les « meilleures » publications des trois dernières années (le Journal des Goncourt, les Lusiades, Barrès, l’Histoire des Girondins, Tacite) ne sont jamais que des rééditions de volumes épuisés.
      Malgré cela, bien évidemment, le catalogue est globalement intéressant et propose pour 25 à 35€ de solides éditions dans une multitude de domaines.

      (cela dit, on peut incriminer le public de cette évolution, car si une initiative intéressante comme l’édition en deux tomes des romans de Huysmans s’est interrompue, c’est bien de sa faute !)

  27. Tigrane, si je ne me trompe, la version du Melmoth de Maturin dans le volume Romans Terrifiants de Bouquins est tronquée, le version complète a été publiée par Pauvert. Bouquins compile souvent sans beaucoup de travail d’édition ou refourgue des traductions anciennes.

    • Joaquim vous avez sans doute raison mais les plus de 300 pages en près de 50 chapitres m’ont suffit a mon bonheur de lecteur des années 80 quand j’ai découvert ce texte si fort et terrible et cher à Wilde et à la Lolita de Nabokov. Tant pis si il n’y pas tout. Le plaisir barthien de ma lecture était suffisant pour moi (qui ne suis pas du tout connaisseur de ce genre de romans en plus !). Je me souviens encore d’une phrase où Melmoth a comme seule crainte que sa victime lui échappe ! Et il le prouve en 300 pages !! (citation souvenir c’est un à peu près) Je me souviens avoir été frappé aussi par le dépérissement à son contact de tout ce qui est la nature… Un Attila nordique !

      • Vous avez raison Brumes de dire que cette cascade de titres Bouquins est loin d’être de la littérature. Mais je ne les connaît pas. Peut-être intéressent-ils toutefois des lecteurs ?
        Pour les mille et une nuit ils ont réédité la traduction Mardrus ce qui est intéressant début là aussi (je crois) des années 80. Édition c’est vrai vieillotte qui m’a fait croire longtemps qu’Aladin et Ali Baba étaient des contes des Mille et une nuits ! Tant pis ou tant mieux après tout…. Non ?

  28. Voilà, c’est officiel, en avril sortiront :
    -> un volume d’œuvres de M. Twain (Tom Sawyer, La Vie sur le Mississippi, Huckleberry Finn, La Tragédie de David Wilson le parfait nigaud). Il n’y a que 4 romans dans ce livre, mais 652 illustrations. Bon… je m’attendais à un volume plus original, ou d’un choix plus vaste. Sortie le 10 avril.
    -> un volume d’œuvres de J.d’Ormesson (Au revoir et merci, La Gloire de l’Empire, Au plaisir de Dieu, Histoire du Juif errant), préfacé par Marc Fumaroli. Sortie le 17 avril
    Je ne déborde pas d’enthousiasme.
    Cela confirme néanmoins nos prédictions des dernières semaines. Deux volumes de Casanova et l’album pourraient bien suivre et clore ce premier semestre de Pléiades…

  29. Merci pour cette excellente article pose d’intéressantes questions ainsi que pour les passionnantes informations qu’il a suscitées. Je n’arrive pas à croire que d’Ormesson puisse être en pléiade… enfin, passons, pour reprendre Flaubert « moquant » respectueusement Hugo. On doit quand même à la Pléiade les deux tomes des Romans de Ramuz, et je ne pense pas qu’ils aient gagné beaucoup sur ce coup. De même pour M. Nicolas de Restif. Le De Quincey vaut vraiment la lecture, notamment pour les Esquisses autobiographiques. et puis n’est-pas, avec Bloy d’ailleurs, l’un des écrivains fétiches de Borges… Je viens aussi de recevoir le tome IV des Nouvelles de James, et si c’est aussi bien retraduit que le tomes précédents, ce sera un festin., Bloy, je comprends leur problème. L’auteur se vend très mal. Et il est difficile de faire une meilleure édition du Journal que celle de Glaudes en Bouquins. Le Désespéré et La femme pauvre ne suffiraient pas à faire un volume. Peut-être en y joignant l’Exégèse des lieux communs et les Histoires désobligeantes? De toutes façons le fin-de-siècle est mal aimée à la Pléiade. A part l’exception Villiers (remarquable)et Jarry – qui a pris son temps- vous n’avez rien de Gourmont, de Lorrain, de Schwob, de Mirbeaux ou de Darien, cet éblouissant écrivain. Ils pourraient cependant faire au moins une édition semblable à ce qui fut consacré aux libertins du 17eme, (j’ai le T.1 et j’attends une bonne occasion de m’offrir le II) aux romanciers du 18eme. Je n’ai jamais compris l’absence de T.Mann. Broch aussi d’ailleurs. Mais d’ailleurs, pourquoi l’absence de Quevedo ? (sauf le génial Don Pablos de Segovie dans l’admirable « Romans picaresques espagnols » de M. Molho). Et Thackeray? Et Erasme?

    Bouquins… Je leur suis redevable -sans eux pas de Journal de Bloy, pas de Maistre (toujours Pierre Glaudes) puis il y a les « romans utopiques », les « romans fin-de-siècle », les Souvenirs de Léon Daudet, autrement plus intéressant que son père pour moi. Et puis Michelet, pas seulement la Révolution française mais également les autres volumes de l’Histoire de France.ll y a Taine, Plutarque, Gibbon et une excellente édition de Proust.
    Mais je m’inquiète pour la pléiade.. Déjà, Roth…quand il y a Pynchon et W Gaddis et, effectivement les romans de James (merci Bouquins, là encore pour ses trois plus grand romans en un volume) mais d’Ormesson… franchement. Et Gary? Bof . Vous croyez qu’il restera bien longtemps vous,Gary ? Alors que Chardonne n’y est pas… Bon, il ne faut pas non plus rêver et espérer Vialatte -comme ce fut dit -, ou Reverzy délire! voire Calaferte, démence. Pourquoi pas Claude-Louis Combet pendant qu’on y est !
    En tous cas merci à Corti pour L’anatomie de la Mélancolie de Burton ( j’aimerais de telles surprises dans la Pléiade). Et mes excuses pour ce com d’une longueur indigne. Que voulez-vous, il est rare qu’on puisse se laisser aller à parler littérature, fut-ce par le petit bout de la lorgnette.

    • En fait, si Ramuz fut publié (ce qui peut sembler étonnant pour cet écrivain majeur, inconnu pourtant de la plupart des Français, même universitaires), c’est parce que l’édition a été subventionnée (en partie) par des institutions suisses….

      • Merci pour votre commentaire.
        Je savais que l’édition Ramuz était une sorte de pari sur le marché suisse francophone plutôt que français, où il reste, en effet, méconnu (on sait que Ramuz, s’il monta à Paris, comme tant d’autres écrivains francophones, ne put s’y maintenir et revint s’installer définitivement en Suisse). Je ne savais pas en revanche que des institutions suisses l’avaient financée. C’est plutôt heureux, car les deux volumes proposent de très larges aperçus de l’œuvre et lui donnent une certaine visibilité… (certains de ses textes sont aussi en Folio, d’ailleurs).

    • Cher Restif, je me rends compte que je ne vous ai pas répondu. J’essaie de n’ignorer personne sur cette enfilade, mais parfois certains messages échappent à ma vigilance. Je m’en excuse et vous réponds avec un mois de retard…
      Rapidement (et en inventaire-à-la-Prévert) : je ne connais absolument pas l’œuvre de Restif de la Bretonne (que je n’ai pas mentionné dans ma liste des volumes menacés – voir par ailleurs – mais qui se raréfie pas mal je crois), il faudrait que je me penche un peu sur lui un jour. Pour de Quincey, le livre est sur mes étagères, je m’y mettrai un jour.
      Pour James, j’ai longtemps hésité entre l’édition des quatre volumes de nouvelles à La Différence (traduction par le seul Jean Pavans) et celle de la Pléiade. J’ai fini par choisir la seconde (en partie pour de bas motifs de format et de lourdeur des volumes). J’ai lu le tome III, certains textes m’ont durablement marqué (« Le Motif dans le tapis », « Le Legs Coxon », « La mort du lion », etc.). Les trois autres m’attendent encore.
      Bloy, Lorrain, Schwob, Mirbeau, Darien, ce sont des projets qui auraient pu, peut-être, voir le jour voici trente-cinq ans. Désormais il est trop tard. Je ne suis pas sûr qu’un volume Bloy – qui a un petit public bruyant d’amateurs – serait si catastrophique, commercialement parlant, mais je n’imagine pas une seconde Gallimard le proposer, et encore moins proposer plusieurs tomes. Je me souviens d’une personne qui, sur la toile, réclamait l’édition des œuvres complètes de « l’enfilanthrope » Lorrain (il se donnait ce charmant surnom…) en je ne sais combien de volumes à la Pléiade. C’est irréaliste.
      Vous évoquez Reverzy, Flammarion a publié tous ses romans en un seul volume dans sa collection 1001 pages (où ils cohabitent avec les deux volumes de Reverdy ! Les distraits s’y trompent). Pour Calaferte, Vialatte, etc. c’est trop « secondaire » (malgré leurs qualités) je pense. Gallimard ne publie que dix volumes de La Pléiade par an et nous avons tous de quoi leur proposer 200 ou 300 volumes supplémentaires !
      L’absence de Mann ? Il paraît que le projet intéresse Gallimard mais que le projet est provisoirement en panne pour une question de droits sur des traductions d’ailleurs à revoir.
      L’absence (hautement regrettable) de Broch ? De mauvaises perspectives commerciales, l’auteur est mésestimé par le public français, et ses grands livres, Les Somnambules ou La mort de Virgile sont sûrement trop exigeants pour que le volume soit rentable (hélas).
      L’absence de Thackeray ? Une vraie lacune, mais les Anglais Fielding, Defoe et Dickens sont en partie indisponibles. Ses perspectives commerciales sont-elles réelles ?
      L’Anatomie de la Mélancolie en Pléiade n’aurait pas été un projet complètement absurde, je le rapprocherais assez, dans l’idée, de Pline l’Ancien. Dommage que ça ne se fasse pas.
      Un autre Anglais auquel je pense, c’est Thomas Hardy, qui aurait pu faire l’objet d’une belle édition en quatre volumes (deux ou trois de romans, un de poésie/théâtre)… dommage que Gallimard n’y ait pas pensé à l’époque où ils faisaient Kipling et Conrad… D.H.Lawrence et Powys auraient pu aussi y avoir droit (au moins le premier…).
      Érasme, oui, à condition de trier, avec des perspectives de vente compliquées et un énorme travail d’annotation à faire à côté. Avez-vous vu que les Adages ont récemment paru aux Belles Lettres, en forts et coûteux volumes ? Les Belles Lettres ont apparemment réussi leur montage financier pour ne pas perdre d’argent sur ce projet, mais l’économie de l’ensemble n’était peut-être pas la même que pour des volumes de Pléiade (et les BL ont bénéficié de leur image d’éditeur scrupuleux et irréprochable de textes classiques). Plus modestement, un volume « Humanistes » aurait-il une cohérence ? (avec Thomas More, etc.)

  30. Pingback: 2015 02 17 : La Pléiade – un certain mépris du lecteur | Dominique MATHIS

  31. Dominique Mathis, j’ai lu votre article, j’ai essayé de vous répondre sur votre site, mais je n’y arrive pas.
    Espérons que vous lirez ma petite réponse à vos interrogations sur les aléas de publication de la Pléiade en multi-volumes.
    1/ pour ces livres en ancien français, vous posez un problème réel qui a trois explications :
    -> les éditions uniquement en ancien français (historiens et chroniqueurs, jeux et sapience, romanciers) sont de vieux volumes, datant des années 40/50. À l’époque, Gallimard n’avait pas jugé bon de proposer les textes en traduction (cela ne se faisait pas). Ce sont des éditions à refaire, d’ailleurs deux sur trois sont « épuisées » et la troisième ne sera peut-être pas réimprimée. En principe, Jeux et Sapience devrait être refait, en bilingue, dans une édition dite « Théâtre médiéval ».
    -> Tous les autres volumes médiévaux plus récents (le Graal, Voragine, Tristan et Yseut) sont proposés en bilingue, ce qui est tout à fait dans l’esprit de ce qui est proposé au grand public en matière de littérature médiévale désormais.
    -> Pour les volumes du XVIe (Montaigne notamment mais aussi Rabelais et Ronsard), Gallimard ne traduit pas (encore ?), jugeant (peut-être à tort) que la langue est encore compréhensible pour le lecteur d’aujourd’hui. Peut-être les prochaines éditions, dans trente ans, prendront-elles le parti de la traduction…

    2/ Indisponible provisoirement // épuisé
    Il est parfois difficile de s’y repérer, surtout que Gallimard communique peu à ce propos. En principe, les indisponibles sont supposés être en rupture de stock, les épuisés (actuellement une vingtaine) sont abandonnés définitivement (sauf exceptions, jamais justifiées, comme les Cahiers de Valéry, explicitement « épuisés » au catalogue 2010 et retirés en 2011/12). Il faut comprendre comment marche l’édition des Pléiades. Gallimard tire une édition en une fois, la laisse s’écouler, puis, généralement, la retire. Par exemple, si vous achetez les Œuvres poétiques d’Apollinaire, aujourd’hui, dans une librairie, il y a de grandes chances que soit l’énième retirage de l’édition des années 50, mais imprimée en 2014. Une nouvelle édition paraîtra d’ici deux ou trois ans, et remplacera celle des années 50. En revanche, si vous achetez les Carnets de Tolstoï, le Théâtre de Pirandello ou le Théâtre du XVIIe, ce sont des volumes du premier tirage, datant de la fin des années 70, début des années 80, qui ont mis plusieurs décennies à s’écouler (et qui pourraient à l’avenir ne pas être retirés s’ils devaient devenir indisponibles).
    Tous les volumes indisponibles provisoirement ne finissent pas par être épuisés. Pasternak était indisponible au catalogue en 2013 et il a été retiré en 2014. Retz a failli passer indisponible mais a été retiré à l’automne 2014. Les romans chinois s’approchent presque tous de la zone d’indisponibilité mais je ne crois pas qu’ils seront un jour nommément « épuisés ». Gallimard prend son temps pour retirer. Il suffit d’examiner un peu les librairies pour voir que certains volumes se raréfient, cela parce que les stocks s’épuisent (la Correspondance de Voltaire, les écrits de Julien Green, etc.)
    Cela dit, je vous rejoins, certains indisponibles le sont depuis très longtemps (du côté de Dickens, Marivaux ou Defoe) et Gallimard ne donne AUCUNE visibilité sur son programme de réimpression, ce qui est assez ennuyeux lorsque l’on hésite à se le procurer sur le marché de l’occasion. Certains, comme les Romans de Marivaux, ne seront pas réédités en l’état (mais plutôt sous une nouvelle édition), d’autres ne réapparaîtront peut-être jamais… (question de public et de marché, Gallimard est un éditeur privé, contrairement, par exemple, à la LoA, aux USA…)

    3/ les multi-volumes
    En effet, Gallimard lance des éditions sur plusieurs volumes sans toujours être très transparent sur les dates de sortie des futurs tomes. Ce sont des projets lourds, qui mettent un certain temps (l’édition a une temporalité qui lui est propre…) Accusez-en les responsables de volume, qui prennent parfois du retard sur leur travail éditorial. La Pléiade est une structure très légère, d’une dizaine de personnes, qui fait travailler des universitaires et traducteur de haut niveau, très pris, à un degré d’exigence élevé : des retards sont toujours possibles. Ainsi Virgile, volume attendu pour mars, vient d’être reporté en mai ! Pour d’autres, la responsabilité est du côté du public : Luther II n’est pas près de paraître car Luther I a été un échec commercial. Et puis des fois, malheureusement, les maîtres d’œuvre meurent en route, ou tombent malade, ou se brouillent, etc ce qui ralentit considérablement les projets… L’édition est aussi une sorte d’artisanat, malgré ses allures de grosse industrie : structures légères, difficulté de remplacement des équipes, etc.
    Je vous rejoins en revanche sur votre constat : Gallimard communique très mal (notamment sur le site officiel) à propos de son calendrier d’édition et de retirage.
    Cela dit, vous évoquez différents volumes, je vous réponds point par point sur ce que je sais :
    « -> Balzac : correspondance : le tome I est paru en 2006, le tome III est toujours « en préparation ».  »
    le tome II est sorti en 2011, il n’y a pas de raison pour que le tome III ne sorte pas d’ici un an ou deux, il n’y a rien de très choquant là-dedans, c’est tout de même un projet lourd.
    « -> Balzac : œuvres diverses : le tome I est paru en 1990, le tome III est toujours « en préparation ». »
    Le deuxième tome est sorti en 1996, effectivement, ce délai pour le tome III est incompréhensible (et plutôt un mauvais signe) : les volumes se sont-ils bien vendus ? est-il toujours en cours ? Il y a de quoi être pessimiste.
    « -> Hugo : œuvres poétiques : le tome I est paru en 1964, les tomes IV et V sont toujours « en préparation » ; record battu ! »
    L’édition est interrompue depuis quarante ans, si elle devait être reprise, il faudrait rééditer tous les volumes consacrés à Hugo dans les standards actuels. Hugo ne se lit plus guère, je n’y crois pas beaucoup… Cela dit, la Pléiade pourrait être plus claire à cet égard et abandonner ce « en préparation » assez incompréhensible.
    « -> Marx : œuvres : le tome IV Politique I est paru en 1994, le tome V n’est pas même signalé « en préparation » et on ne sait pas davantage si ce sera le dernier ou s’il y aura des tomes VI, VII… »
    Le responsable de l’édition est mort, le marxisme aussi (ou presque), c’est une édition qui ne sera jamais reprise, les temps ont changé. Je ne sais pas pour quelles raisons ils maintiennent la mention « en préparation ».
    « -> Nietzsche : œuvres : le tome I est paru en 2000, les tomes II et III sont toujours « en préparation ». »
    Je n’ai pas la moindre idée des raisons de ce délai, surtout que Gallimard édite (certes lentement) les Oeuvres complètes du philosophe dans une collection spécifique, à côté. La Pléiade continue-t-elle ce projet ? A-t-il encore un sens ?
    « -> Orateurs de la Révolution française : le tome I est paru en 1989 bien sûr, le tome II n’est pas même signalé « en préparation » et on ne sait pas davantage si ce sera le dernier ou s’il y aura des tomes III, IV… »
    François Furet est mort, le volume n’a pas marché, il n’y aura pas de suite. Et la Pléiade ne le cache pas. D’ailleurs, quand il viendra à être indisponible (ses stocks ne sont toujours pas écoulés, 25 ans après… mais ils le seront bien un jour), ledit volume sera sûrement inscrit comme « épuisé ».
    « -> Sartre : publication de ses textes romanesques et philosophiques commencée en 1982 ; les écrits politiques ? On ne sait pas… »
    Personne n’en sait rien, mais je ne crois pas que le projet soit en cours ? Les Essais de Giraudoux étaient aussi annoncés dans l’introduction des Œuvres Romanesques I et n’ont jamais été lancés. Cela arrive, en fonction de ce que Gallimard pressent du marché.
    « -> Shakespeare : œuvres complètes : le tome I est paru en 2002, les tomes VI et VII sont annoncés mais pas encore « en préparation ». »
    Alors là, non, vous êtes sévère, c’est une édition de longue haleine, sur un auteur d’envergure mondiale, avec des milliers et des milliers de travaux à consulter et des traductions d’une grande complexité à parfaire : les tomes III et IV sont sortis en 2008 et le V en 2013. Laissez leur un peu le temps de finir cette édition majeure (car bilingue) des œuvres du Barde… Il ne reste que deux tomes et ils seront sûrement achevés d’ici la fin de la décennie !

    Enfin pour Aristote, là, en revanche, je vous rejoins, Gallimard n’est pas clair et j’ai bien peur que l’édition de cette année soit un volume de pot-pourri et non le volume I des Œuvres Complètes (qui n’existeront jamais, je le crains, à la Pléiade).

    J’ajouterais qu’on attend toujours (sans trop d’espoir) le volume III des Oeuvres de Vigny, le II des Oeuvres de Luther et que la Poésie et le Théâtre de Brecht auraient dû faire l’objet de trois volumes, annoncés à la fin des années 80 et jamais édités !
    Voilà, j’espère avoir répondu un peu à vos interrogations.

    • Je vous prie de bien vouloir m’excuser pour ce commentaire qui ne précise qu’une toute petite chose de votre commentaire très copieux en terme d’analyses et de bilans.
      Pour Shakespeare, effectivement, restent deux volumes de « Comédies », sur les trois qui sont prévus. Ces deux volumes devraient être les plus intéressants, et ce même si le 1er comportait « Peines d’amour perdues », et les brillants « Songe d’une nuit d’été » et « Marchand de Venise ». Restent encore (et c’est une joie !) à découvrir, dans de nouvelles traductions (pas forcément inédites, certaines ayant déjà été éditées séparément, en Folio théâtre, Folio classique, ou aux Éditions Théâtrales – histoire de dire que la « préparation » semble bien avancée, et que ces deux volumes devraient bien paraître en 2016) « Les Joyeuses Commères de Windsor » (ou « Fiancées » ?), « La Nuit des rois », et surtout le volume des comédies romanesques, les « Romances » comprenant « La Tempête », « Cymbeline », « Périclès », « Le Conte d’hiver », « Troïlus et Cressida », et (en Appendice ?) « Les Deux Nobles Cousins ».
      Voilà pour ces deux volumes.
      Mais, par pitié, n’oubliez pas un 8e volume, après les deux des Tragédies, les deux des Histoires, et les trois des Comédies : celui des poèmes ! « Le Viol de Lucrèce », « Venus et Adonis », « Les Sonnets » ! Même s’il est probable que, même bilingue, ce volume ne dépasse que de peu la taille des volumes Villon, Hölderlin, Rimbaud, Lautréamont, Cendrars…, la précédente édition faisant précisément 692 pages (précise le site de la Pléiade), j’espère bien le voir paraître ! Ne serait-ce que pour comparer la qualité de la traduction choisie des « Sonnets » avec celle, que je trouve formidable, de Jean Malaplate (édition épuisée, il me semble, chez l’Âge d’Homme).
      Peut-être même que des « lectures » de Shakespeare pourraient trouver leur place dans ce volume, histoire d’augmenter le potentiel commercial d’un « tout poésie » ? Je préfèrerais de loin un véritable Album Shakespeare plutôt qu’un « volume augmenté », mais comme vous le dites si bien, l’édition est une entreprise, et si un volume de poésie peut trouver quelques acheteurs de plus par ce moyen…
      Il me tenait à cœur de préciser ce point tant Shakespeare, et ses contemporains, me tiennent à cœur.

      • Quelle déclaration d’amour pour Shakespeare, deniziotjimmy !
        J’ai le théâtre de Shakespeare dans l’édition bilingue parue chez Bouquins et ma foi, elle me semble satisfaisante.

        • Et je compte bien me la procurer un jour !
          D’ailleurs, elle fait se côtoyer comédies romanesques et poésies.
          Il me semble qu’on a pu trouver dans ces volumes Bouquins tout Shakespeare, dans des traductions nouvelles, ce qui n’est pas rien, bien après les éditions du Club Français du Livre, mais quand même bien avant la Pléiade (celle de l’époque resservait quelques traductions, pas inintéressantes, mais quand même problématiques, de François-Victor Hugo).
          Avec cette édition du Club de Shakespeare, et l’indépassable traduction de « Moby Dick » par Armel Guerne, qui dévoilait toute l’ampleur comique et documentaire de ce roman-monstre, j’aime à penser, moi qui n’ai pas connu, et même de loin, cette époque, que Le Club Français du Livre a permis un certain renouvellement des traditions.

  32. A moins que ces poésie ne trouvent leur place, précisément, dans le dernier volumes de Comédies : « Comédies Romanesques & Poésie » ?
    Je ne sais plus ce qui a été décidé, n’ayant pas encore feuilleté les premières pages du premier volume des « Comédies ».

    • L’oeuvre lyrique sera présente dans le 3e volume des comédies (c’est à dire le 7e volume) et non dans un volume séparé. D’après ce qui est dit dans la note sur la présente édition du premier volume des tragédies, CLIII.

  33. Cher Brumes. Vous avez parlé dans un post très récent de l’indisponibilité de certains volumes des œuvres de Charles Dickens dans la Pléiade. J’ai des informations de première main à vous communiquer sur cette édition.
    Grand admirateur de l’écrivain anglais, et ne possédant entre 2006 et 2014 que 5 des 9 volumes de Dickens parus dans la Pléiade, j’ai envoyé trois lettres au département de la Pléiade en l’espace de 6 ans pour leur demander quand seraient enfin republiés « Dombey », « Le magasin d’antiquités », « La petite Dorrit » et « Nicolas Nickleby ». Voici ce qu’ils m’ont répondu : « Nous réimprimerons petit à petit dans les années à venir », « Aucune réimpression n’est prévue cette année », et ainsi de suite. L’un de mes trois courriers est resté sans réponse.
    En 2013, pensant que les traductions toujours inaccessibles des romans de Dickens dans la Pléiade seraient peut-être susceptibles d’être reconverties en Folio-Classique, comme c’est souvent le cas chez Gallimard, j’ai envoyé un courrier au directeur de la collection (Jean-Yves Tadié) pour savoir s’ils pensaient publier prochainement dans leur collection « Dorrit », « Dombey », etc. C’est Blanche Cerquiglini, l’assistante de Jean-Yves Tadié, qui m’a très gentiment répondu au bout de quelques jours. Elle m’a dit qu’une édition de « Bleak House » était à l’étude en Folio-Classique, sous réserve de faisabilité. « Chacune de nos éditions est tirée à de très nombreux exemplaires, m’a-t-elle écrit. C’est la raison pour laquelle nous ne nous lançons pas à l’aveugle ». Ce qui est logique. Elle a raison.
    La librairie Gallimard du boulevard Raspail à Paris vendant parfois des albums Pléiade anciens restés sans acquéreurs, j’ai contacté ensuite cette librairie en leur demandant si des volumes de Dickens aujourd’hui épuisés étaient encore en stock dans leur réserve, voire dans les réserves de la maison d’édition même, située à deux pas de là. J’ai ajouté que leur prix serait le mien. Ils m’ont répondu au bout de sept jours que ma demande avait été « étudiée avec soin », mais « qu’ils ne pouvaient pas malheureusement y donner de suite favorable ».
    Quatrième et dernière remarque. Au sujet du Dickens en Pléiade, l’un de mes libraires m’a fait la remarque suivante. Elle est très intéressante. « Gallimard ne vend que quelques dizaines de Pléiades Dickens par an. Oui, par an, pas par mois. Encore très abondant au début des années 80 – c’est la raison pour laquelle les derniers tirages de « Nickleby » et de « Dorrit » datent de cette époque -, le lectorat français de Dickens s’est ensuite effondré au fur et à mesure qu’a disparu peu à peu la dernière génération qui s’intéressait à lui. Aujourd’hui les Français ne lisent plus Dickens. Seule exception, et de taille : les jeunes. Ils regardent d’abord à la télévision ou en DVD les téléfilms anglais qui adaptent à l’écran les romans de Dickens, puis ils achètent les romans en librairie. Le problème, c’est qu’ils ont peu de moyens : à chaque fois que je propose à l’un d’entre eux un volume de la Pléiade, ils disent que c’est trop cher, et qu’ils le liront plutôt en bibliothèque. Par contre ils achètent folios et livres de poche, tout en se plaignant par exemple que « La petite Dorrit » soit introuvable nulle part… »
    Moralité : pour la Pléiade, c’est fini, il n’y a plus de public, et pour de longues années encore, pour Dickens. Ceux qui disposent de revenus suffisants pour acheter des volumes de la Pléiade dédaignent Dickens (« David Copperfield » excepté, car maintes fois réimprimé), et ceux qui lisent Dickens avec boulimie (les jeunes) n’ont pas de revenus suffisants pour acheter des Pléiades. Bref, le cercle vicieux.
    Jugeant pour ma part que les 4 volumes manquants seront encore indisponibles pendant des années et des années, j’ai pris sur moi de les chercher dans les meilleures librairies d’occasion. Une chance inouïe m’a permis au bout d’1 an de tomber par hasard sur deux volumes de « Dorrit » et du « Magasin » qui n’avaient jamais été lus (voire même jamais ouverts) et qui étaient aussi neufs qu’un volume de « La maison d’âpre-vent » que l’on peut encore acheter en librairie aujourd’hui. Et, comme l’actuel tirage de « La maison d’âpre-vent », mes deux trouvailles avaient elles aussi été publiées en 1979. Bref un miracle. Je les ai achetés immédiatement.
    Bonne semaine à tous.

    • Merci pour votre passionnante enquête que j’ai lue avec grand plaisir. Ma réponse sera plus courte. Elle confirme ce que je pensais depuis un moment à propos de Dickens (et je sais que d’autres volumes que les siens sont dans la même situation). Je possède les 4 Dickens « disparus » que j’ai pu récupérer d’occasion, l’un à petit prix lors de la dispersion de la collection de Pléiades de Régine Deforges (Le Magasin d’Antiquités), les trois autres sur ebay, au fur et à mesure, pour des sommes honnêtes (30/40€) (Nicklas Nickelby est un peu usagé, Dombey et Fils en état normal et La Petite Dorrit est dans un état parfait (exemplaire jamais ouvert par son propriétaire – ce que j’appelle les Pléiades de distinction)). Généralement, La Petite Dorrit/Conte de deux villes se négocie à des prix prohibitifs (souvent autour de 100€), Dombey peut monter très haut aussi, c’est moins le cas du Magasin d’Antiquités et de Nickleby.
      J’ai bien fait de collecter ces volumes d’occasion. Il me manque encore trois Dickens (L’Ami commun, Âpre-Vent et Boz).
      En l’état, je possède presque tous les Pléiades épuisés du catalogue (sauf le double volume Théâtre du XVIIIe, introuvable à prix honnête, le deuxième tome de la Correspondance de Stendhal et les deux volumes médiévaux – 19 sur 24 donc) et certains indisponibles de longue date (les Dickens, Fielding, Defoe « Moll Flanders ») ou depuis peu de temps (les romans chinois).
      À mon avis, parmi les menacés-qui-ne-se-vendent-plus : la Correspondance de Voltaire, Julien Green, les trois volumes du théâtre du XVIIe (point trop coûteux, il vaut mieux vous les procurer vite si vous les voulez), Martin du Gard, les deux derniers Sainte-Beuve encore sur le marché (Port-Royal II et III), Corneille (aussi incroyable que ça puisse paraître, il n’a pas eu du tout le succès attendu), Malebranche, les Journaux de Tolstoï, France, Vallès, peut-être Saint-François de Sales, Mauriac et Fénelon aussi… (liste non exhaustive).

      PS : et Gobineau…

  34. Brumes, merci beaucoup pour votre réponse.
    En effet, se procurer sur Internet des volumes de la Pléiade épuisés va devenir de plus en plus une nécessité pour les amateurs de la collection (malgré les risques très réels de tromperie sur la marchandise, de photos frelatées et de refus des retours ; on m’a rapporté des cas stupéfiants à cet égard). Comme vous le dites très bien, on sent qu’Hugues Pradier et son équipe se posent des questions sérieuses sur la survie de telle ou telle série de volumes (Green étant un symbole à cet égard, du moins un symbole parmi d’autres). Le libraire que j’ai évoqué tout à l’heure m’a parlé de toute façon un jour de « l’inquiétante érosion des ventes de la Pléiade » – ce qui, comme vous l’avez justement pressenti, amène désormais l’équipe de la Pléiade à parier sur des volumes courts (D’Ormesson, Cendras…), sur un seul volume, ou deux, plutôt que sur trois (Woolf, qui en plus ne se vend pas), et sur la littérature anglo-saxone, très à la mode (Twain, et sans doute prochainement Dos Passos, Jean-Yves Tadié, qui fait partie du comité de lecture de la Pléiade avec Philippe Sollers, Hugues Pradier et Antoine Gallimard, ayant dit dans la presse l’an dernier qu’il relisait beaucoup Dos Passos en ce moment, ce qui à mes yeux est un signe intéressant).
    Dans un post plus lointain, j’ai parlé rapidement d’un projet Saikaku en cours à la Pléiade. Après avoir trouvé de nouvelles informations ici et là, je suis désormais convaincu que le projet a été définitivement abandonné. En 2005, Daniel Struve proclamait que les deux volumes étaient en cours de rédaction par Paul Akamatsu et Jean-Noël Robert. Or, je viens de le découvrir, en 1999 le projet avait déjà été confié à Jean Cholley. 16 années en tout, et les volumes ne sont toujours pas là, avec au surplus un changement au niveau de la direction du projet, ce qui n’est jamais un bon présage. Au demeurant, ni Robert ni Akamatsu ne mentionnent un projet Saikaku dans leur CV. Enfin, la littérature japonaise du XVIIe siècle ne se vend plus : Philippe Picquier a le plus grand mal à écouler ses propres exemplaires de Saikaku, et Gallimard ne prend plus aucun risque dans ce domaine depuis les années quatre-vingt. Considérons donc que Saikaku ne paraîtra jamais dans la Pléiade : c’est du passé.
    Bonne semaine à tous.

  35. Bonjour,
    Je suis très impressionné par les précisions de vos informations glanées ici et là. Dans certains cas, il faut beaucoup de patience pour puiser des renseignements sur tel ou tel site où des sommités universitaires s’expriment. Bravo.
    Mon intervention, en revanche, est des plus banales. Elle concerne des idées de titres que la Bibliothèque de la Pléiade a, à ma connaissance, toujours ignorés. Par exemple, pour se limiter aux recueils collectifs :
    — Poètes parnassiens
    — Romantiques anglais
    — Romanciers populaires du XIXe siècle
    — Écrivains scientifiques du XIXe siècle
    Mais peut-être cela n’est-il pas suffisamment vendeur !
    Enfin, je rejoins totalement l’un de vos correspondants en déplorant la quasi absence de mise à jour, sur le site de la Pléiade, des Questions des lecteurs. Dans bien des cas, cela permettrait de satisfaire la curiosité insatiable des admirateurs inconditionnels (ou presque) de cette prestigieuse collection.
    Merci encore.

    • Cher Toirap. Partir à la recherche d’indices permettant de conclure que tel ou tel volume de la Pléiade paraîtra dans un proche ou un lointain avenir est en fait d’une simplicité enfantine. Il suffit d’utiliser Google (le meilleur moteur de recherche pour ce genre de quête) et de taper des mots clefs tels que : « Pléiade à paraître » , ou bien « Pléiade préparation ». Une fois les résultats apparus sur votre écran, il faut procéder à la manière d’un chercheur d’or qui tamise eau et terre afin de pouvoir repérer un grain d’or. Lorsqu’il vous semble avoir repéré un CV d’universitaire, vous cliquez et vous le consultez. Les projets Pléiade en cours apparaissent alors, souvent en détail.
      Par contre c’est une recherche longue. Il faut plusieurs heures pour obtenir une douzaine de renseignements fiables.
      Pour finir, je me permettrai juste de commenter vos très intéressantes suggestions.
      Connaissant la politique actuelle de la collection, les poètes parnassiens (Heredia, Prudhomme, Leconte de Lisle…) ne paraîtront malheureusement jamais dans la Pléiade. Le directeur de la collection, Hugues Pradier, a déclaré il n’y a pas si longtemps encore que la poésie en Pléiade ne se vendait plus (sauf très rares exceptions, comme Rimbaud). Déjà dans les années 80 Marguerite Yourcenar avait voulu faire de ses recueils de poèmes et éditions critiques de poèmes un volume Pléiade à part. Claude Gallimard lui avait répondu que, la poésie ne se vendant plus que très peu, ce genre de publication était impossible, faute d’amortissement assuré. Et, pourtant, à l’époque, Yourcenar était indubitablement l’écrivain à la mode ; elle vendait beaucoup, touchant par là même des droits d’auteur considérables. N’importe : concernant les poètes parnassiens, une fois consultée sur le sujet, la direction de la Pléiade vous répondra que quelques poèmes parnassiens se trouvent déjà dans leur « Anthologie de la poésie française » en deux volumes (!).
      Pour les romanciers populaires du XIXe (comme Sue), la collection considère qu’ils ne sont pas assez « smarts » pour elle. Pour quelques-uns, ils sont déjà publiés par « Bouquins », chez Robert Laffont, et, la Pléiade étant assez snob, ce qui est parfois publié par « Bouquins » est indigne, selon elle, de figurer dans son propre catalogue. Dans une interview récente, à un journaliste qui lui faisait remarquer que la Pléiade était au final équivalente à « Bouquins », Antoine Gallimard, vexé, a répondu en substance que c’était comparer l’incomparable (!).
      Pour les romantiques anglais et les écrivains scientifiques du XIXe, je ne peux pas me prononcer, ne les ayant pas lus.
      Bonne semaine à tous.

      • Rapidement et en passant, concernant les romantiques anglais, Gallimard vous dira d’aller voir du côté des deux volumes de Sir Walter Scott puis de piocher dans l’Anthologie bilingue de la poésie anglaise :
        -> William Cowper y a 10 pages
        -> William Blake 22
        -> Robert Burns 12
        -> William Wordsworth 30
        -> Walter Scott 10
        -> Samuel Taylor Coleridge 30
        -> Lord Byron 22
        -> Percy Bysshe Shelley 26
        -> John Keats 26
        Soit près de 200 pages. Il ne faut pas se faire d’illusion, le théâtre de Byron (publié aux Éditions du Sandre, le volume 1 commence à être difficile à trouver ; on en trouve aussi en Folio), les écrits de Coleridge, de Shelley (trois volumes aux mêmes Éditions du Sandre) ou de Wordsworth n’ont aucune chance d’être un jour publiés à la Pléiade dans un autre volume que dans cette anthologie. Il me semble peu probable, en outre, qu’un troisième volume de romans de Sir Walter Scott soit publié un jour.

  36. Je suis un « petit nouveau »… Je viens – seulement ! – de découvrir et de lire in extenso TOUS les commentaires… J’en sors épuisé et ravi (enfin, pas toujours ravi, bien entendu, chaque fois que vous contestez la « légitimité pléiadesque » de mes chéris, comme Jules Verne – comment osez-vous ! – je verse une larme).
    Pas grand chose d’original à dire pour l’instant, sinon que, comme la plupart, je commence à être saturé d’auteurs anglo-saxons, même fort estimables voire éminemment respectables, et me lamente sur l’insuffisance d’Italiens et d’Allemands (une incroyable lacune) et de Japonais (proprement scandaleuse). Quand à Monsieur d’Ormesson, je préfère en rire comme de la meilleure blague de l’année !
    Par contre, quelle joie de voir arriver Virgile ! Enfin je vais pouvoir relire ce grand auteur dont je n’ai que des souvenirs de l’âge du lycée, en un volume agréable à la main et aux yeux, comme à l’esprit… Je viens justement de relire Homère et en suis encore ébloui.

    • Je partage votre sentiment sur Verne!! C’est un grand écrivain, et ce n’est ni Gracq ni Perec qui diraient le contraire.
      Concernant d’Ormesson… J’attends toujours de voir une réaction d’acheteur potentiel de Pléiade qui ne trouve pas ça au mieux risible, au pire scandaleux. Qui va acheter ce machin? Sérieusement. Des neveux un peu friqués mais pas très au fait de la littérature qui vont faire des cadeaux de Noël à leurs tontons en se disant que puisque ceuxi-ci sont abonnés au Fig Mag, ce doit être le cadeau idéal…? à par ça…

      • On peut quand même dire que la Pléiade attire des acheteurs – et je ne parle pas forcément de lectorat – de droite entre Drieu La Rochelle il y a peu et maintenant un chroniqueur du Figaro,..
        Je mets de Gaulle à part, on peut lui trouver un intérêt littéraire et une certaine valeur historique.

  37. A propos des évolutions de la collection, il me semble bien voir se multiplier les coffrets, qui offrent deux volumes sous une sorte « d’emballage cadeau » séduisant… Dans quelques cas ce coffret suffit à représenter l’ensemble d’une oeuvre qui n’est pas très abondante, d’autres fois il s’inscrit dans la publication au long cours d’une oeuvre de grande ampleur, et son utilité paraît alors fort contestable, mais – et c’est là la dernière tendance à l’intérieur de la dernière tendance – on pressent qu’il s’agit d’un choix qui n’aura pas de suite : on hésite alors à le considérer comme une « porte d’entrée » invitant à découvrir ensuite le reste de l’oeuvre ou comme une « porte de sortie » décourageant d’aller voir le reste et conduisant à se contenter de ce choix qu’on pense représentatif et suffisant (la « substantifique moelle » ?). J’ai pris plaisir à certains de ces coffrets, mais il m’arrive d’être assez dubitatif et frustré.
    Mais, finalement, toutes ces évolutions prouvent que La Pléiade est un être vivant, autant donc s’en réjouir.

    • Dominique Szenes, je suis entièrement d’accord avec vous lorsque vous qualifiez de « blague de l’année » l’entrée imminente de D’Ormesson dans la Pléiade (et je présente mes excuses, au passage, aux admirateurs de l’écrivain que je froisse par la même occasion…).
      Ceci dit, il ne faut pas oublier une chose. Et elle est importante. Le principal point fort de D’Ormesson, c’est son aisance dans les différents médias (télévision, radio, presse écrite… on peut même parler de familiarité). D’Ormesson a véritablement un don pour assurer la promotion de ses livres, les faire connaître et, par conséquent, les vendre. Les téléspectateurs et les auditeurs le lui rendent d’ailleurs bien en louant sans cesse l’espèce de charme et de vivacité de ses diverses interventions. Il est impossible que Gallimard ait parié sur un volume de la Pléiade rassemblant certains de ses livres sans avoir eu en tête cet élément clef. Ce qui veut dire que, une fois le volume paru, D’Ormesson, qui ne se sentira plus de joie – parce qu’il a attendu ça pendant des décennies -, D’Ormesson, donc, ira trompeter dans tous les médias possibles et imaginables qu’il fait désormais partie d’un catalogue qu’il vénère. Une telle promotion assurera des ventes sans doute importantes, comme l’aura prévu la direction de la Pléiade.
      Mais il y a plus – et, lorsque j’ai appris que D’Ormesson entrait dans la Pléiade, j’ai immédiatement pensé que c’était là la raison principale de sa pléiadisation.
      Quelques années après la publication des Mémoires du général de Gaulle dans la collection, Antoine Gallimard a fait à un journaliste cet aveu surprenant. En substance, cela revenait à ceci : « Je suis convaincu que la parution des Mémoires de guerre de De Gaulle dans la Pléiade a permis de faire connaître notre collection à des gens qui jusqu’ici n’avaient pas l’habitude de nous acheter des volumes de temps à autre. » Ce qui veut dire qu’en même temps qu’il a fait paraître dans la Pléiade un texte que, sans doute, il admirait, Antoine Gallimard savait très bien que cette publication allait attirer l’attention de nouveaux lecteurs, et ainsi permettre la vente de nombreux volumes supplémentaires.
      Pour D’Ormesson c’est exactement la même chose. La direction de la Pléiade va profiter de l’aura médiatique considérable de D’Ormesson pour attirer l’attention de nouveaux lecteurs sur une collection qui va de plus en plus en mal. Gallimard vend autant de volumes de la Pléiade qu’il y a 25 ou 30 ans environ, mais avec un nombre de nouveaux auteurs inscrits au catalogue qui a beaucoup augmenté dans l’intervalle – ce qui signifie mécaniquement que chaque nouvelle ou ancienne édition de la Pléiade se vend de plus en mal au fur et à mesure que le temps passe.
      Bref, faire entrer D’Ormesson dans la Pléiade avec grand bruit (celui-ci se chargeant personnellement de créer ledit grand bruit), c’est montrer du doigt la collection à plusieurs dizaines de milliers de lecteurs qui, jusqu’ici, en ignoraient l’existence, ou bien la connaissaient très mal. Et l’on se demande si, au fond, pour la Pléiade, ce genre de manœuvre ne devient pas tout simplement une question de survie.
      Bonne semaine à tous.

      • Fort juste. Je l’avoue, ma réflexion n’était pas allée jusque là. Ma petite « sortie » sur Jean d’Ormesson ne se voulait d’ailleurs pas méchante. L’effet prescripteur de la Pléiade n’est pas assez puissant pour m’obliger à acheter tous les volumes (je n’en aurais, de toute façon, pas les moyens). Je suis sensible, comme (presque ?) tout le monde au « charme » du causeur d’Ormesson, mais n’ai jamais lu un de ses livres, donc mon « jugement » est un simple préjugé. Son brillant léger à l’oral me décourage d’aller voir ce qu’il vaut à l’écrit.
        Nous avons tous nos favoris, lorsqu’il s’agit des contemporains pour qui la postérité n’a pas délivré son verdict (pas sûr d’ailleurs que les jugements posthumes soient plus sûrs que les jugements anthumes) ; si, par exemple, je défend la présence de Boris Vian, je n’ai pas trouvé essentielle la présence de Milan Kundera : à mes yeux, sa pensée ou la qualité de son écriture ne se situent pas plus haut et ne me paraissent pas plus durables que celles de Jean d’Ormesson. Et Philippe Jacottet ! Avez-vous essayé de le lire ? Des réflexions fort ordinaires, pour ne pas dire moins, élégamment dites… Par contre, Pérec, je suis preneur…Après tout, j’ai eu (jadis, hélas) un professeur de Français qui déclarait que « Saint-Exupéry n’était pas un écrivain »…
        Plus intéressant le constat d’une certaine « inflation » de titres, et notamment d’auteurs du XXème siècle, pour une moindre vente par volume. C’est l’évolution classique de toute l’édition (elle a même atteint le domaine de la bande dessinée qui faisait figure naguère de mine d’or pour les éditeurs). Je me demande si l’entrée ou la prochaine entrée dans le domaine public de certains auteurs ne joue pas son rôle ? L’expression « tomber » dans le domaine public m’amuse.

        • Cher Dominique Szenes,
          merci pour vos messages. Nous sommes bien d’accord qu’il y a des lacunes dans cette collection et que l’évolution des attentes (qu’elles soient d’ordre sociologique, économique, symbolique) de son public rend de plus en plus improbable la concrétisation de projets littérairement légitimes mais commercialement condamnés (la poésie de Goethe, les théâtres de Brecht ou de Strindberg, les écrits mésopotamiens, une anthologie de poésie latine, les œuvres de T.S.Eliot, Chaucer, le romantisme anglais, Huysmans, etc.). En outre, comme vous l’avez remarqué, la mode est aux doubles volumes légers (les coffrets notamment) et plus aux séries de 5, 6 ou 7 volumes d’un même auteur. Résultat, comme pour le Twain à venir, on y trouvera bientôt moins de textes que dans les éditions publiées par Bouquins, un comble ! Si Gallimard fait cela, on sait bien pour quelle raison : c’est que les volumes III, IV, V ou VI d’une série se vendent moins bien que les I et II (il suffit de regarder, sur le marché de l’occasion, comme il est plus aisé de trouver Giono I, Conrad I, Colette I ou Balzac I que Giono IV, Conrad V, Colette IV, Balzac XI, signe d’une meilleure diffusion des premiers…). Plutôt que de vendre des œuvres en 6 volumes à 50€, dont 4 se vendent mal, La Pléiade vend en 2 volumes de 70€… Et demain en un épais volume à 90€ ?
          (je le dirais en latin si je le pouvais : heureusement Virgile vient…)
          (et puis je ne veux pas paraître trop pessimiste, après tout les volumes de Buffon, de Khaldûn et de Pline sont sortis récemment)
          Concernant Jaccottet, j’entends vos doutes, je ne les partage pas entièrement. Je me permets de vous signaler, en passant, que j’ai commenté sur ce blog son seul « roman », une forte intéressante méditation sur le désespoir et sur la possibilité de l’espérance (je vous laisse chercher sur le site si jamais ça vous intéresse – onglet « Tout le blog en une page »). Pour sa poésie, je suis plus dubitatif, tant elle me paraît marquée par sa « secondarité » (influence de Roud, influence de Rilke, influence d’Ungaretti, influence de Hölderlin, influence de Bonnefoy (?), puis influence des Haïkus). Elle a le mérite d’une certaine originalité dans le choix de ses référents poétiques (pour un Francophone s’entend), mais point trop dans celui de sa forme (quoique, à l’époque peut-être ?). Je vous dis cela de mon petit point de vue, sans vouloir vous faire de quelconque leçon, après tout je n’ai lu qu’un gros tiers du Pléiade à lui consacré (et qui m’a plutôt plu).
          J’aurais certes préféré un volume consacré à ceux qu’a traduit Jaccottet : Musil, Ungaretti ou, mieux, à la poésie italienne du XXe (que l’Anthologie bilingue néglige presque entièrement, hélas), mais je suis réaliste..
          Pour d’Ormesson, qu’en dire de plus – à vous qui avez eu l’héroïsme de relire nos échanges ? Tous ceux qui le connaissent sans le lire ont les mêmes préjugés que vous (et que moi) : individu sémillant, amuseur public cultivé, intelligent, séduisant, drôle, conservateur heureux, et pas ronchon à la Millet-Finkielkraut, sorte de témoin d’un passé révolu (y compris socialement et symboliquement, notez sa diction et sa syntaxe remarquables, c’est devenu très rare, même sur F.Culture, où l’on ne sait même plus articuler (M.Voinchet), faire une liaison ou utiliser une interrogative indirecte). Mais tenus par nos préjugés, nous ne pouvons décemment le lire (un auteur qui passe (bien et souvent) à la télévision, c’est sale par principe – enfin pour moi, c’est un motif de disqualification immédiate et perpétuelle, il est inconcevable d’aller sur un plateau de télé sans déchoir). D’Ormesson incarne le grantécrivain français auprès des gens qui ne lisent pas (ou très peu) ; comment pourrait-il être un auteur sérieux ? Et de ce fait, la plupart des gens qui, comme moi, lèvent les yeux au ciel quand ils pensent au fait que d’Ormesson sera pléiadisé bientôt, ne l’ont pas lu, ne le lisent pas et ne souhaitent pas le lire. C’est un peu paradoxal.
          Je crois toutefois qu’il y aura un peu de polémique… On verra s’il persiste un certain sens des hiérarchies littéraires dans ce pays – je prédis quelques articles persifleurs dans la presse. La gauche littéraire s’insurgera, comme notre ami Kyat le suggère, de voir encore un auteur de droite au palmarès de la Pléiade (ce n’est pas nouveau la collection a toujours plutôt penché de ce côté-là de l’échiquier, Montherlant, Giono, Aymé, Malraux, Green, Céline, Mauriac, Claudel, etc. sont là pour le prouver pour n’évoquer que des auteurs du XXe) ; les universitaires souriront de voir un auteur aussi « archaïsant » au catalogue (quand ils se sont félicités hautement de l’entrée récente de Cl.Simon et de M.Duras) ; la presse se gaussera, gentiment, car l’homme est sympathique, bien élevé, souriant et il n’est personne dans les journaux qui le haïsse au grand jour ; quelques-uns, persifleurs, s’étonneront qu’on fasse entrer d’Ormesson avant le grantécrivain maison Phillippe Sollers (y aura-t-il droit un jour ?) et enfin le grand public cultivé se divisera en fonction de son âge en pro- et en anti-.
          Cette entrée interpelle…C’était le cas, me direz-vous de celles de Simenon, de Vian, de Prévert ou de Verne. Seulement, pour ceux-là, s’était joué un autre affrontement, plus « actuel », avec, sous-jacente, cette question : « la littérature populaire est-elle légitime ? ». Car quoi qu’on pense d’eux, Simenon, Vian, Prévert ou Verne sont des auteurs populaires, lus (à l’époque de leur gloire) par de larges segments de la population, et sans véritables ambitions poético-littéraires. Jamais Simenon, Vian ou Verne ne se sont pris pour Céline, Sartre ou Hugo. Et je crois qu’une des défenses de Gallimard était de dire que la littérature populaire avait sa place au « Panthéon », quitte à se positionner en opposition avec le snobisme traditionnel des élites littéraires françaises (théorie sociologique dite « d’Iribarne » : notre société est structurée par le vil et le noble) : c’est là une position qui a de grandes chances d’être entendue dans une société dont la hantise de plus en plus affichée est l’élitisme, jugé comme intolérable (et qui constitue précisément un des fonds de commerce historiques de la collection, régime de distinction sociale à elle toute seule). Gallimard pouvait, par un volume Prévert (se lit-il encore, le poète préféré des instituteurs de cours élémentaire ?), ou Vian, ou Simenon, se dédouaner de l’accusation d’élitisme symbolique auquel s’expose par principe la Pléiade (et qui fait sûrement beaucoup contre elle ces dernières années)
          Mais peut-on dire que d’Ormesson est un auteur populaire injustement décrié ? Qu’il permet de corriger l’image élitiste de la collection ? N’est-il pas plutôt une sorte de fossile vivant (comme le cœlacanthe ou la limule ?), témoin d’une époque littéraire disparue, ce que pouvait être Georges Duhamel en 1965 ? Henry Bordeaux en 1961 ? Francis Jammes en 1937 ? Ou, pire, Henri Troyat en l’an 2000 ? Vous savez, ces écrivains qui ont survécu à leur œuvre, morte avant eux… Pour moi, c’est un peu ça. D’Ormesson pléiadisé, c’est un peu comme si on vous donnait une machine à remonter le temps. Vous partez en France, en 1946, et au lieu de vous précipiter à Combat pour rencontrer Camus, ou aux Temps Modernes pour voir Sartre et Beauvoir, aux Lettres Françaises pour voir Aragon, ou encore, en anticipant un peu, aux Éditions de Minuit, chez Nathalie Sarraute ou chez Isidore Isou, eh bien, non ! Vous foncez à Nice pour aller rencontrer Maeterlinck, qui meurt l’année suivante et qui littérairement était fini depuis 25 ans…

  38. Mais qui êtes-vous ? Un groupe, un super-héros des Lettres ?… Comment pouvez-vous livre autant de livre, chroniquer autant d’ouvrages, répondre si rapidement, abondamment et judicieusement ?… (Suis-je assez flagorneur ?) En tous cas, il arrive une chose terrible : je suis déjà accro à votre blog (je préfère accro au vilain addict à la mode). Bon, gardez votre mystère, quelqu’un qui se fait appeler « Brumes » ne peut que m’intéresser…
    Pour le reste, il est évident que, tous ici, rêvons NOTRE bibliothèque idéale et que ce ne peut être celle de Gallimard… L’échange est passionnant et utile, l’expression des désirs et des critiques également, mais, in fine, nous devons bien nous contenter de ce qui est possible, dans les conditions réelles du monde de l’édition. Il n’empêche… nous continuerons à réclamer des Allemands et des Japonais, non mais !

  39. Cher Brumes (à vous lire, quel nom fameux se cache sous ce pseudonyme ?), voici quelques résultats de recherches qui pourront vous amuser, vous et vos commentateurs :

    Dans un magazine intitulé « Écrivain magazine », datant de décembre 1997 et qui peut-être n’existe plus, se trouvait un très long article intitulé « Les secrets de la Pléiade ». Outre les commentaires habituels, j’ai relevé la réponse d’Antoine Gallimard à la question : Quels auteurs pourraient être intronisés prochainement ? et dont j’extrais une partie (les pointillés remplacent les auteurs parus depuis) :
    « … Quasiment certain : … Alejo Carpentier… Dans un autre registre, celui du roman policier, j’estime que l’arrivée de Raymond Chandler serait très bénéfique pour l’image de la Pléiade. Il conviendrait aussi que nous rattrapions notre retard du côté des philosophes. »
    Et Dieu sait si, dans le domaine de la philosophie, le retard est toujours important !

    Par ailleurs, pour l’anecdote, et pour remonter beaucoup plus loin, vers la fin des années 1960, dans un catalogue de la Pléiade (alors réduit à quelques pages ne donnant que la liste des auteurs et les titres de volumes), j’avais relevé (si ma mémoire ne me joue pas quelque tour) dans la rubrique « À paraître » : le « Théâtre complet » de Balzac, l' »Histoire de France » de Michelet et l’ensemble des « Romans » de Dumas.
    Évidemment, il n’était pas question, à l’époque, d’auteurs contemporains… à part quelques sommités que l’histoire officielle de la littérature française ne pouvait passer sous silence.

    Vous laissant sourire à l’évocation de ces vieux souvenirs, je vous souhaite à tous une bonne journée, puis une bonne soirée de lecture… de livres de la Pléiade, bien sûr.

  40. Bonjour Brumes, bonjour à tous, je vous donne une information (exclusive peut-être ?) : le tome IV des Œuvres complètes de Flauvert est achevé et rendu. ( Il contient une «nouvelle édition» passionnante par P.M. De Biasi de «L’Éducation sentimentale») Est-ce que ce volume sortira en 2015? Possible…
    Brumes vous pouvez commencer vos prévisions de publication…
    Je vous donne un nom d’écrivains comme ça, au hasard, si vous devinez… : John Stenbeick. C’est une bonne nouvelle je trouve.

  41. Bonjour à tous. La publication du tome III des Oeuvres diverses de Balzac est hautement improbable. Le responsable de l’édition, Roland Chollet, est mort et personne dans l’actuelle communauté balzacienne ne semble, me dit-on, en mesure de le remplacer. Le dernier volume de la correspondance de Balzac, en revanche, a été remis à l’éditeur depuis deux ans maintenant (bon à tirer signé). Le responsable de l’édition, Roger Pierrot, est mort il y a quinze jours, à près de 95 ans. Il n’aura donc pas vu la fin de la publication de l’entreprise de sa vie (reprise actualisée et améliorée d’une première édition de la correspondance en 5 gros volumes des Classiques Garnier dans les années 70). Mais le volume existe bel et bien. Manque seulement le feu vert de Gallimard. Parution estimée dans les deux ans qui viennent.

    • Cher Monsieur, je vous remercie chaleureusement de cette double information (Balzac OD III et Correspondance III). Elle fera partie de la mise à jour de ma page consacrée à la collection.

  42. Pour nourrir vos mises à jour et pour vous remercier de pallier quelque peu, par votre initiative, les insuffisances, volontaires ou involontaires, du site de la Pléiade… Le volume Perec ne comprendra pas les oeuvres posthumes : 53 Jours et Le Condottiere ne seront pas recueillis. C’est dommage mais pas très grave non plus. Il est annoncé pour 2016. Notes et notices ont toute chance d’être de tout premier plan… Le volume « Aimé Césaire, Léon Gontran Damas et Léopold Sedar Senghor », annoncé, il y a presque dix ans, comme un geste politique fort, n’a jamais vraiment été lancé, paraît-il. Il pourrait néanmoins voir le jour à l’avenir sous une autre forme : un volume monographique consacré à Senghor. Ce qui serait une bonne chose. Le chantier Simone de Beauvoir est tout récent mais déjà sur de bons rails : il porte sur les écrits autobiographiques (la suite des mémoires et quelques écrits annexes). En ce qui concerne la poésie d’Apollinaire, il ne s’agit pas d’une réédition ou d’une mise à jour mais d’une nouvelle édition. Elle n’est pas loin d’être achevée, je crois. L’entrée de Gary en Pléiade, évoquée depuis longtemps, plusieurs fois abandonnée, est désormais en bonne voie : deux volumes sont prévus, recueillant l’essentiel de l’oeuvre romanesque. Il ne faut pas l’attendre avant trois ou quatre ans.

    • Merci encore pour ces nouvelles informations, qui confirment donc le bon avancement des projets Gary et Beauvoir. Je subodore, d’ores et déjà, que les jeux de deux tomes publiés par Gallimard pour Beauvoir et Gary sortiront en une fois, assortis d’un album.
      Je me doutais que les écrits posthumes de Perec ne seraient pas publiés. Je suis plus étonné, en revanche, que le volume « Négritude » ne soit pas du tout avancé. J’avais l’impression que l’annonce avait été suffisamment claironnée pour garantir la réalisation du projet.
      Je tiens à préciser que j’avais bien compris que la réédition d’Apollinaire serait une nouvelle édition. Dans mon esprit, et c’est peut-être insuffisamment clair sur ma page récapitulative :
      -> retirage = réimpression = édition inchangée mais réapprovisionnée chez les libraires
      -> réédition = nouvelle édition, donc volume différent de l’ancien (par exemple, récemment, le Théâtre de Claudel ou la Poésie / Théâtre de péguy).
      Donc quand je parle de réédition, j’entends bien évidemment une nouvelle édition. Le TLFI accepte d’ailleurs les deux sens : « Action de rééditer; édition nouvelle. » Si c’est trop ambigu, je corrigerai cela (ou le préciserai) dans la mise à jour de la page (d’ici quelques jours, je pense, j’ai déjà quelques évolutions à y apporter, elles seront probablement signalées de manière très visible dans la présentation de la note (couleur différente, italique + gras ?), afin que les lecteurs n’aient pas à fouiller l’intégralité de la page pour trouver une petite information nouvelle.

  43. Non, non, votre page récapitulative est très claire, n’ayez crainte ; c’est moi qui l’ai consultée trop rapidement. Il est vrai que je parle plus volontiers de « nouvelle édition », comme d’ailleurs l’équipe éditoriale de la Pléiade — c’est la terminologie consacrée, qui a le mérite d’éviter toute ambiguïté. Mais pourquoi ne pas parler de réédition, en effet… Pour ce qui est du volume « Négritude », il est probable que les milieux de la francophonie ont considéré qu’un volume monographique aurait une portée symbolique plus grande qu’un volume anthologique, qui pouvait passer pour une demi-mesure. La question a dû dès lors se poser de l’auteur à consacrer… Ce n’est qu’une hypothèse. Ce qui est certain, c’est que le projet est en panne, ce qui est, en effet, assez surprenant, au regard de l’effet d’annonce initial.

  44. Pour les écrivains de la Négritude, certes, des volumes séparés seraient infiniment plus judicieux que cette anthologie (des trois auteurs) qui reflétait une idéologie des années 60 de l’autre siècle.
    Quoique: il existe une excellente édition de la poésie de Senghor aux Editions du CNRS.
    En revanche, une édition des œuvres complètes de Césaire (poésie, théâtre, textes en prose, un choix de discours) serait infiniment bienvenue, nécessaire, ferait un beau volume, qui aurait le mérite de se vendre bien, notamment auprès des universités américaines…
    A noter qu’il existerait (je le tiens d’un des collaborateurs des romans et des poésies d’Aragon en Pléiade) un projet d’ « Œuvres autobiographiques » d’Aragon… A confirmer. Mais c’est une tendance récente de la Pléiade, l’autobiographie, c’est « vendeur »: voir Cendrars (bientôt Beauvoir), et aussi Sartre, où des œuvres plus ou moins (plutôt moins que plus) autobiographiques ont été sommées de se glisser à la suite des « Mots »…
    Pour finir, bravo pour ce blog que je viens de découvrir (et que j’ai ouvert, juste pour savoir si la suite de Casanova allait venir ou non). J’ai été comblé.

    • Je vous remercie, Monsieur, pour votre gentil compliment.
      Vous avez dû justement voir que j’ai consacré récemment une page spéciale (et factuelle) aux sorties à venir / rééditions de la Pléiade (voir onglet au-dessus de la bannière). J’espère qu’elle sera utile à tous les amateurs de la collection, qui, comme moi, ont souvent de la peine à trouver des informations utiles et à jour.
      Je vous remercie aussi, d’ailleurs, pour votre contribution (ce possible volume consacré aux « Œuvres autobiographiques » d’Aragon), même si la publication ce volume est encore, je l’ai bien compris, à mettre au conditionnel. La mode est effectivement aux écrits autobiographiques. Pour Aragon, Gallimard ayant publié en Pléiade toute la poésie et tous les romans, il y aurait tout de même une logique à proposer cet autre volume (même si je ne connais pas assez Aragon, dont j’ai néanmoins lu quelques romans, pour saisir quels textes il pourrait regrouper).
      Vous évoquez une édition de la poésie Senghor aux éditions CNRS, mais j’avais justement en tête un très fort volume consacré à Césaire par ces mêmes éditions :

      Bien à vous.

  45. Bonjour à vous,
    Je ne sais si je dois écrire ici ou sur l’autre page que vous avez mis en place à cet effet; je suis un lecteur assidu de cette petite « chronique » de la Pléiade qui, vous avez raison de le souligner, est ce qui se fait de plus précis en matière d’hypothétiques mais probables publications.
    J’avais juste une question à vous poser, qui me taraude depuis quelque temps et que je n’ai pas vu surgir parmi vos commentaires; peut-être avez vous réponse à cela..
    Au vu de la publication de son contemporain Philippe Jaccottet dans la célèbre collection, parle-t-on et peut espérer une publication des œuvres d’Yves Bonnefoy?
    Plusieurs raisons m’y amènent à m’interroger : d’abord parce que la poésie de Bonnefoy mais aussi ses essais font partis (ce n’est pas que mon avis, je crois) des grandes œuvres du XXème; mais aussi parce qu’un sondage récent (2013 je crois, l’Obs) le proposait aux avis des lecteurs et que il semble qu’il y a une forme de proximité avec le directeur de la collection, un autre article plus récent sur les coulisses de la Pléiade ayant dit qu’il s’est « fendu » d’une longue lettre pour la réédition de Mallarmé (lettre certainement intéressante que j’aimerais bien lire, mais enfin)
    Mais dans mes recherches je n’ai rien trouvé qui parle d’une éventuelle publication en Pléiade, l’ami Yves étant relativement peu dissert sur un tel sujet dans la parcimonie de ses entretiens..
    (Il est de plus édité dans la Pléiade italienne, mais cela n’apporte, je crois, aucune information à la cause..)
    Pardonnez ce message bavard, que j’espère vous lirez ; et merci pour cet petit « cabinet des curiosités » qu’est cette article et sa suite de dialogues.

    • Cher Euphorion,
      vous pouvez commenter ici ou là-bas. Il me paraît logique que les commentaires plus généraux sur la collection se retrouvent ici et que les annonces plus spécifiques (sur tel ou tel volume) se concentrent sur la page générale, mais je n’en fais pas un principe absolu (trop de recoupements sont possibles), surtout que les mises à jour de la page devraient permettre, à l’avenir, à chacun de s’y retrouver.
      Vous allez m’accuser de couper les cheveux en quatre, mais Bonnefoy n’est pas édité à la Pléiade italienne (« Biblioteca della Pleiade », Einaudi, collection arrêtée en 2006, calque complet de la Pléiade, excepté pour les couleurs des reliures), mais par I Meridiani (Les Méridiens, Mondadori), dont le concept est évidemment inspiré de la Pléiade, mais avec quelques différences dans la présentation et l’allure des volumes. Les Pléiades italiens sont plutôt, selon moi, les volumes d’Einaudi. Il se trouve que le volume Bonnefoy est édité en bilingue par I Meridiani… donc il peut même intéresser, à la marge, les francophones ne pratiquant pas l’italien (ils seront néanmoins privés des notes et de l’appareil critique).
      Votre hypothèse ne me semble pas irrecevable, du point de vue de la réputation littéraire hors des cercles étroits de la vie poétique française. Je m’attendais plus à l’entrée de Bonnefoy qu’à celle de Jaccottet dans la collection d’ailleurs. La possibilité d’un volume Bonnefoy n’a pas, à ma connaissance (et je n’aurai pas la prétention de dire que j’ai eu vent de tout, loin de là), été soulevée hors de la maison Gallimard (si elle l’a été à l’intérieur, ce qui n’a rien de certain). D’un point de vue pratique : Qu’en est-il des droits ? J’ai l’impression qu’ils sont éparpillés, ce qui suppose quelques obstacles pour la composition d’un éventuel volume. Cela pourrait-il être une raison pour expliquer ce « non-projet » ? Bon, je n’ai rien de bien tangible à gloser, je l’admets.
      Si jamais quelqu’un d’autre a une information à ce sujet, qu’il n’hésite pas…

      • Dans un article journalistique du Monde datant de la fin de l’année dernière, Michel Onfray (j’ignore la source de ses renseignements) informait ses lecteurs de l’arrivée prochaine de Bonnefoy dans la Pléiade. Le ton de sa phrase indiquait, m’avait-il semblé, qu’il ne s’agissait pas d’un souhait, mais bien d’une information.

        • Cher Toirap,
          j’ai un accès abonné aux archives du Monde et un rapide passage dans la recherche ne me permet pas de retrouver l’article dont vous faites état. En revanche, M. Onfray a bien évoqué en public l’hypothèse d’Yves Bonnefoy à la Pléiade.

          • C’est exact. L’intervention de Michel Onfray en faveur d’Yves Bonnefoy a bien été évoquée dans l’Express. Autant pour ma mémoire défaillante !
            Dans nos entretiens, nous avons souvent rappelé les auteurs déchus, ceux dont les ouvrages sont épuisés et qui n’auront sans doute aucune chance d’être réimprimés ou mieux réédités. Nous devons tous en faire le deuil. Quel dommage ! Mais que dire de la prestigieuse série dont Raymond Queneau fut le père le plus actif, l’Encyclopédie de la Pléiade. La raison principale invoquée fut l’accélération des connaissances, rendant trop prohibitif toute réédition. Si les ouvrages avaient été plus minces et donc plus spécialisés (et moins onéreux), peut-être que… Quel dommage !
            De son côté (je ne m’arrête plus !), l’Univers des Formes devait, à l’origine, être inclus dans la Galerie de la Pléiade d’André Malraux. Mais celle-ci n’était qu’une prestigieuse histoire de l’art, loin de toute monographie comme sut en produire Flammarion avec sa série Les Classiques de l’Art.
            Enfin, et tenez-vous bien, dans un édito du magazine Lire, il fut question — mais ce ne devait être vraisemblablement qu’un gentil canular ou le souhait d’un irréductible « Tintinophile » — de l’entrée d’Hergé et ses Aventures de Tintin dans la Pléiade. Amusant, non ?

          • Cher Toirap,
            il faudrait en effet que j’évoque un jour l’encyclopédie… Certains tomes sont encore disponibles en librairie, même s’ils ne sont plus au catalogue. J’en possède quelques uns. Je suis plutôt d’accord avec le choix de Gallimard : les volumes consacrés aux sciences dures sont dépassés en quelques années (médecine, zoologie, géologie, etc.). C’est un peu moins vrai pour les sciences humaines et les séries historiques pouvaient, je crois, tenir une trentaine d’années sans mise à jour majeure (histoire, musique, littérature, art, philosophie). Mais il est probable, comme vous le suggérez, que ces éditions mises à jour auraient eu du mal à trouver un large public disposé à échanger son ancienne édition contre une nouvelle.
            Pour Tintin, j’y ai déjà pensé mais les cases seraient vraiment petites et le papier bible complètement inadapté à l’encrage coloré… La bande dessinée a besoin de place, de cartonnage, de papier épais. (et puis bon, de la bédé en Pléiade, soyons sérieux !).

          • Pour en terminer avec l’évocation de Tintin, n’oublions pas, cher Brumes, que le grammage fut augmenté pour les œuvres de Prévert lesquelles proposaient des dessins en couleurs. Quant aux œuvres d’Hergé, certes Tintin dans la Pléiade !… Mais enfin !… C’est vrai, les vignettes seraient ridiculement petites, bien que !… La BD dans la vénérable collection, impossible !… Mais encore !… Un instant de divertissement dans nos lectures !… Oh !… Mon grand rival, c’est Tintin, plaisantait le Général qui pourtant se trouve dans la Pléiade et qui s’amusait peu et riait encore moins !…

  46. Vous faites bien de me corriger, je n’ai aucune connaissance sur les collections italiennes; un volume bilingue est intéressant, même s’il ne doit pas être complet au vu de sa date de parution et des publications postérieures..
    La seule chose que j’ai vu d’Onfray (article de 2014, l’Express): « Et quand on regarde la liste des best-sellers, qu’est-ce qui se vend? Le prochain bouquin de Valérie Trierweiler, ou bien les Mémoires de Basile Boli. Et pendant ce temps, Yves Bonnefoy vend 300 exemplaires! Alors qu’on pense à lui pour La Pléiade, pour le prix Nobel de littérature.  » Je ne pense pas qu’il s’agisse d’une vraie information;
    quant à la question des droits que vous souleviez, j’avoue ne pas savoir du tout comment cela marche et j’ignore complètement la mécanique de tout cela. Mais l’oeuvre poétique de Bonnefoy est publié en Poésie Gallimard (les premières publications sont au Mercure de France me semble-t-il); or s’ils sont publiés en poche chez Gallimard, j’imagine qu’ils doivent en avoir les droits? Il en va de même pour les essais repris en Folio.
    Ce n’est pas le sujet, mais je voulais juste dire que la publication de Jaccottet à la Pléiade, ici débattue dans les commentaires, est à mon avis intéressante au même titre que son oeuvre. Ce que je dis n’est bien sûr que mon avis; mais j’ai l’impression que les publications poétiques de la Pléiade quant aux « poètes de la modernité » visent essentiellement les poètes dont l’expression est davantage « métapoétique », et je pense bien sûr à l’autre grand moderne proche de Jaccottet que fut Ponge. Les publications poétiques « modernes », comme elles sont relativement rares dans le catalogue du fait certainement de leur relativement pauvre potentiel commercial (?), sont peut-être orientées vers des volumes d’œuvres qui sont des poésies qui sont plus « discours », réflexions et mise en doute de la poésie par la poésie,en somme méta-poétiques, plutôt que vers la poésie dont Bonnefoy est un peu le tenant, qui tient davantage au « fait d’imagination » -sans que la réflexion poétique en soit absente bien entendu- qui est peut-être davantage « plaisant » à la lecture.
    Pour en revenir à Jaccottet, il faut admettre que sa poésie n’a pas toujours le charme propre au poétique, qu’elle touche presque parfois au « commun » d’une parole humble au lyrisme effacé, qu’elle semble, il est vrai, parfois anodine; mais ce caractère anodin est en fait le distillat de ce qu’est vraiment la poésie – selon Jaccottet – une fois qu’elle est dépouillée des « joliesses sucrées », comme le dit Michel Butor (encore un qui devrait figurer à la Pléiade, un très grand, très oublié). Et la réunion des œuvres de Jaccottet sous le seau d’une seule Pléiade permet d’offrir ce qui est vraiment, au même titre d’Holderlin dont il fut le maître d’édition, une « oeuvre-expérience », et voir le travail d’ascèse qui fut le sien par la poésie et la réflexion poétique parallèle me semble vraiment justifier sa publication. J’ai peur d’avoir un peu « dévié » du but de cette page, j’espère que vous m’en excuserez

    • Pour les droits du Mercure, c’est une société du groupe Madrigall (anagramme de Gallimard), donc je ne crois pas la récupération impossible. Mais j’ai cru voir d’autres éditeurs dans l’affaire. On sait que certains projets ont pu échouer de ce fait : Beckett face à l’opposition de Minuit (alors que Beckett est au catalogue de la pléiade italienne, celle d’Einaudi ; s’il n’avait pas été publié à la Pléiade de son vivant, l’œuvre de Cl.Simon eût pu être elle aussi empêchée d’entrer dans cette collection par les Éditions de Minuit), peut-être d’autres. Je sais que les éditions poche / NRF font l’objet d’un accord d’exploitation en format poche entre Gallimard et l’éditeur du grand format ; il est évident qu’une exploitation Pléiade exigerait une négociation contractuelle.
      Peut-être aurons-nous une surprise de ce côté-là, si M. Onfray est bien informé et qu’il n’utilise pas Bonnefoy pour de purs motifs rhétoriques…
      Vous dites des choses justes sur Jaccottet, ses proses réflexives, ses commentaires, ses petits poèmes qui peuvent avoir la simplicité des haïkus (d’où ma remarque sur la « secondarité » du poète dans notre histoire littéraire). Je comprends qu’on n’y soit pas sensible, ou que l’on trouve cela banal, mais dans une controverse sur le poète, je serais plutôt de votre côté que de celui de ses contempteurs.

  47. C’est une anecdote, mais à propos d’Onfray et de la Pléiade, on voit cette semaine dans Le Point notre philosophe, qui fait la Une, devant une grande bibliothèque de pléiades (les a-t-il tous ?) dans son appartement à Caen. C’est impressionnant, mais pour ma part je préfère les voir rythmer la bibliothèque, il est vrai classée par ordre alphabétique et par grandes familles (littérature, philo, histoire… ) Onfray s’embourgeoise, c’est amusant.

    • Philippe, la question du rangement des Pléiades est épineuse ! Comme toute réflexion sur le rangement d’une bibliothèque… Faut-il les disperser entièrement, laisser quelques regroupements s’opérer, les parquer tous ensemble dans un endroit personnel ou, mieux (ou pire), dans son salon ? Je suis de ceux qui rangent leurs volumes au même endroit, pour des raisons pratiques (la place commence à manquer pour mes plus de 200 volumes, eux-mêmes encerclés par une armée de plusieurs milliers de livres, je suis partout contraint de faire des doubles rangées, et je ne fais pas d’exception pour les reliures-cuir-à-rhodoïd-de-chez-Gaston). Et je pratique ainsi parce que j’ai, en outre, la manie primitive des alignements, des symétries, de le l’ordre, qui signe probablement là le psychisme rigide d’un fieffé et impénitent réactionnaire ; vous savez ces êtres intransigeants les bons jours, guindés les mauvais, aussi rigoureux que méticuleux et, pour parfaire le contre-portrait, dénués d’imagination. Sa bibliothèque signe hélas un homme !
      Quoique… je classe mes volumes par date de mort de leur auteur, principe que je crois peu répandu et qui exige d’avoir quelque connaissances de l’histoire littéraire (et qui permet accessoirement aux volumes émeraude de James de doubler sur le fil les volumes havane de Péguy). Pour les vivants, c’est par date de naissance.
      Cela dit, je songe parfois à faire éclater tout l’ordonnancement pour que chaque Pléiade, chaque Quarto, chaque Bouquin rejoigne sa zone géographique et sa sous-zone temporelle…

      Question subsidiaire : quand vous achetez un Pléiade, vous débarrassez-vous définitivement du rhodoïd ou du cartonnage, du rhodoïd seul, du cartonnage seul, ou gardez-vous pieusement les trois (quitte à retirer le rhodoïd au moment de la lecture pour le remettre par la suite) ?

      • Merci, cher Brumes, d’aborder enfin des questions essentielles ! Le classement d’une bibliothèque est aussi angoissant que la question de la barbe du Capitaine Haddock : au-dessus ou au-dessous du drap ? Pour ma part – comme tout un chacun, j’imagine – j’ai tout essayé : mêlées aux autres livres, par ordre alpha, si possible, tous ensemble, par auteur, par époque (oui, j’ai même essayé par couleur), et puis… les contraintes de place, l’obligation devant le nombre de livre de multiplier les étagères étroites qui permettent d’empiler plus de livres de petit format, et les déménagements qui dérangent tout, et la fantaisie, le goût du changement, également, le plaisir de réorganiser, et redécouvrir en même temps ses livres un peu oubliés pour certains… A chaque fois, je crois avoir trouvé la solution idéale, bien sûr.
        Actuellement, c’est la détresse, par suite d’une mutation outre-mer, ma bibliothèque est partagée entre la France et l’île où j’habite… et mon coeur également ! En ce qui concerne les rhodoid et cartonnages, je garde pieusement tout (quitte à dépouiller le livre, le temps de la lecture) et, même, lorsque j’achète des Pléiade d’occasion, je leur fabrique moi-même de nouveaux habits… Ici, en climat tropical, ces protections (et le fait de bien serrer les livres) sont bienvenus pour protéger ces trésors de la moiteur…

        • Cher Dominique,
          merci pour vos remarques sur les bibliothèques, le rangement d’icelles est toujours perturbé par les flux entrants et par la nécessité périodique de tout réorganiser. Cette nécessité offre au lecteur, avouons-le, le plaisir de la redécouverte.
          Comme WordPress m’offre une jolie carte du globe et de la localisation des connexions sur mon blog, je crois savoir de quel lointain endroit vous me lisez, j’ai noté dernièrement une recrudescence inattendue de connexions par là-bas !
          L’humidité peut être utile pour certains Pléiades aux pages un peu cassantes. La composition du papier est faite, en principe, pour vieillir, et donc absorber un peu l’humidité pour s’assouplir. Cela dit, là comme partout, l’excès est néfaste (j’ai quelques volumes d’occasion qui ont passé trop de temps dans des caves humides).
          Pour Gorki (votre commentaire plus haut), ce que vous constatez est réel. Sa gloire eut aussi à voir avec ses engagements, même si elle ne découla pas d’eux. D’où ce volume unique, quand trois auraient dû voir le jour.

          • Depuis 8 mois ici et mes Pléiades (une sélection seulement), qui ont également subi un voyage en bateau de plus de trois mois, se comportent très bien. La clim apporte certainement sa contribution à cette bonne santé. Ainsi que les rideaux, jamais ouverts dans la pièce où elles se trouvent, pour les protéger de la lumière. J’ajoute une dernière chose : les boîtiers en carton sont également rassurants, quand je vois ma chatte se promener dans ma bibliothèque qui est, pour elle (comme pour moi, d’une autre façon) un merveilleux terrain d’exploration… Sachant qu’ici on ne trouve aucune librairie, les Pléiades m’ont paru un très bon moyen d’emporter le maximum de pages passionnantes, pour un minimum de volume et de poids.
            J’ajoute, hors sujet, qu’à la réflexion, je nous trouve tous, les intervenants de ce blog, un peu sévères peut-être sur les évolutions de la Pléiade : certes, toutes les critiques sont fondées, mais ne doivent pas faire oublier que les éditeurs sont bien obligés de se plier aux contraintes de l’époque, et cette « vieille dame » a encore de très beaux restes. J’ai parcouru, pour m’en assurer, les publications des trois ou quatre dernières années, on y trouve tout de même de très belles entreprises, qui ne paraissent pas répondre forcément à des impératifs commerciaux (personnellement, le volume De Quincey m’enchante ; j’ai été trop rigide à propos de Jacottet – sans doute par regret de ne pas voir, d’autres en ont parlé, Yves Bonnefoy ou Ponge etc – et j’en passe et des meilleurs).

  48. En ce qui concerne le volume « Négritude » je verserais une larme si son abandon devait se confirmer. Cela me paraît une entreprise extrêmement séduisante et pertinente, ce mouvement a une grande importance historique et littéraire, les œuvres en elles-mêmes sont de haute tenue et, ce serait la seule opportunité de voir le moins connu des trois, Léon-Gontrand Damas être accessible dans une collection prestigieuse : une sorte de reconnaissance. La France littéraire doit bien cela à ces voix d’outre-mer qui ont ouvert des voies nouvelles…

    • J’ai fait part, ici même, et avec beaucoup d’autres, du peu d’intérêt que présente à mes yeux la publication de d’Ormesson en Pléiade. Pour autant, je ne crois pas nécessaire d’en faire une cause nationale et un prétexte à une croisade d’Indignés. Et je précise que, si la critique est libre, je n’aime pas beaucoup les injures et les menaces de voies de fait.

      • Cher Dominique, je comprends votre réaction mais je pense que le titre n’est là que pour faire parler du livre et attirer le regard du public. C’est de la provoc’ à prendre au troisième degré (et puis gifler un vieux monsieur si urbain, quelle idée !). Ce petit pamphlet pourrait bien être une bonne affaire pour PGDR et pour Gallimard : on parlera de d’Ormesson…
        On aurait difficilement imaginé un volume de polémique intitulé « Suffirait-il d’aller gifler Pline l’Ancien pour arranger un peu la gueule de la littérature latine ? »

        • Pierre-Guillaume de Roux n’a jamais fait dans la dentelle et j’ajouterai même qu’il n’est pas là pour ça (pour reprendre l’intitulé d’un article paru dernièrement dans la presse, il est « l’éditeur du diable »). En outre, conçu pour être vendeur, le titre de ce pamphlet n’est guère étonnant. En tout cas visiblement tout le monde est d’accord : s’il est normal de se moquer de la pléiadisation imminente de D’Ormesson et de s’interroger sur les raisons qui ont poussé Gallimard à la mener jusqu’à son terme, le fait de lâcher le mot « gifle » est d’un extrême mauvais goût.
          Au demeurant, le texte de présentation du pamphlet sur le site de PGDR contient certaines choses assez justes. C’est vrai, Jean D’O. évite de parler des sujets graves qui nous concernent tous ; c’est vrai, certains de ses romans font penser à une « tapisserie » historique indigeste. J’ai feuilleté « La douane de mer » : c’est lourd, fastidieux, soporifique. Pour ce qui est de « Au revoir et merci » (que j’ai lu en entier lorsque j’étais au lycée), c’est un adieu précoce à la littérature sans beaucoup d’intérêt (quoique le livre contienne un très beau portrait de René Julliard). « Casimir mène la grande vie » c’est du grand n’importe quoi : Jean D’O. a voulu rivaliser dans ce texte facile avec « Candide » de Voltaire mais, naturellement, sans jamais y parvenir. « Le rapport Gabriel » est involontairement comique, et très superficiel ; ce n’est pas un roman, mais plutôt, comme dit Jean-Marie Laclavetine, « un brouillon de roman ».
          En conclusion, je dirai que Pierre-Guillaume de Roux (réputé janséniste en matière littéraire, c’est-à-dire extrêmement exigeant dans ses goûts personnels) et son pamphlétaire font mine de ne pas comprendre que l’intronisation de D’Ormesson dans la Pléiade est une nécessité inévitable. Je reste absolument persuadé que si Antoine Gallimard avait pu se passer de cette édition, il n’aurait jamais inclus D’Ormesson au catalogue de la Pléiade. Mais la collection est malade et, pour continuer d’avancer, elle a désormais besoin de locomotives jouissant d’une popularité importante. C’est comme ça.

          • Alors, si c’est un symptôme de la maladie de la Pléiade, l’état du malade est plus grave que j’imaginais, et, pour tout dire, inquiétant ! J’aimerais bien mourir avant cette collection qui m’a fait rêver depuis un bon demi-siècle.
            Je suis prêt à supporter la publication d’un d’Ormesson par an, si cela doit être le prix de sa survie (de la même façon que les films de Monsieur Danny Boon financent la Caisse des aides cinématographiques et bénéficient à des films plus « exigeants » et moins « grand public »).

        • Quoique… J’imagine que les mœurs, à l’époque de Pline, étaient plus rudes que dans notre petit « Royaume des Lettres », à l’époque des Voltaire et Rousseau les polémiques faisaient rage, et les Surréalistes utilisaient la gifle comme argument de débat… Mais, aujourd’hui, les polémiques qui agitent notre petite secte de passionnés de littérature, n’intéressent plus grand monde en-dehors d’elle, ne mettent plus en jeu des questions aussi importantes aux yeux de la société, et cette « provocation » est, au mieux, insignifiante.
          Je suis désolé de ne pas être capable de résister à la tentation de m’y laisser entraîner, et j’en demande pardon.

  49. Je lis toujours avec plaisir les commentaires ici, et je rassuré – le faut-il ? – de voir que je ne suis pas le seul à construire des coffrets pour les volumes Pléiade acquis qui n’en ont plus.

    Je me permets de livrer une question à votre sagacité parce que moi-même je ne suis pas parvenu à une explication satisfaisante pour justifier la présence de Julien Green dans la Pléiade en autant de volumes.
    Loin de moi l’idée de contester la qualité de son oeuvre, j’ai apprécié plusieurs de ses romans, mais il est néanmoins manifeste que Green tient une place somme toute isolée dans la littérature du XXe siècle. Il y a dix ans on pouvait encore lui dédier quelques colloques universitaires mais déjà il me semblait un peu méconnu.
    Pourquoi dès lors, Gallimard ont-ils été tentés d’en publier les œuvres complètes dès la fin des années 70 ? J’ai vu aussi que les derniers volumes du journal ont paru il y a moins de 10 ans (pour mémoire Green est décédé en 1998) ailleurs que chez Gallimard (Fayard et Flammarion je crois).

    Dernier commentaire, si je me désole de l’absence de Bonnefoy dans la Pléiade car ce poète est tout aussi reconnu si ce n’est plus que Jaccottet (qui en effet est plus accessible parfois), j’ai vu qu’un Quarto allait sortir pour l’oeuvre de Louis-René Des Forêts, ce qui semble largement compromettre l’espoir d’une Pléiade pour un auteur méconnu mais fort intéressant à découvrir.

    Cependant, je comprends la difficulté financière que cela présenterait de se lancer dans des Pléiades de poètes du XXe siècle ou contemporains (Bonnefoy, Deguy, Dupin, Guillevic, Mandelstam…)

    • En ce qui concerne Julien Green, j’ai toujours été étonné par l’ampleur de l’entreprise. J’ai lu, très tardivement,quelques-uns de ses romans, intéressants mais vieillis (et ce n’est tout de même pas Bernanos !) Je m’interrogeais sur l’intérêt du Journal, et j’ai fini, récemment, par y aller voir : je me suis contenté, pour le moment, des années quarante, dans des éditions de poche. A mon grand étonnement j’ai trouvé ce journal passionnant, à plus d’un titre, littéraire, historique, psychologique. Mais ce sont des années riches en événements historiques et en rencontres avec de grandes personnalités, qu’en serait-il du Journal des dernières années ? Irais-je jusqu’à acquérir l’ensemble du monument en Pléiade ? J’en doute fort (peut-être à tort ?). Et cela ne répond pas à la question : pourquoi un tel « traitement de faveur », auquel de plus grands n’ont pas eu droit ? (Financement par la CIA ? Ha ! Ha ! Ha !)

  50. Issu d’un milieu moyennement imprégné par la littérature (disons-le comme ça), je me suis piqué,  voilà quelques années, de lire les classiques dans le meilleur texte possible. Évidemment, j’en suis arrivé très vite aux Belles-lettres et à la Pléiade.

    Lors de la lecture de mon « premier Pléiade » (Le Comte de Monte Cristo), j’étais tellement persuadé de l’infaillibilité du texte que j’ai passé une bonne demi-heure de recherches avant d’admettre que, non, un « excalier », ça n’existait pas (P. 164 de mon édition). (Jeu : faute à trouver également en page 176).

    Une quarantaine de Pléiades plus tard, je tombe sur ce blog et suis heureux de voir que mes joies et déceptions sont partagées.
    Certains volumes sont inestimables (Ah bon, il est possible de lire Shakespeare, Melville ou de Laclos autrement qu’en Pléiade ?) et rachètent les défauts que vous avez signalés.

    Deux questions :
    – à votre avis, quelle est la raison de l’absence de véritable communication de la part de Gallimard ? Est-ce vis à vis de la concurrence ? Ou un indice de mépris envers les (encore) amateurs de la collection ?
    – Certains classiques sont-ils réputés pour avoir une meilleure édition qu’en Pléiade ? (je pense par exemple à Jules Verne, pour lequel la Pléiade semble avoir fait le travail minimum et qui se trouve en intégralité (?) chez Hetzel).

    Enfin, comme un précédent intervenant , laissez moi vous dire que je suis étonné et réconforté, par le niveau des discussions que je trouve ici.

    • Merci Draak, je suis content de savoir que vous avez pu trouver ici quelques réponses.
      je réponds rapidement à vos questions. Comme je l’ai déjà dit par ailleurs, je ne travaille pas dans le milieu de l’édition et ne connaît donc Gallimard que de l’extérieur. Mes réponses sont à prendre pour ce qu’elles sont, les observations (plus ou moins sagaces) d’un amateur.
      Je ne pense pas que Gallimard manifeste du mépris envers sa clientèle. La Pléiade est trop précieuse à ses yeux pour cela. L’équipe de la Pléiade répond souvent aux lettres que les lecteurs lui adressent, soit pour signifier une faute de frappe, qui sera corrigée dans une réimpression, soit pour poser des questions sur la possibilité de telle ou telle parution. Ils jouent le jeu, mais à l’ancienne. Je crois qu’ils n’ont pas encore complètement intégré les possibilités de communication ouvertes par l’Internet – utiles pour fidéliser une « jeune » clientèle encore en train de se constituer un patrimoine de Pléiades (disons les 30-45), et qui préférerait probablement une communication plus transparente.
      Peut-être est-ce aussi un moyen pour eux de susciter le désir en jouant sur l’attente des fidèles, plutôt que de tout leur dévoiler en une fois ? (et mon onglet ci-dessus, « La bibliothèque de la Pléiade » perdrait son charme, je pense)
      Leur politique est aussi une politique de prudence. Moins par rapport à la concurrence (tout se sait à Paris, des universitaires sont mis dans la confidence, etc.) que par rapport à la clientèle. Les catalogues, par le passé, étaient beaucoup plus explicites sur les sorties à venir. Ils ne le sont plus. Or, un Pléiade annoncé n’est pas un Pléiade paru. Il peut arriver bien des choses : changement d’équipe, problèmes de traductions, retards, problèmes personnels des maîtres d’œuvre, disponibilité problématique de certains textes, réorientations stratégiques (un volume sur un thème ou une époque proche n’ayant pas marché du tout par exemple). Et le client de la collection, exigeant comme il est, excusera plus facilement la collection de ne rien lui avoir dit et de lui faire une bonne surprise, que de lui avoir promis un volume qu’elle ne mettra finalement pas en vente (exemple : le Théâtre de Brecht, annoncé pendant quinze ans en trois volumes et transformé, sans qu’on sache bien pourquoi, en un volume bizarre d’écrits sur le théâtre – j’utilise souvent cet exemple)…
      Voilà mon hypothèse : a/ retard d’adaptation, b/ économie du désir, c/ prudence pour ne pas décevoir, d/ moyen de réorienter discrètement les projets.
      Pour votre autre question, oui, quelques éditions sont reconnues comme anciennes et dépassées : Plutarque (les Belles Lettres ont fait mieux et sinon Quarto peut-être ?), Platon (Flammarion), Poe, Verlaine, Descartes, Spinoza (voir les éditeurs spécialisés en philosophie pour de solide éditions de ces deux-là, sinon, à ma connaissance Tel pour Descartes, les PUF pour Spinoza), La Rochefoucauld, La Bruyère, Racine II, La Fontaine II, Hugo (Bouquins a fait beaucoup mieux je crois), Dostoïevski (la traduction Markowicz à Actes Sud, plus récente, a constitué une vraie étape dans l’histoire de Dostoïevski en français, mais elle n’est pas accompagnée d’un appareil critique – elle hérisse certains), peut-être Montesquieu et j’en oublie sûrement (Chateaubriand, qu’il vaut mieux lire, m’a-t-on dit, en Pochothèque). Je laisse à d’autres le soin de vous indiquer de meilleures éditions pour ces auteurs.
      Généralement, les éditions antérieures à 1960/1970 sont un peu légères (elles ont le mérite néanmoins de ne pas submerger le texte sous la glose). Je suis par exemple en train de lire Machiavel à la pléiade : le volume est agréable, mais comme il date des années 50, il aurait bien besoin de voir ses notes un peu étoffées (il n’y a même pas de notice des textes !) et ses traductions revues.
      Un volume pour moi indépassable, parce que très particulier, c’est le Dante d’André Pézard. Il a brillamment rendu Dante non en français mais en ancien français, ce qui redonne au Florentin tout son grain, toute son âpreté, toute son étrangeté… (et rend difficile une lecture passablement attentive). Ce n’est pas l’édition par laquelle je conseille de découvrir Dante, mais on ne peut pas en faire l’économie si l’on veut le lire en français. Mon seul regret est que ce volume n’ait pas été bilingue (impossible techniquement, car, parfois, les notes de La Divine Comédie, situées exceptionnellement en bas de page et non en fin de volume, prennent les 9/10es de la page).
      Je m’arrête là, je suis encore une fois intarissable.

      • Je me pose depuis quelques temps des questions (sans doute de béotien) au sujet des traductions… Le temps passe et nous éloigne de certains auteurs. Quand je les ai lus pour la première fois, il y a un demi-siècle, leur proximité était plus grande, Dostoïevski n’était pas pas encore du siècle avant-dernier et Kafka était presque mon contemporain. Si ces œuvres s’éloignent dans le temps, leurs traductions également.
        Il est de mode ou d’usage de refaire des traductions à chaque génération. Elles sont certes présentées à chaque fois comme des progrès : plus exactes, plus savantes, plus adaptées au langage et à la culture de notre époque… Certes, mais, en se rapprochant de nous, ne s’éloignent-elles pas de l’originale ?
        J’ai eu l’occasion, devant faire des voyages en avion de plus de 36 H, de télécharger sur ma tablette des ouvrages libres de droits, pour ne pas charger mon bagage (tout en étant horrifié par ma trahison vis-à-vis du livre papier). J’ai ainsi lu, relu ou parcouru des traductions anciennes, de Dostoïevski notamment. Et je me suis fait la réflexion, que, pour démodées, et fautives sûrement, qu’elles soient, ces traductions sont de l’époque de Dostoïevski lui-même (je rêve qu’il ait pu même les connaître !). Elles témoignent de la langue de ses contemporains, de la façon dont ces oeuvres ont été reçues pour la première fois par le public français, dans le cadre des idées et des préjugés de l’époque. Dépassées, sans doute, mais ayant des qualités de témoignage.
        Après-tout, les traductions actuelles reflètent également nos idées, l’état de notre langue, nos tics, et seront peut-être plus vite démodées. Qui sait si elles sont réellement plus fidèles – l’esprit, sinon à la lettre ? Je connais des traductions récentes de Kafka, certes plus exactes que celles de Vialatte, plus modernes que celles de Marthe Robert, mais au sujet desquelles je me suis demandé, parfois, si c’était encore du Kafka ?

        • Cher Dominique,
          je ne suis pas traductologue (le nom officiel et barbare des spécialistes de cet art délicat), mais il me semble que les traducteurs du passé, outre les petites imperfections et erreurs inhérentes à toute traduction, avaient tendance à prendre quelques libertés avec les textes originels : suppression de segments, interprétation, élévation du registre de langue, etc. D’autant plus s’ils traduisaient au XIXe ou avant. On respectait moins les textes originels alors (pour des raisons esthétiques et littéraires respectables, mais passées de mode). Il est de bon ton, désormais, d’approcher le mieux possible le texte originel – en sachant que la littéralité est illisible et la récriture suspecte. Je sais que la version d’André Markowicz de Dostoïevski sera plus âpre que la version Pléiade. M.Markowicz estime avoir été plus fidèle au style originel de l’écrivain que tous les traducteurs qui l’ont lissé.Je ne lis pas le Russe, donc je ne peux pas vérifier, mais j’ai tendance (à tort ou à raison) à faire confiance à M.Markowicz, qui est un homme intéressant et un passeur passionné. Une traduction est un chantier jamais achevé.
          Je crois aussi que les lecteurs nourrissent un dialogue particulier (notamment en poésie) avec certaines traductions et que de nouvelles, peut-être plus fidèles,peuvent nous déranger et par là briser l’exact ordonnancement de ce qui nous touchait dans l’adaptation poétique que nous connaissions.
          Parfois, il y a aussi le fait que les traducteurs étaient médiocres, pressés, mal relus, etc. Ça arrive, notamment en sciences humaines, où l’on se préoccupe trop rarement de la valeur formelle des traductions, au motif qu’en matière de pensée seul le fond compte (voir une de mes vieilles notes sur un ouvrage de Michael Oakeschott) – et que les auteurs/passeurs/lecteurs de ces textes sont supposés n’avoir pas de sensibilité littéraire. Je pense l’inverse, et chaque livre où je sens percer l’anglais derrière les phrases françaises m’agace instantanément (exemple, une phrase commençant par « Non seulement les théories classiques mais les théories néoclassiques prétendent que… », typique de ce que j’appelle la syntaxe anglaise ; certaines formes passives aussi). J’ai vu quelques exemples de ratés de ce genre dans le dernier Cahier de l’Herne consacré à Conrad.

          • Je m’incline devant votre science (qui tente vainement de se rendre invisible sous les habits de la modestie) et ne m’aventurerai pas plus loin sur un terrain (pour moi) miné… (Oserais-je simplement constater que Dostoïevski n’a pas attendu sa toute dernière et impeccable traduction pour exercer une influence considérable, un véritable bouleversement, sur d’innombrables esprits, et parmi les plus grands, hors de sa Russie natale ? Je crains d’avoir proféré un blasphème… Ne me foudroyez pas, c’est une petite provocation assez innocente, qui, bien entendu, ne remet pas en cause la parfaite justesse de vos remarques sur les insuffisances des anciennes traductions.)
            Je viens d’apercevoir les résultats d’un « sondage » (?) qui met en tête des écrivains préférés des « Français » Marc Lévy, immédiatement suivi de d’Ormesson…. J’ai donc la joie de vous annoncer que la prochaine Pléiade consacrée à un auteur français vivant sera un Marc Lévy ! Je m’en délecte d’avance. Ha ! Ha ! (Par contre, parmi les « classiques » on trouve un curieux trio composé de Hugo, Verne et Pagnol… Etant hugolâtre et Vernemaniaque, je m’en réjouis, même si, dans le cas de Hugo je pense qu’il s’agit d’une révérence éloignée, plus due aux comédies musicales « Notre-Dame de Paris » et « Les Misérables » qu’à une lecture des oeuvres… Quant à Pagnol… Mon Dieu !)

        • Pagnol, dont je n’ai jamais trop compris l’intérêt finira bien par rentrer en Pléiade un jour à mon avis même si son théâtre a vieilli, ses romans et son autobiographie sont toujours vu comme du patrimoine culture en Provence.

      • Merci, Brumes (et en plus, vous ne dormez pas – Ah ah, j’ai une explication maintenant).
        Dans la liste des « Pléiades un peu faibles », je suis surpris que vous citiez Racine. Le volume présenté par Georges Forestier semblait au plus haut niveau à mon regard de Béotien (mais il s’agit du I- Théâtre, poésie). Si vous aviez une précision sur ce sujet…

        • Cher Draak,
          Si vous ne l’avez pas fait, je vous invite à consulter le point IV b) de l’onglet : https://brumes.wordpress.com/la-bibliotheque-de-la-pleiade-publications-a-venir-reeditions-reimpressions/
          Vous y verrez que je distingue deux éditions de Racine qui, comme celles de La Fontaine, de Marivaux et, pour peu de temps encore, de Flaubert, se chevauchent. Le premier tome est très bon, il a un quart de siècle et je ne pense pas qu’il soit nécessaire d’y toucher. En revanche le second volume, par ailleurs indisponible depuis des années, mais toujours trouvable sur le marché de l’occasion (voire, parfois, neuf), date de l’ancienne édition, et apparaît clairement dépassé par rapport aux exigences actuelles (comme La Fontaine II, Marivaux Romans et Flaubert II – ancienne édition, la nouvelle n’étant pas directement numérotée, elle n’affiche que des dates). Je ne suis pas certain que le volume II de Racine soit proche d’une réédition (le XVIIe se vend mal, plus encore son théâtre, les trois tomes de Corneille et les trois tomes du théâtre du XVIIe n’ont pas encore écoulé leur premier tirage, trente ans après…).

  51. Je suis étonné du ton de commisération employé par certains à l’egard de Pagnol, qui fleure bon le dédain anti-provincial (ou anti-provençal), dédain dont souffre aussi Giono, bien que œuvre et son style exceptionnelle fassent partie du meilleur de la littérature francaise du siècle dernier (sans que Giono bénéficie pourtant de la même reconnaissance que certains contemporains, élus par l’intelligentsia parisienne…). Un récent numéro du Magazine littéraire publiait sur une page un texte de Pagnol sur son camarade Lili des Bello s, mort en 1917 pendant la guerre ; texte absolument remarquable. Du coup je me suis replongé dans Pagnol (que je n’avais plus relu depuis 30 ans) et je ne m’étonne pas de la place particulière qu’il occupe dans le sondage du Figaro, aux côtés de Hugo et Verne…

    • Je suis désolé cher Caminos si je vous ai blessé par mon commentaire sur Pagnol, loin de moi cette idée et par là même je précise que je ne suis pas parisien.
      Ce que je reproche ce n’est pas temps l’oeuvre de Pagnol lui-même, j’ai lu « Topaze » c’est de la comédie comme on en faisait à l’époque et ce n’est plus à la mode comme le théâtre de Salacrou ou de Porto-Riche, c’est un constat.
      Pour les romans, ce qui me gêne c’est que ce qu’en a fait le cinéma notamment en faisant d’une oeuvre que je ne connais que de loin un concentré des clichés sur une région que je ne trouve pas utiles si ce n’est néfaste.
      Pour le reste, j’apprécie plus l’oeuvre de Giono qui d’une part à plus d’ampleur et qui aussi est stylistiquement différent.

      • Je ne comprends pas trop ce que viendrait faire dans le débat cette question de « dédain anti-provençal » : la seule question est de juger de la valeur littéraire de l’oeuvre de Pagnol, indépendamment de sa région d’origine.
        Giono (que, personnellement, je mets beaucoup plus haut que Pagnol sur le plan littéraire) critiquait Pagnol pour avoir fait, à ses yeux, un portrait caricatural de la Provence et des Provençaux… Est-ce que cela fait de Giono un auteur « anti-provençal » ?… Je préférerais, s’il fallait promouvoir les « lettres provençales » qu’on exhume un Bosco (dont le second prénom était « Marius », ha ! ha !), par exemple, un peu injustement oublié… Je maintiens : Pagnol, sur le plan littéraire, des thèmes, de l’écriture, fait « fabriqué », « folklorique » (dans le mauvais sens du terme), et, d’accord sur ce point avec Giono, ne rend pas justice à la profondeur, à la véritable nature, de l’homme (ou la femme) provençal(e).
        On pourrait, bien sûr, étendre ce débat à d’autres cultures régionales : Marcel Arland et sa « Terre Natale », par exemple…

        • Sans entrer dans le débat « parisianisme contre provinciaux » je retiens toutefois le terme de « commisération » employé par M Caminos, dès lors qu’il s’agit de l’œuvre de M Pagnol et de sa contribution au théâtre et, ce qui est moins connu, au développement du Cinéma parlant dont il fut le pionnier en France.
          Parler de Pagnol dans un diner en ville fait naitre immanquablement sur le visage de vos invités, ce petit sourire un brin moqueur (… ha mes dernières vacances en Provence ! aïoli et pastis …) réduisant le « petit » monde de Pagnol, ses drames et ses passions, à une collection de santons. Je le regrette et c’est dommage tant M Pagnol a su mettre son talent de dramaturge au service des petites gens, paysans avares ou maitres d’école dont il vénérait l’engagement.
          M Pagnol abordait le théâtre des passions humaines et se servait de l’humour pour masquer la pudeur avec laquelle il traitait ses personnages. on est bien loin de la galéjade.
          Mais il en va de lui comme de Mistral, que la prestigieuse collection de la Pléiade considérait comme un peu « poussiéreux » . Tant pis pour eux. Tant pis pour moi.

  52. Stendhal détestait Grenoble (ma ville natale) et l’a fait savoir en des termes cruels… Nous ne lui en tenons pas rigueur, et donnons son nom à nos rues, nos lycées… On n’est jamais aussi bien « trahi » que par les siens… (Cela peut vous paraître hors-sujet, mais c’est juste pour relativiser les choses…)

  53. J’ai commencé à collectionner la Pléiade il y a soixante ans par un Montaigne imprimé en Belgique dans les années trente. Je dois avoir entre quatre cents et quatre cent cinquante volumes dont je pense n’avoir lus qu’un tiers… et j’ai tous les albums depuis 1960.

    1 – Comme la plupart des intervenants, je pense que dans l’idéal il « manque » une centaine de titres. La liste est facile à établir, celle de Mondadori est parlante. Mais en dehors de la volonté éditoriale, il y a la rentabilité minimale et surtout la question des droits. Quelques volumes de Quarto auraient fait d’excellents pléiade… Non ?

    2 – Combien d’écrivains méritent-ils vraiment des « oeuvres complètes » ? Affreuse période de la surabondance des notes et gloses, démonstration de l’entre-soi universitaire…

    3 – Regret personnel : que la littérature du XIXe ne soit pas accompagnée des illustrations des éditions originales.

    4 – Je n’ai pas eu encore le temps de lire tous les commentaires mais il me semble que le rédacteur du blog inclut Carver dans les auteurs de romans policiers !! (Rappelons l’ extraordinaire épitaphe du NY Times lors du décès de celui-ci : notre Tchekov est mort…) Dernier regret/souhait : deux volumes de nouvelles américaines, genre dans lequel les auteurs US sont les rois. Mais sans doute la diversité et l’obtention des droits font que cela relève de l’utopie…

    Merci et bravo à tous.

    • Cher Monsieur,
      Je vous remercie pour vos remarques. Le « Montaigne » que vous évoquez est un des volumes de l’édition originale, paru avant que Gallimard ne s’empare du pactole Schiffrin.
      Avec quatre cents à quatre cent cinquante volumes, vous disposez Monsieur d’une collection fort estimable.

      Je réponds à vos quatre remarques :
      1. Si certains ici vous diront que tel ou tel volume n’aurait jamais pas dû paraître (exemple pris au hasard le plus complet : J*** d’O********), tous reconnaîtront un certain nombre de lacunes, que nous avons quelquefois énumérées (avec un certain manque de réalisme économique, il faut l’admettre) : des œuvres antiques majeures (Ovide, Horace, Lucrèce, Sénèque, etc.), des classiques de la philosophie (comme Kierkegaard, Schopenhauer, Hobbes, Hume, Hegel, une anthologie de philosophie médiévale, etc.), des auteurs français ou d’expression française encore ignorés (Marot, Bayle, Crébillon, Huysmans, Barrès, Bloy, Mirbeau, Loti, les symbolistes, Suarès, Jouhandeau, Desnos, Guilloux, Bove, Jacob, Beckett, Artaud, Butor, Gary, etc. – j’assume l’irréalisme et la partialité de cette liste), et puis, bien sûr, les champs britannique (Chaucer, Milton, Johnson, Sterne, Wordsworth, Byron, Hardy, D.H.Lawrence, T.S.Eliot, Orwell,…), américain (Emerson, Dickinson, Hawthorne, Pound, Updike, Steinbeck, Gaddis, Bellow, Pynchon,…), italien (Pétrarque, Boccace, Leopardi, Manzoni, Moravia, Gadda, Bassani, Pavese, Calvino, Svevo…), germanique (Schiller, la poésie de Goethe, Fontane, Kleist, Broch, Döblin, Brecht « pour de vrai », Musil, Hofmannstahl, Mann, Böll, Schmidt, Dürrenmatt, Bernhard…), hispanique (Gracian, Machado, Dario, Unamuno, Garcia Marquez, Bioy Casares, Cortazar, Fuentes, Sabato), scandinave (Strindberg, Hamsun,…), asiatique (Mishima, Kawabata, Le dit du Genji, etc.) et encore bien d’autres auteurs auxquels je n’ai pas pensé. Parmi les Quarto, puisque vous semblez me demander mon avis, j’aurais spontanément promu : Jacob, Desnos, Arendt, Svevo, Pavese, Bernhard, Bassani, Artaud, Mishima, Lawrence (D.H.), Gombrowicz…

      2. Si vous observez bien la pratique de Gallimard, les œuvres complètes ne sont plus si fréquentes dans le catalogue. Elles le sont nécessairement pour les auteurs les plus anciens (Antiquité, Moyen Âge, XVIe, XVIIe siècle). Ensuite, ça se complique. Certains auteurs bénéficient d’éditions « complètes incomplètes » : Giraudoux ou Woolf sont amputés de leurs essais, Queneau de son journal, Aymé de son théâtre (certes marginal), Mauriac n’a pas ses articles de presse (qui assurent pourtant sa postérité), Sartre n’a pas sa philosophie, Goethe n’a pas sa poésie, Brecht n’a pas son théâtre (oui, je sais, je radote, mais c’est tellement absurde d’éditer Brecht sans ses œuvres…), etc. D’autres ne bénéficient que d’une édition partielle, soit qu’ils aient trop écrit (Hugo, Dickens), soit qu’on ne juge pas leur œuvre intégrale d’un intérêt constant (en vrac : Faulkner, Cendrars, Boulgakov, de Quincey, J*** d’O*******). Gallimard trie beaucoup plus qu’à l’époque où le Comptoir d’édition « Chez Gaston » publiait quatre tomes de Kipling, trois de Jarry et huit de Green. Il faut s’attendre à l’avenir, pour des raisons économiques souvent invoquées en ces lieux, à la multiplication des volumes d’œuvres choisies (un ou deux, de 1400 à 1600 pages chacun, guère plus).
      Pour les notes et la glose, c’est un vaste débat. La Pléiade a évité de multiplier variantes et notes de sa création jusqu’aux années 60 (le fameux tournant Rousseau), puis est tombée dans l’excès inverse, avec des volumes gonflés jusqu’à l’excès (Nerval, Giraudoux, Aymé, etc.). Depuis, Gallimard est revenu à une pratique plus prudente, n’insérant que peu de variantes et limitant le nombre de notes et de notices. L’âge d’une édition peut s’estimer à vue de nez, en observant la taille des appendices.
      Les notes et la prose universitaire ne me gênent pas dans un Pléiade. Si nos doctes glossateurs pérorent trop sçavantesquement, il est toujours envisageable de se moquer d’eux ; et s’ils respectent le texte qu’ils annotent, on peut y apprendre des choses intéressantes. Je suis en la matière affreusement consensuel.

      3. Je crois que la pratique de la non-illustration change, au moins pour quelques-uns des « Pléiades » (Verne, Sade, les Libertins du 18e,…). Le volume Twain sera accompagné de 650 illustrations, que j’imagine d’origine.

      4. Honte à moi, cher Monsieur ! Je plaide coupable pour Carver – et sans la moindre circonstance atténuante (une confusion avec Chandler ?). La formulation de l’incise est ambiguë, vous avez parfaitement raison de le signaler. Je vais de ce pas corriger cela. Nonobstant, votre idée d’un volume collectif de nouvelles américaines est (très) intéressante, mais on vous répondra que les Français n’aiment pas les nouvelles (c’est la raison pour laquelle le moindre texte de 40 pages est appelé « roman » ou « récit », mais jamais « nouvelle » ; et puis la presse ne publie pas de littérature, ici).

      • Queneau est (pour l’instant) amputé de plus que son journal qu’il n’avait pour but de publier. L’édition de la Pléiade reprend la poésie et les romans parus de son vivants, mais il manque tous ses textes et receuils critiques et/ou inclassables comme Bâtons, chiffres et lettres, Bords, Contes et propos, La voyage en Grèce, etc… Bref des choses essentielles d’un auteur essentiel et pas vraiment négligé, ni par le public ni par l’université. Donc Gallimard n’a aucune raison de ne pas se bouger… à bon entendeur…

  54. Bonjour/bonsoir à tous !
    Merci à Brumes de m’avoir gentiment répondu alors que mon intervention ne nécessitait vraiment pas une réponse aussi longue et peut-être même pas de réponse du tout !

    Amoureux de la littérature, je peux dire que dans ma vie j’ai lu beaucoup de livres « inutiles » et que j’ai pris du plaisir à certains d’entre eux… Ainsi serai-je sans doute le seul dans la cohorte des commentateurs à dire que j’ai aimé certains livres de J d’O. sans réclamer pour autant leur pléiadisation (il y en a tellement qui la mériteraient mille fois davantage) ! De même me suis-le passablement ennuyé, et même endormi, à la lecture de certains ouvrages de gloires mieux « établies »…

    N’est-ce pas l’affreux Paulhan qui disait à Nimier je crois, j’aime beaucoup tes petits livres car quand ils me tombent des mains ils ne me font pas mal aux pieds…

    Aucun auteur « souhaité » par tel ou tel ne m’est inconnu même si je n’ai peu ou rien lu de certains d’eux ! Je ne me lancerai pas à mon tour dans une longue liste facile, mais je m’étonne par exemple que Pierre Jean Jouve dont la poésie et la prose m’ont toujours parues admirables n’ait pas trouvé place dans la Pléiade ; (oui mais me dira-t-on il y a les deux tomes du Mercure, comme il y a Bouquins ou Quarto pour tant d’autres etc…) Et puisque la présence récente d’ auteurs suisses a été saluée (formidable Ramuz) ou diversement appréciée (Jacottet), je ne citerai qu’un nom qui les vaut tous (Helvètes et Gaulois) : Cingria. Sans doute à l’imitation du jazz où l’on parle de musician’s musician (un musicien pour musiciens) Charles-Albert est il un écrivain pour écrivains ?

    Bravo et encore merci à Brumes et tous les commentateurs.

    • Merci d’avoir fait figurer ici le nom de Pierre Jean Jouve si injustement passé sous silence. Cingria ne m’est connu que de réputation, il va falloir que j’aille y faire un tour… Quant à Jean d’Ormesson, m’étant associé à la lapidation générale dont il a été ici victime, sans en avoir jamais lu plus que quelques pages éparses, je sens que je vais être contraint d’en lire un petit peu plus (sans pour autant acquérir la Pléiade, chat en poche, je préfère garder mes sous pour le prochain VIrgile, après avoir réussi à me faire envoyer ici, au bout du monde, l’Anthologie de la Poésie Chinoise).

  55. A la lecture de cette foison de commentaires , tantôt concis et primesautiers , tantôt étirés jusqu’à frôler le bâillement , une seule conclusion s’impose : qui aime bien châtie bien ! Que feriez vous , que ferions nous , membres actifs et prolifiques de cette aimable tribu des
    « Pléiado-dépendants » si nous étions privés de notre cher nonos ? Imaginez un instant que Ferdinand ait mis à exécution sa menace de venir passer au bulldozer le temple de Gaston rue Sébastien Bottin : nous serions tous hagards et hébétés errant le long des quais ou contemplant les eaux glauques du fleuve , avançant même un pied au bord ultime avant qu’un tressaillement salvateur à l’annonce d’un heureux démenti ne nous sauve de la noyade. Revenus à la vie et souriant aux promesses du printemps , nous pensions avoir à jamais vaincu cette dépression morbide quand toutes les couvertures de tous les hebdomadaires dans tous les kiosques de France et de Navarre se mirent à trompeter la pléiadisation de Jean D’O ! Repli général de la joyeuse troupe des « addicts » de la pleine peau dorée à l’or fin vers les berges de la Seine et alors qu’icelle coulait rouge lors des massacres de la Saint Barthélémy , tout portait à croire que de nouveau en ce bel avril 2015 elle allait voir ses eaux charrier une multitude de bedaines ballonnées… Que nenni ! La parution des tomes 2 et 3 de l’Histoire De Ma Vie (pas la mienne , soyez rassurés…) fit que tous se ressaisir au bord des eaux amères et que pas un seul plouf ne fut ouï des flâneurs des deux rives ! Merci à toi , illustre Giacomo , qui as opéré plus de miracles en cette seule journée que le Saint Suaire de Turin depuis le haut moyen âge : tu as ressuscité cette fine fleur des amateurs de belles lettres qu’une pléiadisation hasardeuse risquait de faire passer de vie à trépas ! Soyons cependant généreux avec ce pauvre Jean qu’un malaise à priver d’une millième apparition aux étranges lucarnes et souhaitons lui de tout cœur un prompt rétablissement car il est malgré tout l’un des nôtres : comme vous , comme moi , il est un grand lecteur !
    La relecture des savoureux pamphlets de Swift en pléiade a incliné ma plume à la malice mais ma conclusion prouve que je ne partage ni la misanthropie ni la méchanceté du Voltaire Irlandais.

    • Cher Monsieur, votre commentaire est très amusant. Je ne trouve rien de très « primesautier » à lui répondre sinon de vous adresser mes félicitations.
      Le volume Jean d’Ormesson marche très bien, de ce que je peux en voir : il part vite des rayonnages en province (en « région », non « dans les territoires » diraient nos Parisiens), il a été épuisé très vite sur Amazon, etc. À Paris, ça me semble moins vrai (mais je n’ai vu que les rayonnages de la bientôt défunte Hune). D’évidence, le pari de Gallimard sera gagné, au moins économiquement.
      J’ai acquis aujourd’hui le mince pamphlet de M. Sangars concernant la pléiadisation de M. d’Ormesson, je ne suis pas certain d’y trouver grand chose, mais que voulez-vous, le lecteur est faible…

      • Que voilà de bien étranges nouvelles , cher ami , et vous me la baillez belle ! A vous lire le « Jeand’O » s’écoulerait à merveille en terres barbares chez le Morvandiau , le Limousin ou l’Iroquois et seule Lutèce bouderait encore le « produit »… Cette pacotille s’échangerait au prix de l’or dans cette incommensurable et brumeuse terra incognita d’au-delà du « Périph » alors que le papier bible est impropre à l’emballage du saumon de rivière et la pleine peau à la confection de l’empeigne et de la semelle des mocassins ! Il ne reste plus à souhaiter que ce nouveau trésor des Incas pousse le sieur Pradier à faire preuve de plus d’audace dans ses choix futurs en entendant tinter les ducats et hâte la parution ou la réimpression d’œuvres et d’auteurs qui manquent si cruellement au catalogue de la Pléiade , inexplicables trous noirs qui font exhaler tant de soupirs aux contributeurs de Brumes !

  56. Petite anecdote pour amateur de Pléiades: je viens de trouver chez un brocanteur qui visiblement n’est pas très au fait du marché, trois pléiades pour… 1 euro pièce!!! Et pas n’importe quoi: les très rares tomes 2 et 3 de la correspondance de Stendhal (épuisés depuis belle lurette) et le volume Sport et jeux de l’Encyclopédie. Le tout en parfait état.
    J’ai passé un très bon samedi 🙂

    • Quand je pense que j’ai vu partir un volume 2 de la Correspondance de Stendhal pour 200€ sur ebay l’autre jour ! (je l’ai trouvé quelques semaines plus tard, ailleurs, pour le prix plus acceptable de 30€). 2€ pour les volumes 2 et 3 alors qu’il aurait pu en tirer 100, 150 ou même 200€. M.Hock, vous êtes un chanceux !

      • … Et ce petit frisson de satisfaction lorsque l’on constate sur un Pléiade acheté d’occasion que les signets n’ont jamais été déplacés.

        • Oui mais… à ce petit frisson visuel manquera toujours l’indicible sensation de jouissance que procure , à l’ouverture d’un pléiade neuf , l’inspiration goulue , toutes narines ouvertes , de ce parfum unique et entêtant de l’odeur noire de l’encre fraîche mêlée à celle plus fauve du cuir
          grené !

          • Oui ! Oui ! Oui à tous les commentaires… Le plaisir de la (re)découverte d’une Pléiade longtemps désirée et inespérée, qu’on sauve parfois de la poussière de l’oubli (sans parler, parfois, du sentiment un peu vulgaire (?) de « faire la bonne affaire »), la joie d’ouvrir de caresser des yeux de palper et de humer la Pléiade dans sa candide fraîcheur… Mais il y a aussi les jours de tristesse et de colère quand on tombe sur un livre maltraité, souillé, portant les blessures de ses bourreaux : en quelles mains est-il donc tombé ?
            (Par parenthèse, mon épouse, qui lit par-dessus mon épaule, me demande si elle peut créer un club, un blog, une confrérie (« consoeurie » ?) de desperate bibliomanes wives ?

      • N’étant ni très versé dans le patois des marmottes ni « expert » en parler Chti , j’avoue ma perplexité devant le sens de cette « grole’. De mes pieds à jamais déformés par le port continu quoique déjà très ancien des grol(l)es militaires plus connues sous le nom de « rangers » remonte le souvenir endolori et détesté de stations debout interminables ou de marches aussi longues que nocturnes , souvenir de tortures évidemment incompatibles avec la jouissance quasi céleste procurée par la prise en main , la caresse , l’ouverture et la respiration d’un nouveau volume de la Pléiade! En plus l’odeur de renfermé dégagée par ces carcans de gros cuir noir n’évoque en rien la voluptueuse fragrance d’un coffret de santal ! Notre ami nordiste rejetant le sens savoyard du mot , sens qui m’est inconnu , que faut-il entendre par cette grole qui doit forcément évoquer un septième ou un huitième ciel ? Deux hypothèses s’offrent à moi : soit il s’agit d’une simple faute de frappe qui opacifie le sens du mot et l’intention du rédacteur qui aurait forgé malgré lui un monstrueux hapax , soit il s’agit par suite d’un abus de genièvre d’une réécriture jubilatoire du mot gnôle ! Les deux hypothèses n’étant pas incompatibles car Bacchus a plus d’un tour dans son sac et l’odeur capiteuse d’un vieux marc enivre tout autant que celle boisée et aigrelette d’un pléiade , j’attends avec gourmandise un éclaircissement écrit faute de pouvoir « humer le piot » avec cet ami du Septentrion et lui entendre révéler de vive voix le sens de cette énigmatique « grole ».

        • Je trouve cela assez Grole…..
          L’hypothèse de la faute de frappe doit être privilégiée, l’histoire littéraire en a retenu des célèbres, à commencer par le nom de l’écrivain Faulkner, qui était né Falkner, mais l’imprimeur a glissé un « u » par inadvertance… Un écrivain était né…

  57. Arf. Je suis le seul à penser que les Pléiades sentent le cuir des chaussures. Je me fais petit et retourne dans ma caverne…
    Pour revenir à la littérature : je suis surpris que l’enthousiasme envers les Pléiades ne s’étendent pas aux editions des Belles-lettres, qui font pourtant un travail formidable, en dépit de tout bon sens capitaliste, et qui peuvent, plus que la Pléiade, prétendre à un statut « patrimonial ». Je serais curieux d’avoir une chronique de Brumes sur cette collection…

    • Aux oreilles d’un Savoyard, le mot grolle (avec deux ailes) évoquait plus un récipient en bois contenant ou ayant contenu la fameuse… gnôle, justement ! (et pourquoi pas du genièvre ?) mélangée au café, zeste de critron, éventuellement… autres délices, que le parfum des vieilles godasses (encore que l’origine des deux mots soit, semble-t-il, commune).

  58. Les Belles Lettres font certainement un « travail formidable », mais pas « en dépit de tout bon sens capitaliste ». D’une, l’incendie de leur dépôt et la réimpression de la totalité du stock de la Collection des Universités de France a été l’occasion d’une baisse considérable de la qualité des matériaux: le cartonnage des volumes (massicotés depuis la fin des années 70) s’était agrémenté, entre 1994/1995 et 1999, d’un glaçage du meilleur aloi, or le parti a été pris de tout reproduire en broché sur le même papier mais avec une qualité d’assemblage très inférieure et un encollage peu résistant (adieu aux cahiers cousus). Le format des nouveaux volumes a été rogné de 4 mm, aux dimensions des pages des volumes cartonnés et non plus de leurs couvertures. On peut comprendre qu’il était nécessaire de diminuer les coûts de production; mais la collection a définitivement perdu de son lustre et fait piètre figure à côté des volumes toilés de la collection Teubner (qui ne se vendent pas sensiblement plus cher, à dimensions équivalentes). De deux, le prix des vielles éditions Budé, pourtant amorties depuis des lustres et en mal chronique de refonte (en grec Homère, Hésiode, Eschyle, l’essentiel d’Euripide, Hérodote, Pindare, Isocrate, une grande partie de Démosthène, etc; en latin Plaute, les discours de Cicéron, la quasi-totalité d’Ovide et de Sénèque, Lucain, Catulle, Tibulle, Properce, Apulée, Prudence , etc), a été converti depuis le franc, et cela constitue une extorsion vu la piètre qualité scientifique de nombre de ces travaux (le Lucain et l’Ovide Budé en particulier sont un scandale, entre le texte mal établi, la traduction tour à tour lointaine ou fautive, les notes pauvres et souvent même aberrantes). De trois, les prix des nouvelles éditions ne cessent d’augmenter; la moyenne d’une Budé de ces dernières années tourne autour de soixante euros, et que l’on n’escompte pas y trouver deux ou trois centaines de pages de notes complémentaires et une notice monographique. Ce type français d’édition commentée, qui semble réservé à la C.U.F. grecque, se décline désormais en deux volumes non vendus séparément (135 € pour Eunape, 117 € les hymnes orphiques, 112,60 € le tome III de l’In Parmenidem de Proclus, 91,60 € le tome I de ce même commentaire); or le bât blesse en ce que la qualité de ces vastes travaux peut être remise en question (tout ce Proclus est établi sur des bases textuelles contestables et s’enferme dans une polémique hargneuse envers l’édition rivale d’Oxford; les trois quarts de l’imposante introduction de l’Eunape constituent du déballage de fiches prosopographiques ou de la reconstruction spéculative en histoire littéraire, au détriment du commentaire grammatical d’autant plus indispensable pour ce grec alambiqué et difficile que l’éditeur a choisi de toucher le moins possible au texte transmis, malgré la précarité de son attestation manuscrite; et comme d’habitude dans la C.U.F., la bibliographie n’a aucune prétention d’exhaustivité ou même seulement de représentativité). Les autorités des Belles Lettres comptent sur leur très solide réseau de diffusion dans les bibliothèques universitaires pour diffuser ces volumes malgré leur obésité et leur cherté; la solution alternative consistant à borner ce type d’édition et à réserver pour un volume de complément, ce que les Anglo-Américains appellent des « ‘Companions » , toute la matière non indispensable, n’est même pas envisagée car ces parerga paraissant simultanément à l’édition critique se vendraient moins bien. Bref l’effort de renouvellement de la C.U.F., en particulier grecque, ces quinze dernières années est aussi remarquable que commercialement intéressé; sauf pour leur collection Classiques en Poche, on a le droit de penser que Les Belles Lettres émulent Oxford University Press, Brill ou De Gruyter dans l’explosion des prix des nouveautés, tout en s’écartant de ces vénérables maisons par le rognage assez mesquin sur la qualité de la confection et de la présentation.

    • Bravo, Neo-birt7, vous avez flingué ma journée et mon plaisir de recevoir, juste après la lecture de votre commentaire, deux Belles-lettres : « l’enlèvement d’Hélène » de Collouthos (le prequel de « L’Illiade », pour le dire vite) et le premier volume de « la Suite d’Homère », de Quintus de Smyrne (la séquelle, donc).
      Je maintiens le « en dépit de tout bon sens capitaliste » : Qui connaît encore Collouthos ? Combien de personnes cela intéresse-t-il en France ? Combien s’en vend-il dans l’année ?
      J’ai bien conscience, cependant, que la collection doit tenir compte des réalités économiques ; que la facture des livres est moins prestigieuse que le cuir des Pléiades.
      Sur le prix : je n’ai pas souvenir d’avoir payé un volume plus de 40 euros (à mon avis : moyenne de 35 euros), mais je veux bien croire que vos exemples sont justifiés. Dans tous les cas, il est vrai que la collection est onéreuse. Se « lancer »  dans l’acquisition d’un Hérodote en 10 volumes, ou Thucydide en 5 volumes demande réflexion (surtout quand le Pléiade réunit les deux historiens en un seul volume). Sans parler de Pline l’ancien (de mémoire 36 ou 37 tomes…)
      Ce qui a ruiné ma journée : votre critique de l’établissement du texte et des traductions dans cette collection. Mes ambitions sont pourtant diablement modestes : En simple amateur (sous-entendu : sans maîtriser ni latin, ni grec, ni allemand, ni assez l’anglais pour une lecture intelligente) lire pendant le temps qu’il me reste, mais sans me presser pour autant, les classiques dans le meilleur texte possible. A qui puis-je me fier Si, pour les pour les antiques, le texte des Belles-lettres est sujet à caution ?
      L’Ovide que je réservais pour mes prochaines vacances bretonnes est-il si déplorable ?

      • Sur les poèmes érotiques d’Ovide dans la C.U.F. (Amours – Remèdes d’amour – Art d’aimer – Medicamina – Héroïdes-, édités par H. Bornecque, 1924-1930), voici une anthologie de jugements par le génial latiniste et poète anglais A. E. Housman, qui fut un éditeur de textes exceptionnel (Manilius, Juvénal, Lucain); ces critiques portent sur les seules Héroïdes, avec une traduction de M. Prévost, mais elles valent pour tous ces vieux volumes. « Many of his renderings are mistakes in Latin which would draw down censure on a schoolboy »; « Mr Prévost sometimes mistranslates under compulsion, because Mr Bornecque has given him a text which must be mistranslated if it is not to be nonsense »; « Mr Bornecque’s share of the work is much worse done. As he has collated no manuscript, he had only to report the witness of Sedlmayer or (for P) of Palmer; and this simple task he has been unable to perform without making more than 200 false statements »; « (Mr Bornecque) has not learnt to read an apparatus criticus, and some of his mistakes are due less to negligence than to ignorance of his trade »; « a recension of Ovid by this scholar can have no importance. It is chiefly distinguished by its freedom in admitting conjectures, on condition that they are causeless and useless, and its readiness to expel verses as interpolated, provided that there is nothing against them ». Le lecteur intéressé par la seule traduction peut aussi bien consulter le volume des anciens Classiques Garnier d’Emile Ripert; il donne les notes les plus indispensables et une version assez intéressante en face d’un texte malheureusement aléatoire. Quand on sait le niveau général de Ripert, c’est assez dire que ces oeuvres sont maltraitées dans la C.U.F.
        Les Métamorphoses Budé par le grand érudit et le très bon connaisseur des sources ovidiennes que fut Georges Lafaye ne sont pas aussi mauvaises que les tomes préparés par Bornecque mais ont suffisamment de défauts pour les discréditer. Cet éditeur était un antiquaire plutôt qu’un critique textuel; il eut l’intelligence de s’appuyer davantage sur les manuscrits secondaires et de tenter de constituer un texte éclectique, mais sa pratique reste timide, l’apparat critique est à la fois inadéquat et trop succinct, et la traduction, très (trop ?) élégante, a le chic pour contourner les difficultés (elle a été réimprimée en poche avec une préface du literary scholar J.-P. Néraudeau mais ne vaut pas, il s’en faut de beaucoup, celle de Joseph Chamonard dans les vieux Classiques Garnier puis en GF). Même si la Budé avait été de qualité, son obsolescence (elle date de 1925-1930) serait inévitable après le gigantesque commentaire allemand de Bömer (1969-1986, 5 vol.), qui a beaucoup fait progresser notre compréhension du poème. Les éditions d’Ovide par Jacques André (Tristes, Pontiques, Ibis, 1963-1977) souffrent d’avoir été faites par un savant qui n’était nullement expert en poésie latine et n’a même souvent aucune idée de la phraséologie propre aux poètes augustéens (l’éditeur-commentateur de référence des Amours, McKeown, a écrit des Pontiques Budé que leur « chief merit is the translation, which is almost always lucid and honest, but this is far outweighed by the defects, which include ignorance of metre, style, and even grammar »‘). Les Fastes signées par l’éminent connaisseur de la religion romaine que fut Robert Schilling (1992-1993) ne sont pas meilleures; il y avait une certaine mesquinerie à n’écrire de notes qu’historiques ou religieuses alors que le lecteur intéressé par ces matières dispose déjà de deux énormes commentaires (anglais par James Frazer, l’auteur du Rameau d’or, allemand par Bömer), mais c’était pour dissimuler la critique textuelle peu fameuse de Schilling et sa tendance à voir les problèmes de texte en noir et blanc. Attention donc à sa traduction. Restent les petits poèmes ovidiens; les Halieutiques n’ont pas été trop mal édités par E. de Saint-Denis (1975), auquel la collection doit ses Bucoliques et ses Géorgiques virgiliennes, Dans l’ensemble, l’Ovide Budé est soit périmé (les volumes de Bornecque-Lafaye) soit sans grande valeur (tout le reste de l’édition); il fait très piètre figure, quel que soit le poème concerné, avec les éditions allemandes et anglaises, voire italiennes.

      • Draak, toute édition Budé signée Francis Vian (soit Quintus de Smyrne, les Argonautiques orphiques, Apollonios de Rhodes, et une partie de Nonnos) doit inspirer confiance; tenu par des hellénistes du calibre de Hugh Lloyd-Jones et Martin West pour leur égal, ce savant était le plus fin connaisseur français de la poésie hellénistique et impériale du XXe siècle en même temps qu’un bon critique textuel (à la différence de Paul Mazon par exemple) et un superbe commentateur. Le Musée (Héro et Léandre) et le Collouthos de Pierre Orsini à la C.U.F. ne sont pas mauvais, tant s’en faut, mais ses deux très fins volumes procurent une aide tout à fait insuffisante pour ces épyllia notoirement difficiles (la poésie épique tardive est délicate à éditer; son extrême sophistication formelle et l’imitation modifiée d’Homère dans le sillage de l’école nonnienne laissent souvent l’éditeur dans l’embarras: quand faut-il corriger une leçon manuscrite unanime mais bizarre ou qui a l’air insupportable et quand le risque est-il trop grand de banaliser le texte ? entre diverses variantes, doit-on choisir la plus homérique ou la plus innovatrice, et quand convient-il de le faire ? etc). Vous pouvez lire aussi la Prise de Troie par Triphiodore, assez bien éditée à la C.U.F. par un disciple de Vian, Bernard Gerlaud (introduction et notes sont importantes); ainsi vous aurez un récit à peu près complet de la geste troyenne.

        • Merci cher Neo-birt7 du temps que vous avez bien voulu consacrer à me répondre. Je suis heureux que l’ensemble de mes Belles lettres ne soient pas à jeter. J’ai déjà le petit volume de Triphiodore, mais ne l’ai pas encore lu : contrairement à notre hôte, Brumes, je lis désespérément lentement (si bien que mes livres s’accumulent – très belle note de Brumes à ce sujet quelque part sur le blog). Les antiques encore plus lentement car je peine sur chaque phrase (même en français) et prends plus de note qu’il n’y a de texte.
          Je ne pourrai pas toujours vous réclamer un avis avant un achat, ni polluer indéfiniment cette page consacrée aux Pléiades. Alors je choisis parmi ma liste de « classiques à lire »  les plus importants pour vous solliciter une dernière fois : les historiens (Herodote / Thucydide) seraient à lire dans quelle édition ? Que vaut le Pléiade, d’ailleurs ? Je suis « arrivé aux Grecs » par l’intermédiaire de Jacqueline de Romilly (l’année de sa mort, d’ailleurs, qui m’a désolé) et suis donc naturellement pressé de lire Thucydide ; prochaine lecture d’envergure, après la geste troyenne. Merci d’avance.

          • Pardon, cher Draak, pour le délai à vous répondre.

            Sous réserve de trouvailles spectaculaires comme le nouvel Archimède, l’histoire de la transmission du texte de l’Enquête d’Hérodote et de la Xungraphê de Thucydide (La guerre du Péloponnèse) est suffisamment bien connue pour qu’il n’y ait pas de grand secours à attendre de nouvelles collations des manuscrits. La Teubneriana d’Haim Rosén pour Hérodote et l’édition italienne d’Alberti pour Thucydide sont très suffisantes à cet égard. Les traductions de l’Enquête réalisées sur les textes plus anciens sont parfaitement utilisables dans la mesure où les principaux éditeurs, Rosén y compris, se préoccupent avant tout de questions morphologiques liées au dialecte (un ionien littéraire assez artificiel) et ne présentent que peu de variations engageant le sens; or ce dernier est très rarement douteux chez Hérodote. Les versions modernes de la Guerre du Péloponnèse, elles, offrent moins d’unanimité; la faute à la très grande difficulté du grec thucydidéen, qu’il faut déchiffrer (au sens fort) de difficulté en difficulté sans disposer de critérium grammatical ou stylistique indiscutable. Les éditeurs modernes n’aident guère les traducteurs; en effet, ils s’en tirent le plus souvent en maintenant au maximum le texte transmis. Les éditions du XXe siècle constituent donc une sorte de vulgate qu’il incombe au traducteur d’expliciter comme il peut. Pour le non-helléniste, choisir un Thucydide revient donc à s’en remettre pieds et poings liés à l’interprète. (Hérodote devra d’ailleurs être retraduit pour tenir compte du tout nouveau texte, très novateur par son choix de variantes « lourdes » et de nombreuses corrections, proposé par Nigel Wilson dans les Oxford Classical Texts; le Thucydide en préparation dans cette même série s’annonce lui aussi particulièrement innovant)

            Le volume de la Pléiade représente un choix intéressant pour sa maniabilité, son annotation suffisante mais pas tentaculaire, et le niveau très correct de ses versions françaises. Andrée Barguet y offre un Hérodote moins brillant mais plus simple et plus moderne que celui de P.-E. Legrand dans la C.U.F.; l’allure traînante et le charme archaïsant de l’original sont rendus mieux que quiconque par Henri Berguin dans les deux tomes des anciens Classiques Garnier, sans pour autant qu’il s’agisse d’une belle infidèle à la Larcher. Denis Roussel propose un Thucydide ‘Pléiade’ dont la franchise d’allures, voire le style coulant, ne reflètent guère la densité et la tension de l’original; le parti-pris de rejeter en pied de pages un assez grand nombre de phrases, prétendument au titre de hors-d’oeuvre ou de digressions, laisse transparaître le même désir de limpidité un peu excessif. La traduction Roussel l’emporte toutefois sur celle de la C.U.F., édition étrange où se mêlent du Raymond Weil (spécialiste de l’historiographie aristotélicienne) et du Jacqueline de Romilly à du Louis Bodin posthume et pour laquelle le mot d’Alec Issigonis contre les entreprises collectives mal pensées fait mouche: « a camel is a horse designed by a committee ». Cette traduction s’attache à rendre la complexité du style thucydidéen, avec ses longues phrases enchevêtrées aux antipodes de ce que sera la période oratoire claire et bien balancée des orateurs attiques du IVe siècle; elle se tient pourtant assez loin du grec, par ses recherches de style et son maniérisme académique. L’absence quasi-totale de justifications grammaticales dans les notes est proprement stupéfiante vu le conservatisme intransigeant ayant présidé à l’établissement du texte Budé et les insuffisances de l’apparat critique. Rappelons que Mme de Romilly, comme son maître Mazon, était une littéraire bon ton bien davantage qu’une philologue; ses très célèbres travaux sur Thucydide relèvent d’ailleurs exclusivement de l’historiographie. Les Classiques Garnier ne rentrent pas en ligne de compte, vu leur méchante traduction de Jean Voilquin (auquel on doit une version manquée de l’Ethique à Nicomaque d’Aristote et de peu fidèles extraits des Présocratiques).

          • Neo-birt7,
            Je ne vous ai pas répondu plus tôt, pour de sombres raisons fiscales, figurez-vous, mais me voilà libéré de mes déclarations de revenus et d’ISF, et me voilà grâce à vous sur un projet de lecture de longue haleine. Les prochaines vacances s’annoncent grecques, définitivement.

  59. Concernant la possible réédition des oeuvres de Descartes en Pleiade, voici des informations intéressantes de la part de Denis Kambouchner qui, je crois, supervise l’édition Tel Gallimard. À la question :  » Les Œuvres complètes de Descartes sont-elles d’ailleurs réellement prévues en Pléiade ?  » Il répond ceci :

    « Bien entendu. Je ne peux résumer ici l’histoire de cette entreprise, qui a pris son départ il y a quelque vingt-cinq ans et connu de nombreuses péripéties, la dernière étant justement la découverte des Regulae de Cambridge, intervenue alors que notre travail sur ce texte était presque terminé, et suivie d’une longue attente. Disons seulement que le projet de l’édition Tel est né de la difficulté de publier en format « Pléiade » des Œuvres complètes comportant un appareil critique aussi important que celui que l’équipe réunie par Jean-Marie Beyssade (et, à l’origine, par Jean-Luc Marion) avait réalisé. Une fois achevée l’édition Tel, qui a elle-même impliqué d’importants réaménagements par rapport au dispositif initial, les mêmes textes paraîtront donc dans « La Pléiade » avec un appareil critique simplifié. C’est là une distribution inversée par rapport à ce qui fut un temps la norme (appareil critique abondant en Pléiade, plus restreint dans des collections de grande diffusion), mais elle me paraît – comme elle a paru à nos éditeurs de chez Gallimard, Éric Vigne et Hugues Pradier – répondre adéquatement à de nouveaux besoins, notamment ceux des étudiants à qui il importe d’offrir dans des conditions aussi économiques que possible des instruments de travail aussi complets que possible. »

    source : http://www.actu-philosophia.com/spip.php?article609

    • Merci, Heidegger, pour le lien, l’ensemble de l’entretien est passionnant, comme le site actu-philosophia.
      Trois remarques à propos de la réponse de Denis Kambouchner :
      – parler de « nouveaux besoins » pour les étudiants d’avoir des éditions de référence à des prix abordables me laisse songeur. Il me semblait que c’était un besoin ancien et que les étudiants d’autrefois cherchaient déjà des éditions critiques au plus bas prix possible.
      – le prix de ces œuvres complètes sera-t-il vraiment économique? L’édition doit comprendre huit volumes. Trois sont parus, le Discours de la méthode est à 17 euros 75, les deux volumes de la Correspondance à 30 euros chacun, donc un total de 77 euros 75, la différence avec le prix moyen d’un Pléiade ne me semble pas flagrante.
      – l’édition Descartes en Pléiade paraitra avec « un appareil critique simplifié ». Si on achète un volume de la Pléiade, c’est pour l’aspect esthétique et la place réduite dans la bibliothèque, mais c’est surtout pour avoir une édition de référence, ce ne sera donc pas le cas.

  60. Il y a un parti pris systématique d’exclure de ces collections prestigieuses, mais cela vaut pour toute l’édition qui se consacre à la littérature, les grands auteurs d’Europe orientale. On n’y trouve pas de grands auteurs comme Ivan Bounine, pourtant prix nobel de littérature, et considéré par les Russes comme leur plus grand écrivain de l’émigration, pas de traduction de Petar Petrovic Njegos, auteur monténégrin, considéré au 19è siècle comme un pair d’Homère, de Milton ou de Shakespeare, pas d’auteurs hongrois ou Serbes. Quel différence avec le début du XXè siècle où la littérature slave était bien plus largement traduite en France. C’est tout un large pan de la littérature mondiale qui est systématiquement occulté.

  61. Bonsoir,
    je ne comprends plus la politique éditoriale.
    Il y a de plus en plus de coffrets qui sortent et moins de nouveautés chaque année.
    Les albums de la Pléiade ne devaient jamais être réédités, puis l’album Flaubert a été réédité en 2021et cette année sera le tour de l’album Céline. Sans oublier celui de « Les Mille et une nuits » ajouté dans le coffret éponyme.
    S’agissant de Céline, une nouvelle édition sortira en mai comprenant les trois nouveaux écrits retrouvés de Céline.
    Quid des autres manuscrits retrouvés, aurons nous droit à une troisième édition?
    Qu’en est-il de la suite d’Aristote, et des autres?
    Sans oublier l’augmentation des prix des volumes.
    Je ne comprends pas comment la collection est gérée.

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